Tribunal administratif de la Polynésie française Lecture du 13/02/2018 Décision n° 1700260 | Décision du Tribunal administratif n° 1700260 du 13 février 2018 Tribunal administratif de Polynésie française Vu la procédure suivante : Par une requête et un mémoire enregistrés les 10 juillet 2017 et 25 janvier 2018, Mme Moemoea T., représentée par Me Neuffer, avocat, demande au tribunal : 1°) d’annuler la décision du 25 avril 2017 par laquelle le directeur général des finances publiques a refusé sa nomination à la suite de sa réussite au concours commun interne d’agent de catégorie C des ministères économiques et financiers ; 2°) d’enjoindre à l’administration de la nommer fonctionnaire stagiaire sous astreinte de 5 000 F CFP par jour de retard ; 3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 250 000 F CFP au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient qu’elle remplissait les conditions pour être nommée dans l’emploi dès lors qu’elle est agent public en application des dispositions combinées des délibérations n° 95-215 AT et n° 2004-15 APF depuis de nombreuses années et qu’elle a réalisé plus d’un an de services publics effectifs. Vu la décision attaquée. Par un mémoire en défense enregistré le 24 novembre 2017, le haut- commissaire de la République en Polynésie française conclut au rejet de la requête. Elle fait valoir qu’aucun des moyens n’est fondé. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ; - la délibération n° 2004-15 APF du 22 janvier 2004 relative aux agents non titulaires des services et des établissements publics administratifs de la Polynésie française ; - la délibération n° 95-215 AT du 14 décembre 1995 portant statut général de la fonction publique du territoire de la Polynésie française ; - le décret n° 2010-984 du 26 août 2010 portant statut particulier du corps des agents administratifs des finances publiques ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique du 30 janvier 2018 : - le rapport de Mme Zuccarello, première conseillère ; - les conclusions de M. Retterer, rapporteur public ; - et les observations de Me Neuffer, représentant Mme T., et celles de M. Chang, représentant le haut-commissaire de la République en Polynésie française. Considérant ce qui suit : 1. Mme T. a été admise au concours commun interne d’agent administratif de catégorie C des ministères économiques et financiers organisé au titre de l’année 2016. Cependant par une décision du 15 février 2017, le directeur général des finances publiques l’informait qu’elle ne serait pas nommée dans un poste dès lors qu’elle ne remplissait pas les conditions fixées par le décret n°2010-984 du 26 août 2016 pour concourir. A la suite du recours formé par Mme T., le directeur général des finances publiques a confirmé ce refus par une nouvelle décision du 25 avril 2017 dont Mme T. demande l’annulation. Sur les conclusions à fin d’annulation : 2. Aux termes de l’article 10 du décret n° 2010-984 du 26 août 2010 portant statut particulier du corps des agents administratifs des finances publiques : «I. Les agents administratifs des finances publiques de 1re classe sont recrutés : (…) 2° Par un concours interne sur épreuves ouvert, dans la limite de 50 % des places mises aux concours, aux fonctionnaires et agents de l'Etat, des collectivités territoriales et des établissements publics qui en dépendent, y compris ceux mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, aux militaires ainsi qu'aux agents en fonction dans une organisation internationale intergouvernementale à la date de clôture des inscriptions, comptant au 1er janvier de l'année au titre de laquelle le concours est organisé au moins une année de services publics effectifs. (…) ». 3. Pour refuser de nommer Mme T. en qualité d’agent administratif des finances publiques stagiaire, le directeur général des finances publiques a estimé que la lauréate ne remplissait aucune des deux conditions visées par les dispositions précitées pour concourir, dès lors qu’elle n’avait pas la qualité d’agent public et n’avait pas accompli un an de services publics effectifs. 4. Cependant, d’une part, il ressort des pièces du dossier que Mme T., à la date de clôture des inscriptions, soit le 20 juin 2016, avait été recrutée par le centre hospitalier de la Polynésie française en qualité d’agent contractuel sur un emploi de rédacteur. Dès lors, elle devait être regardée comme un agent d’un établissement public dépendant d’une collectivité territoriale au sens des dispositions précitées. En outre, et surabondamment, contrairement à ce que soutient l’Etat en défense, Mme T. n’était pas soumise au droit du travail mais au statut de droit public des agents non titulaires des services et des établissements publics administratifs de la Polynésie française en application des dispositions combinées des délibérations n°95-215 AT du 14 décembre 1995 et n°2004-15 APF du 22 janvier 2004. 5. D’autre part, la condition d’ancienneté de services publics fixée doit s’entendre comme visant les personnes ayant servi pendant au moins un an en qualité d’agent d’un service public administratif, y compris celles qui y ont été employées, pendant tout ou partie de cette période, dans le cadre de contrats relevant du droit privé en vertu de dispositions législatives particulières. Dès lors, l’ensemble des services publics effectifs accomplis par un agent non titulaire doit être pris en compte pour l’appréciation de son droit à concourir. En l’espèce, il ressort des pièces du dossier que Mme T. a été recrutée depuis 2009 tant par l’Etat que par le territoire ou le centre hospitalier de la Polynésie française en qualité d’agent contractuel de services publics administratifs et affectée à des taches administratives. En conséquence elle a accompli plus d’un an de services publics effectifs au sens des dispositions précitées du décret n° 2010-984 du 26 août 2010. 6. Il résulte de tout ce qui précède, qu’en refusant de considérer comme services publics les services effectués par Mme T. depuis 2009, et en lui refusant la qualité d’agent d’un établissement public dépendant d’une collectivité territoriale à la date de la clôture des inscriptions audit concours, le directeur général des finances publiques a entaché sa décision d’erreurs de droit. La décision du 25 avril 2017 doit donc être annulée. Sur les autres conclusions : 7. Le présent jugement, qui annule la décision du 25 avril 2017 refusant la nomination de Mme T. à la suite de sa réussite au concours commun interne d’agent de catégorie C des ministères économiques et financiers, implique nécessairement compte tenu du motif ci-dessus exposé, que l’intéressée soit nommée fonctionnaire stagiaire dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement, sans qu’il soit nécessaire d’assortir cette injonction d’une astreinte. 8. Dans les circonstances de l’espèce, l’Etat versera à Mme T. la somme de 150 000 F CFP au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : La décision du 25 avril 2017 du directeur général des finances publiques est annulée. Article 2: Il est enjoint à l’Etat de nommer Mme T. fonctionnaire stagiaire en qualité d’agent de catégorie C des ministères économiques et financiers, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement. Article 3 : L’Etat versera à Mme T. la somme de 150 000 F CFP au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 5 : Le présent jugement sera notifié à Mme T. et au haut- commissaire de la République en Polynésie française. Délibéré après l'audience du 30 janvier 2018, à laquelle siégeaient : M. Tallec, président, Mme Meyer, première conseillère, Mme Zuccarello, première conseillère. Lu en audience publique le 13 février 2018. La rapporteure, Le président, La greffière, D. Riveta La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition Un greffier |