Rapport nº 18-2024 relatif à un projet de loi du pays relative au déploiement des infrastructures de recharge de véhicules électriques Paru in extenso au JOPF n° 13 NA du 22/11/2024 à la page 983
| Rapport nº 18-2024 relatif à un projet de loi du pays relative au déploiement des infrastructures de recharge de véhicules électriques Présenté par Mme la représentante Vahinetua Tuahu Procédure d’examen simplifiée Le président : On poursuit rapidement avec la suite de nos dossiers. Je vous propose de nous reporter au rapport n°18-2024. Il s’agit d’une loi du pays relative au déploiement des infrastructures de recharge de véhicules électriques, et en procédure simplifiée. Je demande au rapporteure de bien vouloir nous donner lecture de son rapport. Je crois que c’est Allen ou Tevaipaea. Mme Vahinetua Tuahu : Merci président. C’est moi qui vais faire le rapport synthétique. Merci à tous les fidèles. Bonjour à tous, Monsieur le Président du gouvernement ainsi que tous les ministres, Monsieur le président de l’Assemblée, mes chers collègues représentants de l’assemblée ainsi que l’équipe de l’assemblée. Le présent projet de loi du pays, transmis par lettre no 2196/PR du 12 avril 2024 aux fins d’examen par l’assemblée de la Polynésie française, a pour objectif d’encadrer l’installation et le déploiement des infrastructures de recharge de véhicules électriques (IRVE) en Polynésie française. Il est applicable à toute IRVE mise en service à compter du 1er septembre 2024, dont la puissance maximale de recharge dépasse 3 kilowatts. Ne sont donc pas concernées par le présent dispositif les stations de recharge : – dont la puissance maximale de recharge est inférieure à 3 kilowatts ; – de faible puissance, installées au domicile des particuliers ; – raccordées avant la date d’entrée en vigueur de la loi du pays, étant précisé cependant que celles déjà raccordées qui auraient dû faire l’objet d’une autorisation, elles sont soumises à une obligation de déclaration. Le projet de texte qualifie l’activité d’installation et d’exploitation d’une IRVE comme étant une activité commerciale et non de service public. Il précise également que l’installation et l’exploitation des IRVE ne peuvent porter atteinte à la stabilité, la sécurité, la capacité et la sûreté des réseaux et équipements sur lesquels elles sont raccordées. Sont fixées notamment les obligations des opérateurs d’IRVE ouvertes au public, liées à l’information des usagers ainsi que des sanctions administratives en cas de manquement aux dispositions de la loi du pays pouvant aller jusqu’à une amende de 20 millions de francs CFP. Le projet de loi du pays met également en place un régime d’autorisation préalable pour toute IRVE raccordée au réseau dont la puissance maximale de recharge est supérieure ou égale à un seuil fixé par le conseil des ministres en fonction du réseau concerné. Les demandes d’autorisation seront instruites par le service en charge des énergies selon le principe de la file d’attente qui impose d’analyser puis octroyer les autorisations dans l’ordre de réception des demandes d’autorisation complètes. L’examen du projet de loi du pays en commission, le 23 avril 2024, a été notamment l’occasion pour les représentants présents d’être informés des différents avis et recommandations formulés sur le dispositif ainsi que de la consultation générale menée auprès des acteurs publics et privés intéressés. En outre, les débats en commission ont porté principalement sur les récentes modifications du régime fiscal applicable aux véhicules électriques, la problématique du recyclage des batteries de ces véhicules et la possibilité de fixer des tarifs différenciés de vente d’électricité. À l’issue des débats, le présent projet de loi du pays a recueilli un vote favorable unanime des membres de la commission. En conséquence, il est proposé à l’assemblée de la Polynésie française d’adopter le projet de loi du pays ci-joint. Merci bien. Le président : Merci, Madame