Rapport nº 14-2024 relatif a un projet de délibération portant approbation du projet de contrat de développement et de transformation 2024-2027 relatif au financement de projets relevant de la compétence de la Polynésie française Paru in extenso au JOPF n° 11 NA du 25/10/2024 à la page 831
| Rapport nº 14-2024 relatif a un projet de délibération portant approbation du projet de contrat de développement et de transformation 2024-2027 relatif au financement de projets relevant de la compétence de la Polynésie française Présenté par M. et Mme les représentants Heinui Le Caill et Elise Vanaa Le président : Merci. La séance de questions orales étant épuisée — il est exactement 10 h 55 —, je vous propose de vous reporter au premier rapport, s’agissant du rapport n° 14-2024 relatif à un projet de délibération portant approbation du projet de contrat de développement et de transformation 2024-2027 relatif au financement de projets relevant de la compétence de la Polynésie française. Je demande au gouvernement, s’il le souhaite, d’exposer l’économie générale de ce dossier. Monsieur le ministre. M. Tevaiti-Ariipaea Pomare : Monsieur le président de l’assemblée, Monsieur le Président du gouvernement, Mesdames et Messieurs les ministres, Mesdames et Messieurs les représentants, à vous tous ici présents et toutes celles et ceux qui nous écoutent, bonjour. Depuis 2021, l’État apporte au titre du présent contrat de développement et de transformation, le CDT, son concours financier au Pays pour la réalisation d’investissement contribuant au développement économique, social, culturel et environnemental de la Polynésie française. Le présent projet de convention a pour objet de renouveler pour la période 2024-2027 ce partenariat essentiel à la collectivité. Donc, ce contrat de développement et de transformation pour 2024 et 2027 vise à financer à parité entre l’État et le Pays environ 21,3 milliards F CFP de projets d’investissement (soit environ 5,3 milliards F CFP par année sur quatre années). Voilà pour l’exposé. Merci. Le président : Merci. Donc, j’appelle le rapporteur Heinui Le Caill à donner lecture de son rapport. M. Heinui Le Caill : Président, Président du Pays, Madame la vice-présidente, Messieurs et Mesdames les ministres et membres du cabinet, chers collègues représentantes et représentants, Madame la sénatrice, Messieurs les députés, Mesdames et Messieurs de la presse, du public et internautes, bonjour. Je vais un peu paraphraser notre ministre. Dans la continuité des contrats de développement de 1994 à 2007 et des contrats de projets de 2008 à 2013, prorogés à 2014, et 2015-2020, l’État apporte son concours financier au Pays à travers un contrat de développement et de transformation (le CDT) pour la réalisation d’investissements contribuant au développement économique, social, culturel et environnemental du Pays. Une première convention cadre pluriannuelle a ainsi permis d’encadrer la mise en œuvre de ce dispositif pour la période 2021-2023 pour un volume minimum de projets de près de 135 millions d’euros (soit 16,11 milliards F CFP). Les secteurs éligibles au CDT (2021-2023) étaient : le secteur primaire, la transition énergétique, le logement social, le développement touristique, le développement culturel, les infrastructures et équipements sportifs, la santé et la solidarité. Le CDT (2021-2023) étant arrivé à échéance le 31 décembre 2023, il est proposé donc de renouveler ce partenariat pour la période 2024 à 2027. Tout en maintenant les grandes lignes du précédent dispositif, les secteurs éligibles au présent projet de CDT font l’objet donc d’une fiche de présentation à l’annexe 1 — qu’on a tous reçu — détaillant notamment le contexte, les objectifs poursuivis et les principales orientations du secteur, les types de projets d’investissement et les indicateurs associés. Il s’agit du secteur primaire (ressources agricoles et marines), le logement social, le développement touristique, le développement culturel, les infrastructures et équipements sportifs — notamment pour assurer les Jeux du Pacifique 2027 — la santé et la solidarité. Comparativement au précédent CDT, il a été procédé au retrait de la transition énergétique de la liste des secteurs éligibles (relevant désormais du « Fonds de transition énergétique » régi par une convention spécifique), au rappel des financements connexes qui seront également apportés par l’État et ses opérateurs (dont l’Agence nationale du sport, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie et l’Office français de la biodiversité) et à l’ajout de Météo France à titre exceptionnel dans les bénéficiaires du CDT. Hors financements connexes, le CDT (2024-2027) vise à financer, à parité entre l’État et le Pays, environ 21,3 milliards F CFP de projets d’investissement relevant des compétences du Pays, soit environ 5,3 milliards F CFP par an sur quatre ans. Lors de l’examen en commission du présent projet de délibération, le 18 avril 2024, il a été précisé que le Pays, hors Nouvelle-Calédonie, est le premier territoire d’Outre-mer français à avoir achevé les négociations pour une très prochaine adoption (avec des mandats de négociation reçus en fin février 2023), témoignant de la qualité et de la fluidité des échanges qui ont été conduits entre le Pays et l’État. L’année 2024 permettra ainsi de programmer et d’engager les premières sommes pour des projets déjà identifiés, tels que le logement social. Les débats en commission ont par la suite porté sur l’acquisition du nouveau radar et son inscription dans le présent CDT, la nécessité d’accélérer les discussions sur les difficultés rencontrées en matière archivistique et la transition énergétique, essentielle pour les habitants des îles éloignées. À l’issue de ces débats, le présent projet de texte a recueilli un vote favorable unanime des membres de la commission. En conséquence, la commission de l’économie, des finances, du budget et de la fonction publique propose à l’assemblée d’adopter le projet de délibération ci-joint. Merci. Le président : Merci, Monsieur le rapporteur. Pour la discussion générale, la conférence des présidents a prévu un temps de parole de 60 minutes réparties comme suit : 36 minutes Tavini huiraatira, 15 minutes Tapura huiraatira et 9 minutes non-inscrits. J’invite l’intervenant du Tapura huiraatira à prendre la parole. M. Édouard Fritch : Merci, Monsieur le président. Monsieur le Président de la Polynésie, Mesdames et Messieurs les ministres, chers collègues. Nous nous réjouissons, comme je l’ai dit en commission, aujourd’hui ce projet de contrat de développement et de transformation, car il concrétise effectivement la poursuite de notre partenariat, celui de la Polynésie française, avec l’État. Nous avions eu en effet quelques craintes en entendant récemment en commission des finances, dire que la majorité devait revenir aux fondamentaux, c’est-à-dire d’accéder à l’indépendance. Nous avions eu quelques craintes également au vu du défilé des responsables du Tavini en Azerbaïdjan, ce grand pays démocratique, pour aller dire que la France pillait nos richesses et enrôlait nos enfants pour les envoyer à la mort. Nous avions encore quelques craintes en entendant nos députés qui ont rayé les termes Polynésie française dans leurs discours à l’Assemblée nationale pour ne parler que de Māʹohi Nui (NDT, la Polynésie française). Heureusement, le Président de la Polynésie française est là ! Lui, il semble faire preuve de pragmatisme : l’argent de la France, on en a besoin ! Bien besoin. Nous avons quand même encore un doute sur la sincérité de la démarche puisque lors de la dernière commission des finances, le président Géros, Monsieur le président, n’a pas voulu expliquer pourquoi le Tavini se positionnait en faveur de ce contrat, renvoyant ses explications contradictoires à la commission de la décolonisation, dans laquelle nous ne siégeons pas puisque nous avons formé un recours devant le Conseil d’État pour son annulation. Tout cela n’est pas très transparent — vous en conviendrez — mais nous en avons pris l’habitude. Nous nous réjouissons également des orientations retenues dans ce nouveau contrat de développement et de transformation. La lecture des fiches sectorielles démontre finalement que vous reprenez à l’identique, avec parfois quelques ajustements à la marge — parce qu’il faut bien mettre son cachet quelque part —, les orientations de la précédente majorité qui ne faisait rien, ne travaillait pas ! Preuve que ce n’était pas si mal en fin de compte, Monsieur le Président, n’est-ce pas, ce que nous avons laissé ! Même quelque part que c’était bien ! Ainsi, dans le domaine de l’agriculture, vous vous appuyez sur le schéma directeur 2021-2030, établi par nos soins, avec cinq axes prioritaires déclinés en 300 actions. À ce niveau-là, rien de neuf à l’horizon. Nous sommes un peu plus étonnés pour le secteur de la pêche car la fiche sectorielle ne fait pas du tout état de vos ambitions, Monsieur le Président, exposées en août 2023 lors de la visite de Gérald Darmanin. Le Président, je vous le rappelle, avait affiché grand en parlant de tripler la flottille, c’est-à-dire ajouter 160 bateaux, pour ainsi tripler le nombre de captures. Or, vos orientations ne prévoient que le remplacement de cinq navires dans ce contrat par an pendant deux ans pour moderniser une flottille vieillissante. 