Rapport n° 75-2024 relatif à l'avis de l'assemblée de la Polynésie française sur le projet de loi autorisant la ratification de l'accord se rapportant à la convention des Nations unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale Paru in extenso au JOPF n° 18 NA du 16/12/2024 à la page 1398
| Rapport n° 75-2024 relatif à l’avis de l’assemblée de la Polynésie française sur le projet de loi autorisant la ratification de l’accord se rapportant à la convention des Nations unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale Présenté par M. le représentant Edwin Shiro-Abe-Peu Le président : Je vous renouvelle mes salutations pour notre rencontre en cet après-midi. Je propose de continuer nos travaux. Nous sommes au dossier no 9 : rapport 2020-2024. Pardon je m’excuse, nous sommes au dossier no 8 : rapport n° 75-2024 relatif à l’avis de l’assemblée de la Polynésie française sur le projet de loi autorisant la ratification de l’accord se rapportant à la convention des Nations unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale. Je demande au gouvernement d’exposer l’économie générale du projet. Mme Minarii Galenon Taupua : Merci bien, nobles élus, excusez-moi de mon retard. Donc cet après-midi, nous allons parler de la protection de l’océan, comme on sait que c’est l’une des grandes préoccupations de ce millénaire. Cette convention des Nations unies sur le droit de la mer (CNUDIM) adoptée le 10 décembre 1982 est considérée comme la constitution des mers et des océans. Les états côtiers sont ainsi souverains dans leur mer territoriale et dispose d’une juridiction sur leur zone économique exclusive et sur leur plateau continental. Au-delà de ces espaces se trouvent la haute mer et la zone internationale des fonds marins, dont l’accès et la gestion des ressources minérales relèvent de l’autorité internationale des fonds marins. Les zones ne relevant pas de la juridiction nationale sont traditionnellement un espace de liberté où les États ne possède ni souveraineté, ni droit souverain. Ces zones représentants les deux tiers de la surface de l’océan et près de la moitié de la surface du globe, sont de plus en plus menacées du point de vue environnemental. C’est ainsi qu’a été adopté à l’unanimité cet accord sur la conservation et l’utilisation durable, la diversité biologique marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale, plus connu sous l’acronyme anglais « BBNJ », signée par 88 États, parmi lesquels la France, les États-Unis et les pays du Pacifique. L’objectif majeur est d’améliorer la gouvernance de l’océan, de renforcer la coopération entre les différentes enceintes régionales et multilatérales existantes afin d’assurer une meilleure gestion de l’environnement marin pour le compte des générations présentes et futures. Cet accord est primordial pour Mā'ohi Nui (NDT, la Polynésie française) au titre de ses compétences en matière de protection de sa zone côtière jusque dans la zone exclusive économique, la ZEE. Donc le gouvernement propose à notre noble assemblée de rendre un avis favorable. Merci bien. Le président : Merci Madame la vice-présidente. Je demande à Madame Jeanne de venir me remplacer. (Présidence de Mme Jeanne Vaianui, secrétaire de la commission permanente.) La présidente : Je demande au rapporteur, Monsieur Edwin Shiro-Abe, de faire une présentation du rapport, merci. M. Edwin Shiro-Abe Peu : Merci Madame. Je vous renouvelle mes salutations pour notre rencontre en cet après-midi. Par lettre no 124/DIRAJ du 7 mars 2024, le Haut-commissaire de la République en Polynésie française a soumis pour avis à l’assemblée de la Polynésie française, un projet de loi autorisant la ratification de l’accord se rapportant à la convention des Nations unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale. En liminaire, il convient de rappeler que la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (CNUDM), qui a été adoptée en 1982, a posé un cadre juridique sur les espaces maritimes, délimitant ainsi ce qui relève de la souveraineté des États et ce qui relève de la haute mer, située au-delà de leurs juridictions, sur laquelle les États ne possèdent aucuns droits souverains. De ce fait, les États n’avaient aucune légitimité d’action sur la haute mer, limitant ainsi leur champ d’intervention en matière de protection des espaces maritimes et de leurs ressources. Or, la haute mer représente plus de 60 % de la surface de l’Océan et près de la moitié de la surface du globe, abritant des ressources génétiques marines et une biodiversité très riche. Du fait de l’urgence de réglementer les activités des États ayant un impact environnemental