la rapporteure. Pour la discussion générale, la conférence des présidents a prévu un temps de parole de 60 minutes réparties comme suit : 36 minutes pour le Tavini huiraatira, 15 minutes pour le Tapura huiraatira et 9 minutes pour les non-inscrits. J’invite l’intervenant des non-inscrits à prendre la parole. M. Nuihau Laurey : Merci, Monsieur le président. Nous allons voter en faveur de ce texte. Il s’inscrit finalement dans la continuité du premier plan de transition énergétique qui avait été présenté en 2015, et cela faisait partie des dernières mesures qui n’avaient pas été mises en œuvre et qui ont été reprises finalement par tous les ministres de l’énergie qui se sont succédés depuis — je ne sais plus combien il y en a eu. Et donc, j’ai juste trois questions à poser au ministre, pas sur la nécessité d’imposer un cadre réglementaire léger, celui-là est léger effectivement. La première question, c’est de savoir si le gouvernement compte imposer, soit un dispositif d’incitation, soit une obligation règlementaire pour favoriser une bonne répartition géographique de ces installations et éviter, finalement, que ceux qui se lancent dans cette activité choisissent de s’installer uniquement à proximité des grands centres et délaissent, finalement, les implantations notamment dans les îles parce que la clientèle et bien évidement le chiffre d’affaires seraient moindres. Et donc, le gouvernement prévoit-il, soit un dispositif d’incitation, soit une obligation règlementaire de couvrir une certaine partie du territoire ? La deuxième question, c’est de savoir aussi si le gouvernement souhaite fixer, d’autorité, un tarif éventuellement inférieur au prix public pour inciter au développement et à la multiplication de ce type de véhicules, y compris en ajoutant dans la grille tarifaire des concessionnaires une disposition spécifique aux recharges. Enfin, dernière question, s’agissant des dispositifs avec une alimentation autonome, j’ai lu dans le texte qu’elles étaient exclues du régime d’autorisation. Est-ce à dire qu’elles seront aussi exclues des dispositions obligatoires pour celles qui sont ouvertes au public et notamment celles qui sont destinées à éviter des contraintes posées aux consommateurs et notamment l’obligation de s’abonner éventuellement à une chaîne donnée. Un peu comme pour les opérateurs de téléphonie mobile, allez-vous, sur les dispositions que vous avez précisées et qui sont de bonnes dispositions de protection des consommateurs, les appliquer aussi aux installations autonomes qui, elles, ne sont pas soumises au régime d’autorisation ? Voilà mes trois questions. En tout cas, nous allons soutenir ce texte. Merci. Le président : Merci. Je demande à l’intervenant du Tavini huiraatira de prendre la parole. Oui. Frangélica. Mme Frangélica Bourgeois-Tarahu : Mes salutations à toutes et à tous. Chers collègues, Le projet de loi du pays qui nous est proposé aujourd’hui à notre approbation concerne le déploiement des infrastructures de recharge de véhicules électriques (IRVE). Le Pays a saisi le CESEC et l’Autorité polynésienne sur la concurrence et ces derniers ont donné leur avis avec observations et recommandations. Enfin, la commission législative de l’équipement et de l’énergie de notre institution s’est positionnée sur le présent projet de loi. Notre rapporteur nous a fait un exposé succinct sur le présent projet de loi qui nous est soumis à notre examen sur le bien-fondé du projet de loi et sur les grandes lignes du projet de loi. Avant que je ne vienne sur les avis des uns et des autres, sur le contenu du projet de loi relative au déploiement des infrastructures de recharge de véhicules électriques (IRVE) en Polynésie française, je me permets, chers collègues, de faire un aparté politique lié à mon intervention politique du groupe Tavini huiraatira. Si ma mémoire ne me fait pas défaut, un de nos objectifs du parti, c’est de construire « une société qui nous rassemble et qui nous ressemble ». Avec cette philosophie, nous mettons l’être humain au centre de nos préoccupations. L’humain, le Polynésien d’abord. Or, aujourd’hui, le projet de loi qui nous est soumis concerne la voiture ! Mon intervention ne remet nullement en question la politique du gouvernement de Mā′ohi Nui (NDT, Polynésie française) et nous l’avons prouvé lors de l’ouverture de la session administrative de cette année : notre vote de confiance à l’égard de notre Président du Pays fait foi. À ce jour, nous sommes des élus, nous sommes également des citoyens, des observateurs de la politique en Mā′ohi Nui (NDT, Polynésie française), et je ne peux occulter le fait que nous sommes préoccupés de la place que nous donnons à la voiture au sein de notre société. Comme je le disais tantôt, construisons une société qui nous rassemble et qui nous ressemble. Mettre l’humain, le Polynésien au centre de nos préoccupations. Elles sont de 3 ordres : se nourrir, se loger, se déplacer. Monsieur le Président du Pays, vous venez de revenir d’un pays où l’aménagement du territoire est la priorité des priorités et la voiture a très peu de place dans le transport des êtres humains. Et, nous sommes avisés qu’un pays qui maîtrise son espace est un signe de puissance. Pour ce faire, la réponse aux besoins primaires que je viens de citer : c’est l’urgence de mettre un plan Tupuna (NDT, ancêtres) sur l’aménagement de notre territoire. Le plan Marshall, c’est à eux ; le plan Tupuna, c’est à nous. Le Plan Tupuna, c’est tirer les leçons du passé pour construire le présent afin que l’avenir profite aux futures générations. Se nourrir : il fut une époque où l’espace qui lui était dédié faisait de lui, le parent riche… Aujourd’hui, ce n’est plus le cas… la pauvreté lui tend les bras. Se loger : il fut une époque où les constructions de logements étaient éphémères. L’espace de « se nourrir » dans une famille était plus importante que l’espace de « se loger ». Aujourd’hui, la place du logement est plus importante que l’espace dédiée à la nourriture… Jusqu’à quand pourrons-nous « se nourrir » ? Se déplacer : il fut une époque où on se déplaçait sur des sentiers… Aujourd’hui, l’espace du « se déplacer » grignote tout doucement mais sûrement l’espace de « se loger ». Jusqu’à quand pourrons-nous « se loger » ? Les priorités de l’humain, du Polynésien se sont inversées. Ce n’est plus : se nourrir, se loger, se déplacer. Aujourd’hui, c’est : se déplacer, se loger, se nourrir. Non pas, par leurs volontés, mais par la volonté de ses dirigeants. C’est l’avenir morose que nous préparons pour les futures générations. De plus, depuis des décennies, les gouvernements successifs ont favorisé le déplacement de nos citoyens par un moyen de confort et non par un moyen d’utilité, c’est-à-dire la voiture. Si je puis m’exprimer ainsi : ce n’est plus l’être humain qui est au centre de nos préoccupations, c’est la voiture. J’ai une voiture, je l’utilise pour me déplacer lorsque c’est utile, et je fais en sorte de favoriser le co-voiturage… là n’est pas l’action principale de mon propos. Tout pour la voiture, c’est une politique qui fait beaucoup de dégâts. Nous avons dépensé des dizaines voire des centaines de milliards pour des routes au profit de la voiture. La hauteur actuelle des routes en est la preuve. De plus, nous avons un grand voire énorme souci aujourd’hui et c’est le traitement des épaves de voitures, des carcasses dont on ne sait quoi en faire. Une pollution visuelle en plus de la pollution environnementale. Que dire du quotidien de nos travailleurs : embouteillages pour aller au boulot, embouteillages pour rentrer chez soi. De plus, à l’entrée de notre capitale, il n’y a plus d’heures de pointe, les rues et les parkings sont bondés. La voiture est la reine de la ville de Papeete. C’est la carte postale que l’on donne à nos touristes croisiéristes. Que dire des pathologies liées à la voiture : quelques exemples, le stress de la conduite, l’angoisse de l’endettement, la