10 navires qui viendront donc en remplacer 10 autres. On est bien loin, vous comprendrez bien, des 160 unités nouvelles. Par ailleurs, vous prévoyez de pêcher 18 000 tonnes de poissons contre 14 000 fin 2022. À ce rythme, nous sommes très loin de pouvoir remplir les objectifs et de tripler les captures. En matière de tourisme, il en va de même puisqu’à aucun moment n’est affichée l’ambition présidentielle d’atteindre un jour 600 000 touristes par an. Dans ce document que nous avons eu possession, vos ambitions restent les mêmes que celle de l’équipe qui vous a précédé — et qui ne faisait rien bien sûr, qui ne travaillait pas comme l’ont confirmé vos représentants ici à l’assemblée — mais s’inscrivent dans le cadre du Fāri'ira'a Manihini 2027. Vous reprenez même les chiffres de 2022 en affichant une progression de 280 000 touristes en 2027. Nombre, je vous le rappelle quand même, qu’on a déjà atteint aujourd’hui. On ne parle pas non plus des appels à manifestation d’intérêt qui vont attirer les hôtels de grand luxe que vous avez démarché à Singapour, en contradiction totale avec votre volonté de développer la petite hôtellerie ici en Polynésie. Je ne reprendrai pas les termes que vous avez utilisés ce matin à la radio parce que c’est un peu… c’est un peu limite, hein, c’était la case à Toto, ou je ne sais plus quoi la cage à Toto, c’est limite vraiment. C’est même manquer de respect pour les investisseurs qui veulent et qui croient en ce Pays. Autre surprise, dans la fiche sports, vous parlez encore de notre objectif de candidature à l’organisation Jeux du Pacifique 2027 alors que c’est aujourd’hui acquis. Nous ne voyons pas trace non plus du schéma directeur de la jeunesse 2025-2035 pour lequel votre ministre s’est lancée dans une vaste consultation dans tous les archipels, sans vouloir s’appuyer sur les travaux existants. Ça me rappelle un peu l’histoire de la tour, qu’on a remis en cause. Mais en fin de compte on a pris la même tour, on a allégé un peu de poids parce qu’on l’a fait maigrir. Mais à l’époque où vous avez contesté la tour, elle était déjà faite. Je rappelle quand même qu’elle était exposée à Taravao. Mais c’est bien de remettre en cause comme ça derrière et de venir confirmer, ça fait créateur, novateur… je veux bien. Mais enfin tout est à l’avenant, et nous avons la vague impression que vous avez procédé à un copié-collé des travaux engagés par notre gouvernement car il est vrai, je le disais, quelques ajustements à la marge ont été constatés. Mais nous cherchons vainement la mise en œuvre de vos politiques sectorielles. Donc oui, nous sommes satisfaits des termes de ce nouveau contrat de développement et de transformation puisque nous avons la vague impression de l’avoir écrit nous-mêmes. Par contre, nous gardons quelques interrogations sur le financement. Le secrétaire général du haut-commissariat nous a assuré — puisqu’il était lui-même présent, ce qui exceptionnel d’ailleurs parce que jamais l’État venait à nos commissions, jamais ! — ils étaient présents et nous ont rassurés que les financements de l’État ne seraient nullement remis en cause par les restrictions budgétaires annoncées au niveau national par le ministre des finances. Nous voulons bien le croire, nous voulons bien le croire, et nous savons que nos parlementaires seront attentifs au respect des engagements de l’État. Mais nous n’avons pas été convaincus par la démonstration faite selon laquelle il n’y aurait pas de diminution des crédits : en effet, pour nous, le contrat 2021-2023 portait sur un financement de 5,6 milliards par an, alors que celui-ci ne porte que sur 5,3 milliards par an. Pour nous, il y a donc un différentiel négatif, mais enfin… Par ailleurs, une interrogation subsiste sur la mise en œuvre effective du contrat. Certes, la convention prévoit qu’elle prend effet à la signature des parties — ce qui va se faire dans les jours à venir et nous l’espérons tous bien sûr d’ici la fin mai — mais en page 8 de cette même convention, on peut lire, je cite la convention : « Chaque année, avant le 30 mars, le Haut-commissaire de la République ici en Polynésie notifiera au Président de la Polynésie française les moyens budgétaires attendus au niveau du CDT 2024-2027, tant en autorisations d’engagement qu’en crédits de paiement pour l’exercice considéré ». En d’autres termes, on va passer ce délai lorsque vous aurez signé ce contrat. Alors faut-il en déduire, faut-il déduire de cette mention que 2024 sera considéré comme une année blanche puisque la date butoir est le 30 mars et qu’elle est déjà dépassée et qu’elle sera dépassée au moment de la signature, dans tous les cas pour l’exercice en cours. D’autant qu’il est stipulé qu’une convention annuelle doit établir chaque année le montant de l’engagement de l’État au titre de l’exercice considéré et la liste des opérations programmées. Je pense que vous pourrez nous éclairer à ce sujet. C’est une inquiétude, Monsieur le Président, ce n’est pas une critique naturellement, vous avez bien compris. Mais il serait inquiétant malgré tout que l’année 2024 soit une année blanche en matière d’investissement. D’autre part, il est étonnant que, au travers de cette délibération, nous prenions déjà acte des financements du projet de contrat de développement et de transformation pour les communes alors que nous n’avons pas aujourd’hui le document correspondant avec les actions à mettre en œuvre qui semble toujours être en discussion ou en cours de discussion aujourd’hui. En 2021, notre assemblée avait étudié de manière concomitante les deux contrats. Là aussi, c’est juste une demande d’explications, le pourquoi donc de ce contrat des communes non joint aujourd’hui qui ne nous apporte pas d’information. Enfin, nous avons été donc pour le moins surpris que le gouvernement de la Polynésie française ait accepté de cofinancer l’installation du radar de Météo-France, dont on ne sait même plus où il va s’installer. Il était prévu au départ au Mont Marau, il devrait maintenant être construit à Moorea, nous dit-on. Attention à ce qu’on ne se retrouve pas encore face à une contestation de la population — le radar, vous savez que ça émet des ondes et y en a qui craignent des ondes. Toujours est-il que lorsque j’avais rencontré il n’y a pas très longtemps — c’était en novembre 2020 — la nouvelle directrice de Météo-France, Madame Sophie Martinoni-Lapierre, nous avions bien évoqué ce projet de radar, mais à aucun moment cette personne nous a demandé de participer à son financement. Sinon qu’effectivement que nous devrions mettre à la disposition de la Météo sur le site du Mont Marau ainsi que les accès si cela était nécessaire. Mais le financement, il n’en était pas question. Le secrétaire général du haut-commissariat nous a expliqué que l’État n’avait pas forcé la main du Pays pour ce financement, mais que si le Pays n’y participait pas, le projet serait repoussé, prendrait encore un peu de retard. C’est ce qu’on nous a dit en commission. On parle de 93 milliards — on n’est pas sur des chiffres du ministère de l’éducation à plusieurs milliards pour nos enfants de Moorea, on parle de 93 milliards ! … Pardon, millions. J’étais un peu étonné que 5 ou 6 milliards pour les enfants de Moorea créaient une perturbation des ondes chez vous. Mais quand même, même 93 millions pour contribuer à la construction d’un…, c’est une compétence d’État, vous le savez très bien ; et vous savez aussi que le titre de notre contrat de développement, c’est celui qui doit répondre aux besoins du Pays. Mais enfin voilà, on parle de 93 millions que l’État aurait du mal à