Tribunal administratif de la Polynésie française Lecture du 13/02/2018 Décision n° 1700250 Solution : Rejet | Décision du Tribunal administratif n° 1700250 du 13 février 2018 Tribunal administratif de Polynésie française Vu la procédure suivante : Par une requête enregistrée le 28 juin 2017, Mme Moea X, représentée par Me Mestre, avocat, demande au tribunal : 1°) de condamner l’Etat à lui verser la somme totale de 3 550 000 F CFP au titre de la régularisation de sa rémunération en qualité de vacataire puis contractuel de l’Etat affectée au CETAD de Tahaa ; 2°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 1 177 759 F CFP, à titre d'indemnité de licenciement et la somme de 326 552 F CFP au titre de l'indemnisation du préavis non-exécuté ; 3°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 1 500 000 F CFP au titre du préjudice moral qu’elle estime avoir subi du fait de la privation illégale de son emploi ; 4°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 200 000 F CFP au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle a été recrutée en décembre 2006 en qualité de vacataire pour enseigner le jardinage, l’artisanat et l’animation au CETAD de Tahaa et qu’elle aurait dû être rémunérée selon l'article 4 du décret n° 89- 497 du 12 juillet 1989 et l’arrêté du 3 octobre 1989, soit à 34,30 € de l’heure avec une majoration de 1,84 % au lieu des 12,35 € qui lui ont été servis ; - elle aurait dû également percevoir l’indemnité de suivi et d’orientation des élèves ; - elle devait bénéficier du statut d’agent non titulaire recruté pour des contrats de 3 ans et ne pouvait pas être licenciée sans indemnité de licenciement et de préavis ; - elle a subi un préjudice moral du fait d’avoir été privée illégalement de son emploi. Par un mémoire en défense enregistré le 14 novembre 2017, le haut- commissaire de la République en Polynésie française conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que la requête est irrecevable, la demande préalable ayant été reçue par ses services le 5 octobre 2016 et la requête ayant été enregistrée le 28 juin 2017. Par lettre du 19 janvier 2018, les parties ont été informées, en application de l’article R. 611-7 du code de justice administrative, que le jugement paraissait susceptible d’être fondé sur un moyen d’ordre public soulevé d’office tiré de l’incompétence du tribunal pour statuer sur un litige concernant un agent se trouvant dans une situation contractuelle vis- à-vis de l’Etat. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ; - la loi n°86-845 du 17 juillet 1986 modifiée relative aux principes généraux du droit du travail et à l’organisation et au fonctionnement de l’inspection du travail et des tribunaux du travail en Polynésie française ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique du 30 janvier 2018 : - le rapport de Mme Zuccarello, première conseillère ; - les conclusions de M. Retterer, rapporteur public ; - et les observations de Me Mestre, représentant Mme X, et celles de M. Chang, représentant le haut-commissaire de la République en Polynésie française. Considérant ce qui suit : 1. Mme Moea X a été recrutée depuis décembre 2006 en qualité de vacataire puis d’agent contractuel, affectée au CETAD de Tahaa afin d’y enseigner le jardinage, l’artisanat et l’animation. Son contrat n’a pas été renouvelé après décembre 2014. Elle réclame l’application à sa situation du décret n° 89-497 du 12 juillet 1989 et de l'arrêté du 3 octobre 1989 et demande que l’Etat lui verse les sommes correspondant aux rappels de traitements qui leur sont dus. Elle demande également le versement d’une indemnité de licenciement, d’une indemnité de préavis, et d’une indemnité en réparation du préjudice qu’elle estime avoir subi du fait de son licenciement illégal. 2. Aux termes de l’article 1er de la loi n° 86-845 du 17 juillet 1986 relative aux principes généraux du droit du travail et à l'organisation et au fonctionnement de l'inspection du travail et des tribunaux du travail en Polynésie française : « La présente loi (…) s'applique à tous les salariés exerçant leur activité dans le territoire.(…) Sauf dispositions contraires de la présente loi, elle ne s'applique pas aux personnes relevant d'un statut de droit public y compris les fonctionnaires et les agents non titulaires relevant du statut de droit public adopté par délibération de l'assemblée de la Polynésie française. ». 3. Il résulte de ces dispositions que cette réserve ne concerne, pour l’Etat, que des personnes régies par les dispositions du titre premier du statut général des fonctionnaires de l'Etat et des collectivités territoriales. En outre, l'abrogation de l’article 1er de la loi du 17 juillet 1986, à laquelle la loi de pays n° 2011-15 du 4 mai 2011 a procédé, n'a pu avoir pour objet et ne saurait avoir légalement pour effet de l'abroger en tant qu'elle régissait la situation des salariés recrutés localement exerçant leurs activités dans les services de l’Etat ou dans ses établissements publics administratifs. La loi du 17 juillet 1986 demeure donc en vigueur pour cette catégorie de salariés, et la juridiction administrative n'est, en conséquence, pas compétente pour connaître des litiges relatifs à la situation de ces agents, quelle que soit la date de conclusion de leur contrat. 4. En conséquence, la requérante, qui se trouvait dans une situation contractuelle vis-à-vis de l’Etat, n’a ni la qualité de fonctionnaire de l’Etat, des collectivités territoriales ou de la Polynésie française ni celle d’agent contractuel de droit public recruté en application de délibération de l’assemblée de la Polynésie française. Dès lors, le litige relatif à sa rémunération et aux conditions de son licenciement ne relève pas, en application des dispositions précitées, de la compétence de la juridiction administrative et il lui appartient de saisir les tribunaux de l’ordre judiciaire de ce litige (Tribunal de conflits, n°3825, du 5 mars 2012, Mme Y. c/ haut-commissaire de la République en Polynésie française de Nouvelle Calédonie). 5. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de mettre à la charge de l’Etat la somme que Mme X demande au titre de l’article L. 761- 1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : La requête de Mme X, est rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaitre. Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme X et au haut-commissaire de la République en Polynésie française. Délibéré après l'audience du 30 janvier 2018, à laquelle siégeaient : M. Tallec, président, Mme Meyer, première conseillère, Mme Zuccarello, première conseillère. Lu en audience publique le 13 février 2018. La rapporteure, Le président, La greffière, D. Riveta La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition Un greffier, |