violence verbale vis-à-vis d’autrui, des symptômes dont nous n’avons pas pesés les effets sur nos citoyens, sur nos Polynésiens. Sans oublier les drames causés par les accidents. Monsieur le Président, nos citoyens ont besoin d’une qualité de vie à la hauteur de la beauté de Mā′ohi Nui (NDT, Polynésie française). Le déplacement de nos citoyens fait partie de la qualité de vie que nous devons offrir à chacun d’eux. La stratégie du transport terrestre doit être ferme et efficace : maîtrise du parc automobile en circulation, évitons la surutilisation de nos routes ; faire en sorte que la voiture soit un moyen de transport utilitaire et non un outil de confort ; pénaliser les propriétaires d’épaves (particuliers et garages). Je suis consciente que la voiture apporte une plus-value dans le tissu économique et grande pourvoyeuse d’emplois sur notre territoire (les concessionnaires, les garages, les mécaniciens, les vendeurs de pièces détachées, les stations-services, etc.). Et je relis les recommandations qui sont à la même page 6 et je retiens 2 recommandations où il nous réclame : « de mettre en place des incitations fiscales à l’installation de telles infrastructures etc., de rédiger un schéma directeur d’IRVE en lien avec les communes afin d’intégrer dans leurs plans généraux d’aménagement ces différentes infrastructures et de rédiger dans les meilleurs délais l’arrêté prévu à l’article LP 4 afin que les opérateurs privés puissent rapidement se positionner sur des zones géographiques, y compris celles n’ayant pas nécessairement une rentabilité assurée ». Revenons à notre projet de loi. L’avis du CESEC nous propose 7 recommandations accompagnées d’observations et on les remercie sur l’attention qu’ils ont portée sur le présent projet de loi, suite à la saisine de notre gouvernement. En parcourant le document du CESEC, je me suis aperçue que, d’une part, ce qui est retenu semble être que les avis et recommandations du collège des patrons, il est vrai le projet de loi s’y prête et d’autre part, une forme de raillerie de leur part vis-à-vis de notre gouvernement et des élus Tavini huiraatira que nous sommes. Je m’explique. À la page 6, il est écrit : « L’installation et le déploiement des infrastructures de recharge de véhicules (IRVE) s’inscrivent dans les objectifs principaux du Plan de transition énergétique et traduisent la mise en œuvre des engagements pris par les différents gouvernements ». De plus, à la même page 6, 2 alinéas plus loin, il est mentionné : « Néanmoins, et au regard des incertitudes qui pèsent tant sur la fiscalité applicable à ce secteur que sur l’opportunité du texte, le Conseil économique, social, environnemental et culturel de la Polynésie française émet un avis défavorable au projet de loi du pays relative aux infrastructures de recharge des véhicules électriques, en l’état ». Mon premier ressenti après lecture… Et je relis, les recommandations qui sont à la même page 6, et je retiens 2 recommandations, où il nous réclame : « de mettre en place des incitations fiscales à l’installation de telles infrastructures, etc. de rédiger un schéma directeur des IRVE en lien avec les communes afin d’intégrer, dans leurs plans généraux d’aménagement, ces différentes infrastructures et de rédiger dans les meilleurs délais l’arrêté prévu à l’article LP 4 afin que les opérateurs privés puissent rapidement se positionner sur des zones géographiques, y compris celles n’ayant pas nécessairement une rentabilité assurée ». Et, mon deuxième ressenti, je reprends l’expression chère à notre député Chailloux : « Eh ben dis donc, quel culot !». Que dire d’un des paragraphes mentionnés, à la page 5, où il est dit : « Le présent projet de loi du pays a pour objet d’instaurer une réglementation concernant l’installation et l’exploitation des infrastructures de recharge de véhicules électriques (IRVE) en laissant au secteur privé l’initiative de ce développement ». « En laissant au secteur privé