trouver pour financer ce projet. Je veux bien que les données météo soient utiles à la Polynésie — et ça, c’est vrai bien sûr —, mais il s’agit quand même d’un établissement public de l’État au service d’une compétence de l’État concernant la sécurité des populations. Vous m’aviez fait le reproche il fut quelques temps, ici même à l’assemblée d’ailleurs, de venir financer quelques brides de compétence de l’État. Mis à part ces bémols, tout va bien, ça va, il n’y a pas de problème, on va voter pour. Nous allons voter en faveur de cette contractualisation qui confirme bien que l’État est toujours bien présent aux côtés des Polynésiens. C’est ce qui nous réjouit. Merci, Monsieur le président. Merci pour votre attention. Le président : Merci bien. J’invite l’intervenant des non-inscrits à prendre la parole. M. Nuihau Laurey : Merci, Monsieur le président. Monsieur le Président, Madame la vice-présidente, Mesdames et Messieurs les membres du gouvernement, mes chers collègues et l’ensemble du public présents et qui nous suit à distance, bonjour. Je ne vais pas revenir sur la présentation qui a été faite de cette convention sauf à rappeler qu’elle s’inscrit finalement dans la lignée de tous les partenariats financiers qui ont été établis entre le Pays et l’État depuis des années. On cite dans le rapport de présentation les premiers contrats de développement de 1994 auxquels ont succédé les contrats de projets — celui de 2008 et de 2015 — et maintenant les contrats de développement et de transformation. J’ai souhaité par contre lors de la commission avoir des informations sur la réalité effective de ces contrats et s’ils ont produit surtout les résultats qui étaient escomptés. Et donc je tiens à remercier les équipes techniques du ministère de l’économie qui ont fourni effectivement les données que j’avais sollicitées et détaillées selon le contrat de projet et le dernier contrat de développement et de transformation. Et les chiffres corroborent effectivement les échanges qu’on a eu en commission, à savoir que sur le premier contrat de projet de 2008-2014, il était affiché un montant total à financer de 47,6 milliards (dont la moitié pour l’État 23,8 milliards). Et sur ces 23,8 milliards qui étaient prévus à la signature de ce contrat, seulement 7,8 ont été effectivement décaissés. Ce qui indique un taux de réalisation et de versement extrêmement faible (32 %). A contrario, cela veut dire que 70 % des sommes qui avaient été initialement inscrites (70 % des 47 milliards) n’ont pas fait l’objet d’une exécution et d’un décaissement par l’État, c’est gigantesque. Le deuxième contrat de projet a pris en compte les problématiques qui étaient nées de la mise en œuvre de ce premier contrat de projet et là, le montant total décaissé par l’État sur cette période a été de 10,5 milliards, soit un taux d’exécution de 63 %. C’est mieux, mais ça reste quand même faible puisqu’il y a quasiment 30 % des sommes qui étaient prévus au départ qui n’ont pas été versés à la collectivité. Et enfin, le dernier contrat de développement et de transformation montre un taux d’exécution de 53 %, c’est-à-dire la moitié, et je pense que cela doit nous amener à avoir une vraie réflexion de fond sur cet instrument : est-ce le bon, est-il véritablement efficace, et comment peut-on le transformer — c’est le cas de le dire — pour qu’il soit plus efficient en termes de versement de subventions par l’État ? J’ai à plusieurs reprises, à l’époque en tant que parlementaire, effectué des contrôles budgétaires dans différentes collectivités et cette problématique finalement on la retrouve dans quasiment tous les dispositifs financiers de l’État. Et je pense — et c’est pour ça que j’avais sollicité cette information pendant la commission — qu’il y a une vraie réflexion à mener sur la nature des projets que l’on doit inscrire dans ces contrats. Si je me souviens, on avait fait un déplacement dans une des collectivités d’Outre-mer qui montrait les mêmes problématiques de décaissement de l’État et le choix avait été fait par cette collectivité finalement de s’appuyer plutôt sur des projets — comment dire ? — où la capacité à être réalisée était beaucoup plus facilement atteignable plutôt que de mettre en avant des projets distributifs, innovants juste pour cette simple finalité d’exécution et de paiement par l’État des sommes qui étaient prévues au départ. Ce qui permet d’améliorer sensiblement la réalisation et le décaissement par l’État, et donc pour la collectivité de se trouver en situation positif. Le deuxième point que j’ai souhaité aussi évoquer en commission, c’est un des éléments auxquels est fait référence dans cette convention, c’est la loi d’égalité réelle des outre-mer qui a été, finalement, la dernière action à l’égard des outre-mer prise par l’ancien président François Hollande. Je trouve qu’il y avait dans cette loi quelque chose d’assez innovant et qui avait fait l’objet d’une approbation par tous les parlementaires ultramarins dans la définition d’une notion de convergence. Et je trouvais que cette disposition était très intéressante puisqu’elle prenait en compte finalement dans l’analyse qui était faite de toutes les collectivités d’un écart de développement vis-à-vis de la métropole et aussi d’un écart de développement entre les différentes outre-mer. Si je prends un seul exemple, le PIB par habitant de Mayotte est 80 % inférieur à celui de la métropole, et on a des situations d’écart similaire pour tous les territoires. Et ce qui avait été — comment dirais-je ? — la pierre angulaire de cette loi d’égalité réelle des outre-mer, c’est la capacité pour l’État, non pas d’accompagner en fonction de ratios habitants et autres, mais de pouvoir donner davantage à ceux dont l’écart de développement a été le plus accentué. C’est finalement une forme de discrimination positive dans l’attribution des versements de l’État. Le texte, la convention fait référence à cette loi d’égalité réelle mais, par contre, on est revenu finalement au système budgétaire dans lequel on choisit un certain nombre de projets et les versements sont effectivement décaissés. Je trouve que ce dispositif d’égalité réelle des outre-mer qui figure dans le document reste quelque chose d’intéressant si l’objectif recherché, c’est de réduire les écarts de développement entre les différents territoires d’outre-mer et la métropole, et si cela n’est pas uniquement de l’affichage en termes de capacité pour l’État à décaisser sur des périodes longues. Et comme je le disais, lorsque l’on voit le niveau réel de décaissement — 32 % quand même pour le premier contrat de projet, soit 70 % qui n’a pas été effectivement réglé —, je pense qu’il y a une vraie réflexion à avoir sur ces dispositifs. Et je trouve que l’analyse que l’on doit mener aussi sur la réalité des interventions de l’État dans chaque outre-mer est très important. C’est pour cela que, dans cette commission, j’avais posé la question aux représentants de l’État, au secrétaire général qui était présent, qui mettait en évidence le fait que la Polynésie était le premier finalement territoire à avoir signé, si on met de côté la Calédonie. Alors la Calédonie a effectivement signé, sauf que le montant pour la même période est de 34 milliards F CFP soit une intervention de l’État beaucoup plus importante. La réponse du représentant de l’État a été de dire que lorsque l’on regarde l’ensemble des interventions financières de l’État, on est sur une même tendance, à peu près 190 milliards F CFP d’intervention pour l’année. Et la réflexion que je me faisais sur cela, c’était quand même que, dans l’ensemble de ces interventions de l’État, figuraient notamment la dette du nucléaire pour 18 milliards F CFP qui pouvait difficilement être considérée comme un élément qui rentre en compte dans l’ensemble de ces partenariats. C’est pour cela que nous, nous l’avons dit en commission, nous allons voter en faveur de ce dispositif puisque, comme le disait mon collègue, il n’y a jamais trop d’argent pour financer des investissements qui vont servir à la collectivité. Mais je pense qu’après quasiment 20 ans d’exercice de ces partenariats, il est peut-être temps aussi objectivement de regarder la réalité de ce qui est effectivement versé, parce que les écarts sont quand même très importants, d’avoir une réflexion sur le choix des investissements à réaliser pour privilégier ceux qui ont le plus la capacité à être réalisés dans le laps de temps qui nous est donné, et enfin peut-être la possibilité de revenir à ces critères de convergence qui ont été quand même l’élément central de cette loi d’égalité réelle des outre-mer qui, comme je l’ai indiqué aussi, était quand même un premier changement majeur dans l’approche de la relation financière entre l’État et les différentes collectivités. Voilà les observations que je souhaitais formuler concernant ce dispositif auquel nous souscrivons et nous voterons bien évidemment favorable à ce projet. Le président : Bien. Merci. J’invite l’intervenant du Tavini huiraatira à prendre la parole. M. Steve Chailloux : Merci bien, Monsieur le président. Monsieur le président de l’assemblée, Monsieur le Président du gouvernement polynésien, les membres du gouvernement polynésien, nos législateurs du pays, les élus du peuple, à tous ceux qui nous observent, à toutes et à tous, mes salutations pour cette rencontre dans les grâces de Dieu. Notre assemblée est saisie pour l’examen d’un projet de délibération relatif à un projet de Contrat de développement et de transformation 2024-2027 relatif au financement de projets relevant de la compétence de Māʹohi Nui (NDT, la Polynésie française). Je ne reviendrai pas sur les détails — oui, il n’y a pas qu’à l’assemblée nationale que nous utilisons ce vocable, ici également nous l’utilisons et nous l’utiliserons encore et encore. Je ne reviendrai pas sur les détails du Contrat de développement, nous en avons déjà discuté en commission. Par contre, je dois dire tout de même qu’il me parait bien léger quand on le compare à celui de la Kanaky. Bien évidemment, comparaison n’est pas raison ; mais tout de même ! Comme Monsieur le rapporteur vient de l’exposer en préambule, le Contrat de développement qui est porté à notre regard aujourd’hui représente 21,3 milliards F CFP divisé sur quatre ans et financé à parité égale par l’État et le Pays ; cependant, sur la même période, la Kanaky se verra attribuer 34, 39 milliards F CFP avec un taux de participation financière de la part de l’État amplement plus avantageux que celui qui nous est proposé ici puisque ce n’est pas 50 %, mais bien près de 70 % de dépenses de financement que l’État s’est engagé à prendre en charge. Alors je m’interroge sur ce qui justifie un tel écart, car les situations démographiques de nos deux territoires sont quasiment identiques, la Polynésie serait d’ailleurs légèrement plus peuplée que la Kanaky. De plus avec nos 5 millions de km² nous sommes indéniablement la collectivité qui détient la plus grande superficie de tout l’outre-mer, c’est autant de territoire à administrer et à développer. Par ailleurs, je ne sais pas si l’État feint l’amnésie ou si les Jeux Olympiques de Paris lui fait perdre la tête, mais il y a eu 193 tirs nucléaires dans ce pays. C’est toute une nation, tout un peuple que l’État français a mené sur l’hôtel du sacrifice, pour se tailler une place au sein du club très fermé des puissances nucléaires. Aujourd’hui si elle peut se targuer d’être le deuxième producteur mondial d’électricité nucléaire, c’est grâce au sacrifice de Māʹohi Nui (NDT, la Polynésie française) ; si elle fait 3 000 milliards F CFP d’économie de charbon et de gaz tous les ans, c’est grâce au sacrifice de Māʹohi Nui ; si le secteur de l’énergie nucléaire civile lui assure une souveraineté énergétique à hauteur de 77 %, c’est grâce au sacrifice de Mā'ohi Nui. Aussi, nous ne le rappellerons jamais assez : la France a une dette immense envers ce pays, une dette légitime, mais honteusement insuffisante et toujours insuffisante. De plus, cette dette ne devrait jamais servir de prétexte pour se décharger ou alléger le financement des contrats de développement, c’est en tout cas le sentiment qui m’anime au vu de cette situation pour le moins un peu regrettable. Maintenant à la question de savoir si le fait de contractualiser avec l’État est une pratique anti-indépendantiste comme on a pu l’entendre ici et là dans les couloirs de notre institution, je rappelle à certains que, jusqu’à preuve du contraire, la Polynésie est toujours un territoire français, que les conventions État-Pays existent depuis le début des années 2000 et qu’ils font l’objet de renégociations systématiques une fois arrivées à leur terme par tous les gouvernements successifs, indépendantistes ou autonomistes dans cet esprit de responsabilité. Deuxièmement — comment dire ? —, le Tavini huiraatira, contrairement à la propagande ambiante, n’est pas une secte ou un mouvement sectaire. La caricature de l’indépendantiste dangereux, reclus, raciste, xénophobe, mangeur de bébé blanc, n’a jamais été qu’une chimère ubuesque de la mythologie de nos opposants politiques. Le projet que nous portons depuis des années, c’est celui d’une Nation polynésienne souveraine inclusive et ouverte sur le monde, et ouverte à la France en tant que partenaire historique d’État souverain à État souverain. Voilà quel a été toujours notre objectif. (Applaudissements dans la salle.) Et à ce sujet, je citerai Jean-Marie Tjibaou qui, dans sa clairvoyance, nous rappelait et nous rappelle encore aujourd’hui que « la souveraineté c’est le droit de choisir ses partenaires ». Pour un pays comme le nôtre, l’indépendance c’est bien de calculer les interdépendances. » La voilà la réalité de nos États modernes. Nos sociétés humaines vivent à l’ère de la mondialisation, de la division internationale du travail, des flux d’échanges et de mobilités intensifiées, jamais auparavant dans l’histoire de ce monde l’humanité n’a développé autant de liens d’interdépendance. C’est pour toutes ces raisons ou malgré elles que je vous invite, chers collègues, à voter en faveur de ce projet de délibération afin d’assurer la continuité des conventions établies dans le contexte d’une Polynésie toujours française dans le gouvernement de Māʹohi Nui (NDT, la Polynésie française), dans un esprit de responsabilité, travaille et travaillera avec l’État sans pour autant se fourvoyer, ni dévoyer sa ligne politique historique, la réaccession de Mā'ohi Nui à sa pleine et entière souveraineté enfin retrouvée. Merci bien de votre attention. Mes salutations ! (Applaudissements dans la salle.) Le président : Merci bien. La discussion générale est maintenant close. J’invite le gouvernement à répondre aux interventions des différents orateurs. M. Moetai Brotherson : Merci bien. Je tiens à remercier notre ancien sénateur Nuihau Laurey pour ses remarques pertinentes, notamment autour de l’articulation qui n’est aujourd’hui pas vraiment réalisée autour de la loi EROM. C’est effectivement une réflexion qu’il va falloir que l’on ait tous ensemble pour les prochains contrats et conventions que l’on va passer avec l’État. Sur l’intervention de mon prédécesseur, on va mettre cela, peut-être certains des éléments, sur le compte d’une défaillance de la mémoire. Alors vous vous inquiétez que le calendrier d’adoption de ce texte mettrait en danger, finalement, la mise en œuvre de ce contrat. Non, pas du tout ! Contrairement à 2021, sous votre gouvernance où effectivement on a eu droit à une année blanche, 2024 ne sera pas une année blanche pour ce qui est du Contrat de développement et de transition. Ensuite — et cela fait d’ailleurs l’objet d’un amendement qui sera déposé tout à l’heure —, vous êtes pris d’un émoi absolument fantastique autour du cofinancement d’un radar avec Météo France et l’État. Peut-être rappeler ici que ce qui nous anime, c’est la sécurité de nos concitoyens. Peut-être rappeler ici tous les évènements climatiques que nous avons subis depuis un an, dès le lendemain de notre élection d’ailleurs ou la veille, qui ont coûté au bas mot, et rien que pour les indemnisations des personnes qui ont été touchées, plus de 900 millions F CFP. Rappeler que cet élément fondamental qu’est la sécurité des Polynésiens c’est, je crois, de notre responsabilité aussi, même s’il s’agit d’une compétence de l’État et que le matériel qui est évoqué ici sera propriété de Météo France. Là où je m’étonne et je vais à nouveau mettre cela sur le compte d’une défaillance temporaire de la mémoire, c’est que vous vous émouvez pour 93 milliards… euh pardon, 93 millions F CFP, alors que c’est bien sous votre gouvernance que 309 millions F CFP ont été dédiés au Pôle de recherche de l’Université de Polynésie française, compétence de l’État, patrimoine de l’État. Donc voilà, on va mettre cela sur le compte d’une amnésie passagère. Et puis enfin — et puis ensuite je passerai peut-être la parole à notre ministre