l’initiative de ce développement ». Il est vrai qu’il est mentionné dans l’article LP 2, « que l’installation et l’exploitation d’une infrastructure de recharge de véhicules électriques (IRVE.) ne constituent pas des activités de service public », peut-être que la pensée veut dire la même chose, mais comme l’écrit ne conforte pas la pensée, donc ce n’est pas la même chose ! Si je résume, le CESEC nous dit : en l’état actuel du projet de loi, nous sommes défavorables, mais on peut être d’accord sur le projet de loi, si vous mettez noir sur blanc : que les IRVE seront l’affaire du secteur privé et rien que du secteur privé ; que vous inscrirez dans vos articles, le financement public ou les incitations fiscales qui nous conviennent ; que vous rédigerez un schéma directeur des IRVE où vous nous trouvez de l’espace afin que nous puissions nous installer en toute quiétude… En somme, et peut-être avec une once de frustration de ma part voire plus, le message est : donnez-nous les avantages fiscaux, donnez-nous les autorisations après les IRVE, c’est notre affaire ! Un grand homme disait : « La décision la plus importante que nous prenons est de savoir si nous croyons vivre dans un univers amical ou dans un univers hostile ». Mais, bizarrement, de la première à la dernière page, aucune ligne sur la concurrence… Bizarre, bizarre ! Je parle de la concurrence car l’Autorité polynésienne de la concurrence en parle, vous me direz, vous me direz : « c’est son rôle ! » Sur ce sujet, l’APC est très explicite. Sa lecture est très instructive. L’APC fait 9 recommandations et l’une de ces recommandations me met mal à l’aise. À savoir, « associer les collectivités locales à l’élaboration du schéma de développement afin de recenser les besoins de chaque communes ». Collectivités au pluriel, et nous sommes informés qu’en Polynésie française, il y a deux collectivités territoriales : le Pays et les communes. Là encore, une forme de raillerie vis-à-vis des responsables de « Mā'ohi Nui (NDT, Polynésie française) ». On cite la collectivité des communes et on omet de citer le Pays. Est-ce un oubli ?... Peut-être. Est-ce un détail pour nous ? Non. Monsieur le Président de « Mā'ohi Nui (NDT, Polynésie française) », il est temps que notre pays soit respecté. Notre peuple s’est exprimé en avril 2023, faisons respecter son choix. Comme dirait l’autre : « Et comme d’habitude, c’est le silence qui hurle ! » Mais, ce qui m’inquiète le plus dans le document de l’APC, ce sont les références réglementaires dont la plupart des textes proviennent de l’Union européenne. D’où ma question : sommes-nous libres d’agir et de décider pour notre pays ? Par contre, je suis d’accord avec l’APC sur une de ses conclusions où elle écrit « une attention particulière devrait être accordée à l’article 14 du projet d’arrêté d’application du projet de texte soumis à l’examen de l’Autorité ». En effet, l’article 14 du projet d’arrêté d’application mentionne : « Interdiction de vente à perte lorsque l’infrastructure de recharge est raccordée au réseau public d’électricité et qu’elle est ouverte au public, le prix unitaire en franc pacifique par kilowattheure d’électricité revendu aux clients de l’infrastructure de recharge ne peut être inférieur au prix qui lui est appliqué par le gestionnaire de réseau ». Nous savons tous qui est le gestionnaire principal de réseau : c’est EDT. La vente du prix du kilowattheure ne peut être inférieure au prix d’EDT, et nous savons quelle est la hauteur : il est le prix de notre électricité. Faisons attention ! On comprend mieux le silence sur la concurrence dans le rapport du CESEC. Car, en l’état, comme ils le disent si bien, EDT est l’interlocuteur privilégié de la mise en place d’IRVE et, en l’état, on se doit allégeance… Les mots sont peut-être forts mais expriment la réalité. La commission de l’équipement s’était réunie le 23 avril 2024 afin que ses membres puissent statuer sur le présent projet de loi. C’est un projet de loi pour l’intérêt général et non un projet de loi pour l’intérêt de particuliers. Ce qui me fait dire l’insistance des messages partisans risquent de troubler la patience de l’écoute, voire de les rendre inaudible, et c’est bien dommage pour notre démocratie. Et je rappelle le vote de la commission : pour à l’unanimité des membres. Pour clore mon propos, le vote des membres du groupe Tavini huiraatira sera conforme à celui du vote de la commission. Merci. Que l’amour règne. Le président : Merci bien. J’invite maintenant l’intervenant du groupe Tapura huiraatira à prendre la parole. Tepuaraurii. Mme Tepuaraurii Teriitahi : Merci, Monsieur le président. Je voudrais juste, en préambule, quand même dire que le CESEC appréciera la façon dont le Tavini huiraatira considère l’avis qu’elle émet au nom de la société civile. Parce que là, quand je viens d’entendre, à un moment donné, je me suis dit : non, c’est moi qui ai décroché, tu n’entends pas bien ce qui est en train d’être dit ! Parce que là clairement, je viens d’entendre que l’on accuse le CESEC d’être partisan — c’est-à-dire que comme cela ne va pas dans le sens que vous voulez, donc d’être pour les autres, c’est-à-dire nous —, donc d’être anti-Tavini. Et je regrette vraiment d’entendre ces accusations faites à l’encontre du CESEC parce que le CESEC reflète la société civile qui me semble avoir plusieurs couleurs politiques, donne un avis le plus objectif possible, parfois avec des arguments pour les uns ou pour les autres…, mais enfin, j’ai toujours trouvé qu’ils étaient plus ou moins objectifs. Après, je laisse au CESEC et à sa présidente, qui pourtant est toujours présente lorsqu’on la convie, qui est toujours active, je les laisse apprécier les déclarations qui viennent d’être faites. Pour revenir sur ce dossier « bienvenu mais pas forcément utile », pour reprendre les propos du représentant des concessionnaires automobiles invité à échanger avec nous sur ce texte dont l’étude préliminaire a eu lieu le 23 avril dernier — parce que c’est comme cela qu’il a dit « bienvenu mais pas forcément utile » —, ainsi nous pourrions qualifier ce projet de loi du pays visant à promouvoir le déploiement des infrastructures de recharge de véhicules électriques dans nos îles. « Bienvenu… » car, qu’on le veuille ou non, le développement des moyens de transport décarbonés et donc, plus respectueux de notre environnement, s’inscrit dans l’air du temps. Quand bien même la commercialisation de véhicules électriques reste encore confidentielle en Polynésie française — à peine 3 % des nouvelles immatriculations en 2023 —, tout doit être mis en œuvre pour encourager les usagers à sauter le pas. Or, comme nous le savons tous, notre gouvernement semble avancer à reculons sur ce sujet. En effet, vous ne pouvez pas, d’un côté, continuer de prétendre que les exonérations accordées jusqu’ici sur les véhicules propres n’ont pas eu l’effet escompté, pour mieux raboter ensuite les avantages au travers d’une loi fiscale plus que contestable, et de l’autre, créer un cadre règlementaire censé développer l’activité d’installation et d’exploitation d’une IRVE. Y a un petit illogisme quand même. Aussi, dans ce domaine comme dans bien d’autres, permettez-nous de douter de la cohérence de votre démarche. Parmi les nombreuses incohérences relevées dans ce projet de texte, force est de constater que cette règlementation ne fait l’objet, pour l’heure, d’aucune codification. Et pour cause, ce travail est en cours dans la perspective de futures modifications des Titres 5 et 6 du code de l’énergie. Elles concerneront notamment les dispositions fiscales, douanières et tarifaires en matière d’électricité. Nous sommes donc au cœur du sujet. Mais serez-vous au rendez-vous de l’entrée en vigueur de la présente loi du pays, à savoir le 1er septembre 2024 ? Rien n’est moins sûr. Quant à préciser dans l’article LP 3 que « la source d’électricité dédiée à l’alimentation des infrastructures de