de l’économie et des finances —, il va vraiment falloir que vous vous habituiez à ce que les Indépendantistes arrivent à travailler mieux avec l’État que vous. (Applaudissements dans la salle.) Cela veut dire peut-être que l’État, même s’il n’ignore pas que de ce côté de l’hémicycle et de ce côté du pupitre, il n’y a que des indépendantistes, ce sont des personnes intelligentes, ce sont des personnes posées avec lesquelles on peut travailler. Voilà, il va falloir vraiment vous habituer à cela, sinon vous allez ruiner votre karma. Et puis enfin, juste pour finir quand même sur un sourire, je suis vraiment admiratif que vous soyez devenus fans à ce point du programme du Tavini huiraatira, que vous soyez quasiment capable de le réciter par cœur dans tous ses chapitres : triplement de la capacité de pêche, nouveaux objectifs touristiques. Vous oubliez juste de dire que ces projections, elles sont à l’horizon 10 ans, pas l’an prochain. Ah ben oui ! Mais oui ! Mais oui ! Voilà, donc il faudra à un moment donné, arrêter d’essayer de tromper l’opinion publique en disant « il a dit qu’il allait tripler la capacité de pêche en 2025 ; il a dit que l’on passerait à 600 000 touristes en 2025 ». Non ! Donc, vous avez peut-être oublié de lire quelques pages de notre programme. Voilà, pour le reste, je laisserai notre ministre de l’économie et des finances vous répondre. (Applaudissements dans la salle.) M. Tevaiti-Ariipaea Pomare : Merci. Juste rapidement pour rappeler effectivement qu’il n’y aura pas d’année blanche cette année, que le CDT communes ne fait pas l’objet des discussions d’aujourd’hui. Je remercie Nuihau pour ses observations. Je voulais juste rappeler que le premier Contrat de développement du pays 2008-2014 intégrait aussi des mesures, des investissements relatifs aux communes et l’état des versements que je lui ai transmis ne prenait pas en compte en fait les projets des communes. Voilà. Ensuite, je veux mettre l’accent sur le fait que les projets effectivement se réalisent. On voit sur le premier Contrat de développement, celui de 2008, sur plus de 10 années, alors effectivement il faudrait que l’on choisisse des projets peut-être à réaliser plus rapidement pour que l’on puisse avoir un niveau de liquidation plus importante et qu’il est prévu dans le contrat, dans la convention que les 20 % restant du financement ne sont décaissés qu’au moment où les travaux sont réalisés. Donc, si on prend du temps à réaliser nos travaux, qu’on ne les fait pas dans les trois ans plutôt que 10 ans, effectivement cela ne contribue pas à avoir un taux de liquidation meilleure. Effectivement, ce dispositif est perfectible donc nous nous rapprocherons, nous essayerons de travailler avec l’État pour converger vers un dispositif meilleur. Merci beaucoup. Le président : Merci. Je vous propose de passer à l’examen de la délibération. Article 1er Le président : Article 1er, nous avons reçu un amendement. Je vais demander à l’auteur de cet amendement de bien vouloir nous le présenter. Mme Tepuaraurii Teriitahi : Merci, Monsieur le président. Alors déjà, je voudrais rebondir sur ce que notre Président vient de dire. Effectivement, on a bien remarqué que vous étiez les meilleurs amis de l’État, en tous cas meilleurs que nous. On a vu que l’État avait une belle préférence pour vous. On n’est pas jaloux, il n’y a pas de souci. Et puis, par contre, dire qu’effectivement le côté intelligent et posé, c’est de ce côté-là ; donc cela veut dire que nous, on est bête et pas posé. Enfin bon, je pense que là aussi, vous n’avez pas le monopole de l’intelligence et d’être posé parce que je pense que dans ce pays, tout le monde est intelligent quelque part et posé quelque part, mais enfin, bon voilà ! Alors peut-être certains sont moins manipulateurs que d’autres effectivement, mais bon, voilà ! Donc, je vais aller sur mon amendement. Donc cet amendement est un amendement à l’article 1er du projet de délibération. L’article 1er que je propose c’est que « Le projet de contrat de développement et de transformation 2024-2027 relatif au financement de projets relevant des compétences de la Polynésie française, joint en annexe, est approuvé sous réserve de supprimer la deuxième phrase de l’article 3 relatif aux bénéficiaires du CDT Pays (2024-2027). » Comme j’imagine que chacun d’entre nous a lu l’article 3 et a vu effectivement que la deuxième partie de l’article 3 posait l’exception puisqu’il est indiqué dans cet alinéa que, exceptionnellement, le Pays entre dans le financement d’un radar pour Météo France. Donc je vais vous donner lecture de l’exposé sommaire et vous expliquer au fur et à mesure ce qui m’a animé pour déposer cet amendement. Donc comme son intitulé l’indique, le présent projet de contrat de développement et de transformation 2024-2027 sur lequel il est demandé à notre assemblée de se prononcer, porte sur le financement de projets relevant de la compétence de la Polynésie Française. Je n’ai fait que reprendre le titre qui nous a été proposé, donc c’est déjà la première chose qui m’a étonné lorsque j’ai vu que l’on a rajouté une compétence qui n’était pas la nôtre. Alors Monsieur le Président l’a très bien indiqué et nous ne sommes pas amnésiques, au contraire, on a une très bonne mémoire. Quelqu’un m’a dit un jour que pour perdurer en politique, il fallait justement avoir une très, très bonne mémoire. Il ne nous a pas échappé, tous les contrats que l’on a pu faire avec la France, que l’on a accepté de cofinancer effectivement ; à la différence — et là je m’appuie sur l’intervention de notre député, Monsieur Chailloux, qui nous a rappelé à l’instant ce que la France nous doit —, c’est le Tavini qui réclame à chaque fois ce que la France nous doit et nous a énuméré tout ce que la Polynésie a fait pour la France, et que la France nous doit. Combien de fois vous avez aussi dit que la France nous devait pour le nucléaire 100 milliards F CFP. Et là, c’est ce qui m’a étonné, c’est que pour 93 millions F CFP, là vous ne réclamez pas à la France, là vous dites « O.K. bon, 93 millions F CFP on peut céder. » Alors quand on a la prétention de réclamer 100 milliards F CFP et tout ce que la France nous doit en faisant une litanie et que l’on arrive à courber devant 93 millions F CFP… Pour nous c’est normal, nous sommes les autonomistes ! On a toujours prôné le travail avec la France. C’est normal que l’on accepte de cofinancer, et cela a toujours été le discours du Président Édouard Fritch, à chaque fois, il disait justement que c’était le début, presque, d’une forme d’indépendance en disant que « là où on peut payer, on paye ! » C’était comme le Centre de mémoire. La France ne veut pas payer, O.K. on ne va pas aller quémander, on va payer. Aujourd’hui — et c’est ce qui m’a fait réagir —, pour 93 millions F CFP « bon pas de souci, O.K., O.K. bon, on ne va pas discuter. » Surtout quand j’entends le secrétaire général nous dire que si l’on n’accepte pas finalement de donner les 93 millions F CFP en cofinancement « ah, cela prendra deux ans de plus. » Je me souviens, Monsieur le Président, quand vous étiez dans cet hémicycle une fois, vous aviez donné le budget des cacas chiens de la mairie de Paris. Je vous ai écouté, et là aussi, je ne suis pas amnésique. Vous aviez évalué cela, je crois cacas chiens c’était au moins 1 million d’euros. Peut-être alors je n’ai pas bien retenu, mais je crois que c’était même un peu plus que 1 million d’euros. Voilà. Là, on n’est même pas à un million d’euros, et sous prétexte que si jamais, nous, on ne paye pas notre part de 93 millions F CFP, eh bien il faudra deux ans de plus pour réaliser ce radar. Et je ne reviens pas sur l’opportunité, on ne discute pas de l’opportunité de ce radar. Bien sûr qu’il est utile, bien sûr qu’il va servir à notre population, mais c’est le principe. Et que vous acceptiez finalement de lâcher 93 millions F CFP… Et j’ai posé la question au secrétaire général « et si le gouvernement avait dit non, auriez-vous refusé alors de contractualiser ? » Il m’a dit « oh non, pas du tout ! » Eh bien, voilà ! Pourquoi on ne dit pas non alors ? Puisque l’on a la réponse, ils vont nous donner quand même. Parce qu’au bout du bout, ce qui m’anime également dans mon amendement, c’est tout simplement aussi, on demande 93 millions F CFP à la Polynésie, mais on est en parité. Le rapporteur l’a bien expliqué, 93 millions F CFP, 93 millions F CFP, cela fait 186 millions F CFP. En fait, cela va priver les projets relevant de la compétence de la Polynésie de 186 millions F CFP. Alors j’ai vite été dans le bleu budgétaire, parce que c’est presqu’un de mes livres de chevet aussi. Moi, je n’ai pas le programme du Tavini en livre de chevet, mais j’ai le bleu budgétaire, voilà. Et dans le bleu budgétaire, j’ai cherché. Alors c’est pour cela que je vous ai donné l’exemple qui va parler à notre maire de Tautira, Tatatua qui devrait être un projet qui peut être éligible, « renforcement des berges », 150 millions F CFP. Avec ces 186 millions F CFP que l’on va lâcher sur le radar, eh bien, cela permettrait de payer complètement les 150 millions F CFP de Tatatua. Voilà ce que cela représente. Et je n’ai pas été… parce qu’après j’ai voulu faire la litanie de tout ce que l’on pouvait financer dans les îles et tout, il y a plein, plein de choses que l’on pouvait mettre, et c’est cela qui m’a fait réagir. Donc très honnêtement je n’ai pas beaucoup d’espoir pour mon amendement parce que j’imagine que, comme vous avez déjà lâché auprès de la France, vous n’allez pas revenir dessus. Voilà, vous avez plié pour 93 millions F CFP. Mais je voulais quand même expliquer ce qui m’anime, et m’étonner publiquement de ce positionnement et être fier du nôtre, à notre époque quand on contractualisait. Mais je le rappelle, nous, nous sommes les autonomistes qui avons toujours assumé de travailler avec la France. Merci. Le président : Merci. Y a-t-il des interventions sur ce… Monsieur le Président. M. Moetai Brotherson : Alors, si avec ces sommes on aurait pu effectivement enrocher Tatatua avec 600 millions F CFP, ce que vous avez lâché pour l’UPF et pour le centre de recherche, je crois que l’on aurait pu enrocher jusqu’à Pueu, non ? Au moins, au moins. Non, à un moment donné, il faut arrêter la démagogie. Il faut arrêter la démagogie. Ce n’est pas parce que l’on est indépendantiste que l’on ne travaille avec l’État. Ce n’est pas parce que l’on est indépendantiste que l’on ne sait pas travailler avec l’État. Donc, encore une fois, je vous appelle à la responsabilité. Il s’agit d’un équipement qui va dans le sens d’une meilleure sécurité de nos populations. Je crois que là, c’est une question de responsabilité. Voilà. Ensuite, votre amendement il pose aussi un problème de forme parce que, sans être un spécialiste du droit constitutionnel, il me semble tout de même qu’il y a les articles 168 et 169 de la loi organique qui sont un peu mis à mal avec votre amendement puisqu’ils viennent modifier la convention elle-même, convention qui n’est pas, dans sa discussion et dans son établissement, une prérogative de l’assemblée. Donc votre amendement me semble irrecevable sur la forme, et sur le fond encore une fois, il s’agit d’une question de responsabilité. Et puis je vous appelle à la raison, quand vous avez lâché pour 600 millions F CFP, venir nous faire la leçon pour ce radar, je trouve cela un peu déplacé. Le président : Voilà, merci. Je pense que plus personne ne veut prendre la parole. Monsieur le ministre. M. Tevaiti-Ariipaea Pomare : Merci. Le choix du financement du radar météo résulte d’un accord commun du Pays et de l’État. Nous avons décidé de travailler en bonne intelligence, de surfer sur des ondes positives pour plus d’efficience et dans l’intérêt de la population. Ce radar permettra de répondre aux besoins aéronautiques règlementaires, au suivi de la ressource en eau, mais surtout d’assurer la sécurité des personnes, des biens et des infrastructures à enjeux. La période cyclonique et les récentes intempéries nous rappelle l’urgence de nous doter de moyens technologiques précis pour nous prévenir d’éventuels dangers pour la population. Il en va de la vie et de la sécurité de nos familles. Nous avons tous le souvenir malheureux de la disparition, il y a quelques semaines, d’une jeune polynésienne emportée par la rivière de la Punaruu. C’est inadmissible ! Le Pays a donc décidé de mettre, dès à présent, les moyens qu’il faut pour préserver et sauver nos enfants, leur vie n’a pas de prix. Je vous rappelle aussi que le Pays cofinance avec l’État depuis plusieurs années des projets qui ne relèvent pas de sa compétence. Je pense par exemple au projet évoqué par notre Président, celui de la construction d’un centre de recherche à l’Université pour nos étudiants à hauteur de 900 millions F CFP pour lequel le pays a financé 335 millions F CFP, soit près de trois fois plus que le financement du radar météo qui s’élève à 93 millions F CFP. Pourquoi ne pourrions-nous pas cofinancer des projets d’intérêts généraux comme vous l’avez fait auparavant ? Auriez-vous des droits supérieurs aux nôtres ? Je vous rappelle aussi que ce texte a été voté à l’unanimité en commission des finances, vote auquel vous avez participé. Pourquoi donc ce retournement ? Pourquoi cet amendement aujourd’hui ? Cela me rappelle aussi que, paniquée, vous étiez la première, Madame la représentante, à dire dans les médias qu’il suffisait d’appliquer une rétroactivité à la loi fiscale pour qu’elle n’ait pas d’impact sur la population. Je tiens aussi à préciser que vous avez déposé avant la séance plénière du 11 avril trois amendements au titre de la rétroactivité de la loi fiscale, amendements que vous avez ensuite retirés en séance. Ces pratiques, que je ne partage pas, pourraient être qualifiées de politique politicienne. Ce n’est pas ce qu’attend la population. La population veut de la stabilité pour que nous puissions construire ensemble notre pays pour les générations futures. Merci bien. (Applaudissements dans la salle.) Le président : Merci bien, Monsieur le ministre. Je mets aux voix le… Pardon ! Oui, Pascale. Mme Pascale Haiti : Merci, Monsieur le président de l’assemblée. Monsieur le Président de la Polynésie, Mesdames et Messieurs les ministres, chers collègues, bonjour. Je trouve dommage que vous ne retenez pas l’amendement de notre collègue Tepuaraurii. Cela est le premier pas de l’État : faire financer les services publics de l’État. C’est une porte… Vous laissez la porte ouverte et, prochain Contrat de développement avec eux, ce sera d’autres services de l’État, et je trouve dommage que vous avez ouvert la brèche. C’est ma première question. Alors je sortirai… Je serai un peu hors sujet, mais j’interpelle le Président de la Polynésie française. Ma question est : êtes-vous à la hauteur de la mission qui vous a été confiée ? Je m’explique. (Réactions dans la salle.) Je m’explique. Nous rencontrons actuellement de gros problèmes : social, santé… Que fait votre gouvernement ? Avez-vous des solutions rapides pour ce secteur ? Les familles nombreuses crient à l’agonie, les familles deviennent de plus en plus pauvres. Vous aviez dit que vous avez donné 9 milliards de pouvoir d’achat à cette population. Retournez-vous sur le terrain pour les voir ? Je n’ai pas besoin de votre réponse aujourd’hui. Je vous interpelle parce que lors d’une veillée mortuaire à Faa’a, nous avons été interpellés par le père Abraham, je vous informe. La santé est un gros problème, qu’attendez-vous ? Le social est un gros problème, qu’attendez-vous ? Aujourd’hui, nous avons une séance plénière. C’est la seule séance où l’on peut s’exprimer et je trouve le moyen aujourd’hui de le dire, de le faire savoir : que faites-vous ? Vous êtes intelligent, hyper diplômé, soi-disant posé, mais aucune humilité de votre part (Réactions sur les bancs du groupe Tavini huiraatira.) et je trouve cela vraiment dommage. Sinon vous aurez réglé le problème de l’hôpital : ouvrez les postes, donnez l’opportunité à la directrice de l’hôpital ! Qu’attendez-vous ? Les médecins partent, les malades vont mourir… Est-ce cela que vous voulez ? Allez, allez faire du terrain ! Nous avons été sensibilisés lors de notre visite à l’hôpital, certains n’ont pas vraiment bien tendu l’oreille. Mais aujourd’hui, la situation est devenue de plus en plus grave. Je ne sais pas si vous êtes conscient de ce qui se passe dans votre pays. Arrêtez de vous promener, arrêtez d’envoyer des messages sur Facebook, c’est agaçant ! « Oh, c’est beau là-bas ! Oh, y a une jolie statue ! » Travaillez pour votre pays !... C’est tout ce que l’on vous demande. Je vous remercie. (Applaudissements sur quelques bancs du public.) Le président : Merci. Madame la sénatrice. Mme Lana Tetuanui : Merci, président. J’ai envie d’abord de dire au ministre des finances que même en étant qu’élue, en n’étant pas membre de la commission des finances, le droit parlementaire de déposer des amendements, c’est