recharge est d’origine renouvelable », là encore, vous persistez dans l’ambiguïté du message. Nous y voyons, pour notre part, la preuve implicite du rôle crucial joué par les véhicules électriques et hydrides dans la réduction de gaz à effet de serre ainsi que dans la diversification du mix énergétique avec un objectif de 75 % à l’horizon 2030. Preuve encore que ce texte n’ait pas abouti dans toutes ses dimensions, la problématique des batteries et de leurs conditions de recyclage est ici complètement occultée. Ce qui a d’ailleurs suscité une levée de boucliers de la part des membres du CESEC. Nous devrons donc nous contenter de la promesse du ministère de lancer des travaux sur le sujet — quand ? On ne le sait pas —, toujours avec le secteur privé, c’est-à-dire à moindre frais pour notre collectivité. Dans de telles conditions, nous voyons mal ce que les opérateurs auront à y gagner, tout au moins à court et moyen terme. Au motif de laisser la concurrence se développer — ce que d’ailleurs l’APC a salué dans son avis rendu le 7 novembre 2023 tout en émettant quelques réserves quant à la rentabilité économique des installations —, le Pays montre une fois de plus l’intérêt qu’il porte à ce sujet. Et ce, contrairement à la Nouvelle-Calédonie où, à partir de 2021, le Congrès, avec la participation financière de l’ADÈME, s’est donné les moyens d’avancer dans la transition énergétique avec pour objectif d’installer 18 000 IRVE d’ici à 2030. En revanche, nous souscrivons complètement à la préconisation de l’APC pour que les collectivités locales soient étroitement associées à l’implantation de nouvelles bornes de recharge, étant donné que la capitale Papeete n’a pas les mêmes besoins qu’une commune plus isolée de la presqu’île. Je me rappelle d’une anecdote que m’a racontée un représentant présent dans cet hémicycle d’une voiture électrique arrivée effectivement à Tautira et qui n’avait pas possibilité d’être rechargée pour revenir vers Papeete, d’où l’importance effectivement d’associer nos communes, donc nos collectivités territoriales, de façon à ce que si l’on veut développer les IRVE, on en mette un peu plus si on va plus loin que Papeete puisque c’est là qu’on en trouve le moins. L’objectif étant de trouver les technologies de recharge adéquates dans les zones les plus appropriées. Au passage, vous seriez bien inspirés de commencer par communiquer sur les bornes actuellement accessibles au public et qui demeurent aujourd’hui confidentielles, au total une quinzaine sur Tahiti et Moorea. J’avoue que moi-même, je ne sais pas où est-ce qu’elles sont implantées. Cela m’aiderait bien parce que j’ai une voiture 100 % électrique et cela me sauverait dans certaines circonstances. Voilà. Ceci étant posé, nous soutiendrons néanmoins ce projet de loi parce que nous restons dans la logique que nous avons toujours défendue d’inciter à aller vers les véhicules électriques qui, à notre sens, restent des véhicules moins polluants que les véhicules thermiques. Donc, vous avez le soutien du Tapura huiraatira pour ce dossier. Merci. Le président : Merci. La discussion générale est maintenant close, j’invite le gouvernement à répondre aux différentes interventions. M. Tevaiti-Ariipaea Pomare : Merci à tous pour vos interventions. Je vais revenir sur les questions qui ont été posées notamment par Nuihau. Donc, on n’a pas prévu de dispositif incitatif pour les IRVE. Concernant la répartition géographique, on n’a pas mis de contraintes non plus, donc les IRVE s’installent où ils veulent sur le territoire. La seule condition qui est mise, on va dire, c’est qu’on a mis un plafond pour la puissance disponible par territoire : par exemple sur Tahiti, il s’agirait d’avoir une puissance autorisée de 5 000 kWh. Ensuite, la dispersion sur le territoire se fait au gré du promoteur privé. À savoir qu’aujourd’hui les véhicules électriques ont des autonomies importantes. Je pense que l’on peut faire au moins trois fois le tour de