inscrit dans le règlement intérieur. Que cela vous agace, que cela vous plaise ou pas du tout, nous avons le droit ne serait-ce sur un point qui soit dit. J’avais presqu’envie d’applaudir mon collègue député, orateur du groupe Tavini huiraatira, applaudir dans le sens que je suis rassurée, je suis rassurée quand même qu’aujourd’hui, vous le dites publiquement : l’État, la Polynésie française et tout le reste. Je suis contente, merci. Merci aujourd’hui, en 2024, de confirmer quand même qu’il faut la nécessité de l’État, de travailler en bon partenariat avec la Polynésie française. Mais permettez-moi — parce que j’avais mon œil gauche, par respect, je le recherche toujours chaque fois quand j’arrive —, le président du Tavini huiraatira s’est levé et est parti. Je crois comprendre, savoir ce qui a pu lui passer par la tête. (Réactions sur quelques bancs du groupe Tavini huiraatira.) Parce que ce que vous dites aujourd’hui et ce que vous dites dans les quartiers, aucune cohérence ! Eh ! Vous revoyez vos live vous-mêmes que vous envoyez ? « Taioro » (NDT, insulte désignant une personne incirconcise, faisant référence à la préparation d’amande de coco râpée et fermentée) pour certains, « untel » pour certains, il n’y a pas plus mauvais que les Français ! Mais je suis rassurée aujourd’hui, Monsieur le Président, je suis rassurée, je suis rassurée. Tant mieux, tant mieux parce que, outre le fait en contrat de projet, Monsieur le Président, pensez aussi à nos communes, il y a aussi ce contrat de développement qui lie aussi l’État et les communes. N’oubliez pas non plus ces dernières. Enfin, j’ai posé la question : la loi de finances, n’avons-nous toujours pas obtenu de contrat de développement avec l’ONU ? Allez donc tendre la main de ce côté-là, avec tous ces voyages que vous avez fait aux États-Unis, si seulement vous pouviez en ramener ne serait-ce que 5 milliards. Pour en revenir sur l’amendement proprement dit, nous venons de finir une mission, là. À entendre nos échanges, quelle est l’idée générale ? « Et voilà encore ces Français qui viennent grappiller dans notre garde-manger — ce fameux refrain que nous aimons —, ces fourmis blanches qui viennent dans notre garde-manger », c’est ce que nous faisons. 89 millions, si l’on pouvait dédier cela à notre Pū o te Hau qui rencontre une vraie crise à Pirae, pour les femmes battues que je viens de recevoir, Madame la ministre. C’est grave ce qui est en train de se passer à Pirae. Non seulement ce sont des victimes des violences chez eux, elles sont aussi victimes de ce qui se passe dans notre Pū o te Hau. C’est une affaire que l’on mettra en parallèle, mais Madame la ministre, il faudra réagir. Quant aux belles paroles, le fait de toujours vouloir regarder dans le rétroviseur, Monsieur le Président de la Polynésie française, je pense qu’après presqu’un an de mandature — j’ai rencontré un grand et illustre personnage pas plus tard que la semaine dernière —, la supercherie, je crois que c’est fini, tout le monde sait maintenant : entre les belles paroles et les actions, ce ne sont pas les partisans du Tapura huiraatira ou ceux du Amuitahiraa qui le disent, ce sont les personnes mêmes qui vous ont élus qui parlent aujourd’hui et leurs propos prennent de l’ampleur. Il faut faire attention ! Nous, on n’aura pas besoin, nous faisons notre devoir, nous sommes dans l’opposition. Je suis une personne respectueuse, mais attention aux paroles qui sont dites. Cette mélodie qui était si harmonieuse, oh ! Il y a comme une fausse note dans la mélodie qui résonne dans nos communes et nos quartiers. Et de grâce aussi, nous pouvons avoir des joutes oratoires, chacun défend ses plates-bandes, c’est normal, c’est la politique. Nous ne sommes pas à la messe ici. Mais de grâce, il faut arrêter aussi de dénigrer les élus comme cela, cela ne vous grandit pas. Pour diriger la Polynésie, il ne faut pas avoir une tête avec plein de diplômes à l’intérieur. C’est le cœur que les Polynésiens demandent aujourd’hui. Merci. Le président : Voilà, merci bien. Nous en avons fini avec nos interventions… Steve. M. Steve Chailloux : Oui, merci, Monsieur le président. Je voudrais aussi réagir à l’intervention de notre collègue Pascale qui a été jusqu’à accuser le Président du Pays de manquer de respect, d’être une mauvaise personne. À l’entendre, cette personne n’aurait que des défauts. Je conçois que ce soit le Tavini huiraatira qui siège au gouvernement du pays aujourd’hui et je conçois que ce ne soit pas facile comme vous avez pu l’expérimenter quand vous étiez aux rennes du pays, mais je ne peux pas accepter que le Tavini huiraatira ou même le Président du Pays fassent l’objet d’un déversement de critiques par la minorité à cause de toutes les difficultés que traversent le peuple aujourd’hui. Car, pour rappel — je ne parle pas du Tapura ou du Tahoeraa, ou que sais-je encore —, les problèmes rencontrés actuellement par le peuple ne datent pas d’aujourd’hui, et ce n’est pas depuis que le Tavini huiraatira est au pouvoir que notre peuple est tombé, a sombré dans une situation problématique grave ! Cela fait déjà bien longtemps que notre peuple se plaint dans notre pays. Qui donc a instauré ce que l’on appelle en français l’assistanat dans notre pays C’est le souci que nous rencontrons dans notre pays dans tous les domaines. Il est vrai qu’aujourd’hui, vous êtes dans l’opposition et vous jouez évidemment votre rôle ; mais nous, nous sommes la majorité aujourd’hui, et nous allons également nous exprimer. Quant à la problématique de ce peuple, ce n’est ni un sujet du Tavini huiraatira, ni exclusivement un sujet du parti autonomiste, mais de l’ensemble des représentants politiques qui ont dirigé notre pays, qu’ils viennent de tel ou tel bord politique. (Applaudissements sur les bancs du groupe Tavini huiraatira.) C’est facile de se présenter dans cette assemblée qui est la nôtre pour proférer qu’untel est l’ennemi, qu’il est mauvais. Je n’accepte pas ces propos. En parlant de respect, respectez-nous tout autant. Nous n’avons jamais prononcé les mots — qu’ai-je entendu ? — « moa taioro (NDT, insulte désignant un sexe incirconcis, faisant référence à la préparation d’amande de coco râpée et fermentée) », était-ce bien cela ? Jamais une seule fois un membre de la majorité du Tavini huiraatira n’a employé ces termes abjects pour exprimer sa pensée ! Et nous osons encore parler de respect ? Vous avez été irrités par les propos du pasteur Tapati en rapport avec la couleur, cela vous a horripilé. Nous avons aussi le droit d’être agacés par les critiques blessantes que profère la minorité au sein de cette assemblée à l’encontre de la majorité ainsi qu’à l’encontre du Président du Pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe Tavini huiraatira et sur le banc du gouvernement.) Le président : Merci bien. Je mets aux voix l’amendement… Pardon ? Président. M. Moetai Brotherson : Oui, calmons-nous. Pascale, d’abord, ce n’est pas à toi de juger, c’est au peuple. Le peuple jugera en temps et en heure. Tu peux avoir ton opinion, tu peux la crier haut et fort, tu peux interpréter ce qui se passe, tu peux t’agiter dans ton coin, c’est ton droit. Mais il y a quand même des réalités chiffrées. Alors, d’entendre « qu’attendez-vous, que faites-vous, l’hôpital… au secours ! » L’hôpital aujourd’hui est dans la difficulté que l’on connaît tous, que je connais, tout le monde ici connaît, parce que pendant 10 ans, vous n’avez pas fait les 15,5 milliards de rénovation et de réparation nécessaires. Tu viens me le reprocher à moi ? Au BP 2024, si tu l’as lu — je pense que Tepuaraurii l’a bien lu mais toi, je ne sais pas —, nous avons créé 17 postes. Du jamais vu ! Et tu vas encore venir me dire que l’on ne fait rien ? Je pense qu’à un moment donné… On peut faire un effet de tribune parce qu’il y a la télé, c’est retransmis sur Internet et tout cela, on peut avoir ses 2 minutes de gloire là, mais derrière, il y a une réalité qui va tous vous rattraper, tous. Donc de grâce, il ne faut pas raconter n’importe quoi dans cet hémicycle. Pour ce qui est de notre illustre et honorable sénatrice — qui arrive, c’est bien, elle est venue là —, je crois que nous reprocher de dénigrer, etc., c’est un peu fort de café. J’ai un souvenir ému — alors qu’elle est en train de reprendre sa place — de notre collègue Nicole Sanquer qui avait été insultée par le Président du gouvernement à l’époque. Insultée ! Pas dénigrée, insultée, et ce n’était pas la seule, à plusieurs occasions. Si vous m’avez déjà entendu insulter l’un de vous, je demande le replay, d’accord ? Donc voilà, on va tous se calmer. Que l’opposition s’oppose, ce n’est pas une nouveauté, mais qu’on essaye de le faire sur des arguments… de vrais arguments, pas sur des « je suis allé à la messe de machin, ou à l’enterrement de truc, on m’a dit que ». Parce que moi aussi on me dit que quand tu vas à Tumaraa, tu racontes à tout le monde que tu es indépendantiste. Mais c’est ce que l’on raconte, je n’y crois pas parce que je sais que tu n’es pas indépendantiste. (Réaction inaudible de Mme Lana Tetuanui.) Voilà. Donc, si l’on s’engage dans ce genre de discussions, cela n’avance pas. Merci. (Applaudissements sur les bancs du groupe Tavini huiraatira et sur le banc du gouvernement.) Le président : Merci. Bon, nous continuons. Je mets aux voix l’amendement. Qui est pour ? 19 pour. Qui est contre ? 38 contre. Qui s’abstient ? Pas d’abstention. L’amendement est rejeté. Donc, je mets aux voix l’article 1er, à moins que vous voulez en débattre encore ? C’est fini, terminé ? Mme Lana Tetuanui : Explication de vote. Le président : Attends, on n’a pas encore voté. M. Édouard Fritch, hors micro : Si, si, l’amendement. Mme Lana Tetuanui : L’amendement. Le président : Donc l’article 1er non amendé, qui est pour ? 38. Unanimité. Très bien. Explication de vote pour l’article 1er, même si ce n’est pas dans le règlement intérieur. Mme Lana Tetuanui : Merci, Monsieur le président. Explication de vote et qui vaut aussi rappel au règlement. (Réactions sur quelques bancs du groupe Tavini huiraatira.) Monsieur le Président, il faut vous reconnaître l’art — mais l’art, il faut vous reconnaître cela —, l’art de jouer sur les mots, l’art peut-être de mentir, et puis l’art de vouloir détourner les propos. C’est vous qui êtes le Président de la Polynésie française, vous êtes le référent pour au moins 280 000 habitants qui habitent aussi bien des Îles-sous-le-vent jusqu’aux Gambier, pour revenir sur l’île de Tahiti. Les mots… j’ai dit « dénigrer », il y a quand même une nuance entre « insulter ». Ce n’est pas la même chose, ce n’est pas la même chose, ce n’est pas du tout la même chose. Je n’ai pas parlé d’insulter. Et arrêtez d’aller regarder ce qui se passe chez les autres, balayez devant votre porte. Parce que quand vous dites, Monsieur le Président, qu’à Tumaraa il se raconte que je suis indépendantiste, mais tout le monde est indépendantiste au fond de ses tripes, et je n’ai pas honte de le dire ! La seule différence qu’il y a entre nous et vous, c’est par opportunité que vous le faites : quand ça sent bon avec les Français, les Français sont bien ; et quand cela vous dérange, il n’y a pas plus mauvais que les Français ! Alors de grâce, Monsieur le Président, je vous ai entendu, que la paix règne parmi nous, que la sérénité revienne dans cette assemblée. Mais je le redis, il faut arrêter de dénigrer. En tout cas moi, ce n’est pas ma paroisse, le mien. J’ai envie de dire, je vais le dire en face à quelqu’un, dans l’hémicycle ou à l’extérieur. Mais je ne parle en mal de personne. Si j’ai quelque chose à dire, je vais et je le dis en face. Apprenons le respect. Je m’exprime en tahitien : en tant que Président, il vous faut, non pas de la matière grise, avec une grosse tête et des diplômes élevés, mais du cœur. Car notre peuple aujourd’hui est en détresse et donc il faut le reconnaître aussi. Je suis souvent en déplacement et tout le monde me le dit. Ce n’est pas une critique, je ne vous critique pas. Il y a un nouveau gouvernement aujourd’hui, un nouveau Président, le Tavini huiraatira constitue la majorité, je respecte. Mais pour en revenir à ma demande à Monsieur le ministre s’agissant des communes. Car sur cette, l’on ne trouve que des compétences qui relèvent du Pays de ce qui est inscrit sur cette page : les intitulés financés par ce contrat de développement, Monsieur le ministre, Monsieur le Président, sont des compétences du Pays. Et les communes ? Vous le savez, Monsieur le Président, ancien député, il y a les deadlines qui arrivent là dans le CGCT où on impose les communes à fournir de l’eau potable sur l’ensemble de ce territoire. On fait comment ? Voilà des questions légitimes que l’on pourrait peut-être débattre. Mais sinon, merci de soutenir ce contrat de développement. À l’heure quand même où le président, le ministre des finances surtout, métropolitain est en train de raboter, mais bien raboter dans les différents ministères, je compte quand même sur nos collègues députés, nous veillons, nous veillons à ce que les deniers dédiés à la Polynésie ne soient pas touchés par ce grand coup de rabot qui est en train de se faire au niveau du Parlement. Parce que même perdre 3 millions pour la Polynésie, ne serait-ce pour les petites communes, c’est beaucoup aussi. Cela, tu peux compter sur nous. Et même pour celle que tu as dit indépendantiste, dans le cœur et les tripes, oui. Et je crois même — et je vais fermer, je vais m’arrêter —, Monsieur le Président, Lana Tetuanui est finalement plus indépendantiste que tous ceux qui se disent indépendantistes (Réactions sur quelques bancs du groupe Tavini huiraatira.), ils ne le sont seulement d’après leurs dires, seulement sur le bout des lèvres. Ce n’est qu’un avis. Merci. Le président : Merci bien. Mme Tepuaraurii Teriitahi : Monsieur le président, Monsieur le président. Le président : Pardon ? Mme Tepuaraurii Teriitahi : Pardon. Sur l’amendement. Le président : Explication de vote ? Mme Tepuaraurii Teriitahi : Oui, puisque c’est mon amendement qui a été rejeté. Le président : Ah, pour le rejet de ton amendement. On ne peut pas attendre la fin du texte pour faire l’explication de vote ? Mme Tepuaraurii Teriitahi : Cela va être rapide parce que sinon après, on va être trop loin du sujet. Le président : Bon. Faites vite alors ! M. Édouard Fritch, hors micro : Vite, on a faim ! Mme Tepuaraurii Teriitahi : Cela va être très rapide. Simplement pour, pas vous remercier évidemment puisque vous n’avez pas voté mon amendement, juste répondre quand même à l’intervention de notre ministre qui s’étonnait effectivement qu’en commission on ait voté pour. Ma collègue sénatrice a bien rappelé que c’est notre droit en tant qu’élus de déposer des amendements ; et ce qui a suscité ma volonté de faire cet amendement, ce sont les explications du secrétaire général. Je m’étais déjà interrogée avant, et pendant ses explications je me suis dite, ce n’est pas possible. Le but d’un amendement, quel est-il ? Je l’ai déjà annoncé, je n’avais pas grand espoir, mais c’est de susciter un débat. Contrairement à ce que vous dites, je ne suis pas de ce genre de personnes qui font de la politique politicienne, j’essaie d’alerter. Vous avez cité certaines de mes déclarations qui sont autant d’alertes que vous devriez peut-être parfois écouter avec un peu plus d’attention parce que bizarrement, après, cela se réalise. Mais ce sont des alertes, ce n’est pas pour casser quoi que ce soit, ce n’est pas pour faire de la politique politicienne. Et ce qui m’habite quand je défends ces fameux 93 millions fois 2, c’est le souci de mes communes parce que contrairement à vous, Monsieur le ministre, je suis une élue de proximité, j’ai été élue par ma population et je me bats pour mes communes parce que j’y tiens. Quand on a été élus et que l’on travaille auprès de nos populations, on sait ce que c’est, c’est ce qui motive mon travail dans cette assemblée. Donc, je referai des amendements tant que je veux, parce que j’estime que souvent, cela peut susciter de la discussion ; et même s’il y a un rejet, cela peut susciter la réflexion et peut-être donner autre chose plus tard. Mais c’est cela le but de l’amendement. Voilà, merci. Le président : Merci beaucoup. Article 2 Le président : Sur l’article 2, le débat est ouvert. N’y a-t-il pas d’intervention ? Je mets aux voix l’article 2 : article 2, pour ? À l’unanimité. Merci. L’ensemble de la délibération, à l’unanimité. Merci bien. Le président : Il est 12 heures 9 minutes. Je vous propose de faire une suspension de séance, et on reprend à 14 heures. La séance est suspendue. (Suspendue à 12 heures 9 minutes, la séance est reprise à 14 heures 13 minutes.) Le président : Bonjour à tous pour notre rencontre en cet après-midi et nous reprenons notre séance. La séance est reprise. Les rapports peuvent être consultés sur le site internet de l’assemblée de la Polynésie française à l’adresse www.assemblee.pf |