l’île. Voilà. Il n’y a pas de tarification spécifique de prévu aujourd’hui, donc c’est la liberté d’entreprendre, la liberté des prix qui prime. À l’avenir, peut-être avec la mise en place de compteurs intelligents qui permettent de différencier en fait quand est-ce qu’on charge (le week-end ou en semaine), il pourrait être envisagé des tarifications on va dire préférentielles sur certaines plages horaires. Ce n’est pas possible pour le moment, mais cela pourrait évoluer. Par rapport aux obligations d’information notamment et de transparence tarifaire pour les IRVE, elles sont obligatoires autant pour les IRVE qui sont connectées que celles qui sont autonomes et non-connectées. Voilà. Je ne sais pas si j’ai répondu… J’ai dû répondre à l’ensemble des questions de Nuihau. Mais je ne me souviens pas si Tepuaraurii avait des questions ?... Non ? Juste des remarques ?... J’ai bien pris en compte tes remarques. Le président : Nuihau. M. Oscar, Manutahi Temaru : Président, j’ai un avis, enfin un sujet sur lequel échanger. J’aimerais simplement dire qu’il y a une quinzaine d’années, j’ai eu le privilège de conduire la voiture de Schwarzenegger qui fonctionne à l’hydrogène, en Californie. Je pose la question : est-ce que nous ne sommes pas là, la tête dans le guidon, avec ces voitures électriques qui vont débarquer ? Et les voitures à l’hydrogène, quand est-ce qu’elles vont arriver ? Je n’ai pas de réponse. Quand je vois un pays comme Cuba, par exemple, les plus vieilles voitures, ils ont su les garder et tout ça et tout. Là, la société de consommation nous… Je ne sais pas, je suis un peu sceptique et je me pose des questions. Gouverner, c’est prévoir, bien sûr, mais jusqu’à quand ? Cela fait à peine, je ne sais pas…, quelques années que l’on a entendu parler de voitures électriques et ça y est, c’est parti ! On installe des recharges partout. Demain, ça va être l’hydrogène. Qu’est-ce que l’on fait de tout ça ? Voilà. Je me pose des questions, c’est tout. Le président : Merci. Nuihau. M. Nuihau Laurey : Merci pour les réponses. Juste sur la deuxième question, je ne parlais pas de tarif de revente, mais de la fixation d’un tarif pour le rachat d’électricité destinée à la recharge des véhicules. Ma question, c’était celle de la possibilité de créer dans la grille tarifaire, un peu comme pour l’électricité des lampadaires, un tarif préférentiel pour favoriser finalement le développement de ces installations. Pas le prix de vente final qui est la liberté de l’entrepreneur finalement de fixer son tarif. Est-ce que le gouvernement, dans une phase transitoire éventuellement, envisage cette possibilité ? Le président : Merci. M. Tevaiti-Ariipaea Pomare : On n’a pas prévu d’intervenir et de créer de dispositif incitatif. Et puis lorsque je parlais de compteurs intelligents, je faisais allusion au fait que les IRVE seraient en contrat directement avec les concessionnaires (par exemple Tahiti Nord) et ils pourraient bénéficier, s’ils veulent, à titre de négociation, de tarifs différentiels, notamment préférentiels, en période d’ensoleillement par exemple ou de forte production d’énergie renouvelable sur le week-end par exemple, et répercuter cela sur le consommateur. Donc non, le gouvernement n’a pas prévu d’intervenir sur les tarifs. Le président : Merci. Donc, plus d’intervention au niveau du gouvernement ?... Pas d’intervention. La discussion étant terminée et en l’absence d’amendement, nous passons au scrutin public comme le prévoit l’article 142, dernier alinéa, de la loi statutaire et 43 du règlement intérieur. Je laisse la parole à Madame la secrétaire générale. Mme Jeanne Santini procède à l’appel des représentants afin qu’ils indiquent le sens de leur vote :
Cela fait 53 voix pour. Le président : Merci. Donc, le projet de loi du pays relative au déploiement des IRVE est adopté à l’unanimité. Les rapports peuvent être consultés sur le site internet de l’assemblée de la Polynésie française à l’adresse www.assemblee.pf |