négatif en haute mer, le BBNJ a été adopté le 19 juin 2023. Ce traité historique marque un tournant dans la protection de l’océan, en complétant le cadre juridique de la gouvernance océanique établi par la CNUDM. Constitué d’un préambule, suivi de 76 articles organisés en 12 parties, l´accord BBNJ s’articule autour de quatre axes principaux : – D’abord, il permet l’établissement d'aires marines protégées puis il impose l’obligation de réaliser des évaluations d’impact environnemental des activités humaines risquant d’avoir des effets néfastes en haute mer ; – L’accord met également en place un régime d’accès aux ressources génétiques marines, à leurs connaissances traditionnelles et prévoit le partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation ; – Enfin, le dernier volet consiste à favoriser le transfert de technologies marines vers les pays en développement. En termes de suivi opérationnel, la mise en œuvre des dispositions de l’accord sera suivie et évaluée par une Conférence des Parties dont la première réunion devrait se tenir un an après la date d’entrée en vigueur de l’accord. La Polynésie française est concernée au titre de sa compétence en matière de protection de sa zone côtière et de sa ZEE. Il résulte que les dispositions de cet accord représentent de réelles opportunités de création d’aires marines protégées autour de la ZEE polynésienne, notamment au nord de l’archipel des Marquises. Ces questions nécessitent un partenariat avec l’État pour suivre les travaux de réalisation et de mise en œuvre de cet accord. Rassemblant près de 90 États signataires, l´entrée en vigueur de cet accord est conditionnée à la réunion d’au moins 60 ratifications. La France se mobilise pour une entrée en vigueur rapide de cet accord, à horizon 2025. Pour l’heure, l’assemblée nationale a adopté le projet de loi de ratification le 29 mai dernier ; celui-ci a été transmis au Sénat et est en attente d’examen en séance par la chambre haute. Au regard de ces éléments, la commission de l’agriculture et des ressources marines, réunie le 30 juillet 2024, propose à l’assemblée de la Polynésie française d’émettre un avis favorable au Merci. La présidente : Je demande à Monsieur Edwin Shiro-Abe de venir. Merci. (Suspendue un court instant, la séance est reprise sous la présidence de M. Edwin Shiro-Abe Peu, vice-président de la commission permanente.) Le président : Parmi les membres de la commission permanente qui souhaite intervenir, vous avez un temps de parole de 10 minutes. Madame Frebault à vous la parole. Mme Joëlle Frebault : Merci Monsieur le vice-président. Bonjour, Monsieur le vice-président ainsi qu’à toutes et à tous en cette occasion qui nous est donnée d’être réunie cet après-midi. Tout ce qui touche à la mer et à sa gouvernance, en tant que moyen de subsistance essentiel pour nos populations, constitue un sujet sur lequel nous devons rester vigilants. Il en va ainsi pour la demande d’avis que le Haut-commissaire a transmis à notre assemblée s’agissant d’un projet de ratification par la France de l’accord se rapportant à la convention des Nations unies sur le droit de la mer. Adopté en 1982, ce cadre juridique qui délimite en quelque sorte ce qui relève de la souveraineté des États du reste, en l’occurrence la haute mer qui couvre près de 50 % de la surface du globe, a rapidement montré ses limites. D’où l’adoption le 19 juin 2023 d’un traité complémentaire, le Marine Biodiversity of Areas Beyond National Juridiction ou « BBNJ », que la France entend soutenir avec la plus grande vigueur dans la perspective d’une conférence des Nations unies prévue à Nice courant 2025. Mais une fois n’est pas coutume, et compte tenu des compétences dévolues à la Polynésie française en matière de protection de sa zone côtière et de sa zone économique exclusive, il semble que nous ayons tout intérêt à développer de nouveaux partenariats avec l’État pour que cet accord international prenne en compte certaines réalités polynésiennes. Ce qui explique l’avis favorable qui nous est proposé d’émettre. Quand bien même, je rappelle au passage que par le passé nous n’avons attendu personne pour promouvoir et créer des aires marines protégées comme il est suggéré dans l’exposé des motifs. Merci bien de votre attention. Le président : Merci, Madame. D’autres interventions côté Tavini. Maite, à ton tour. Mme Maite Hauata Ah-Min : Merci Monsieur le président. Monsieur le président de la commission permanente, Madame la secrétaire générale adjointe, Monsieur le vice-président de l’assemblée, à nous toutes et tous qui écoutons la voix de l’amour qui nous unit. Chers collègues, bonjour. Nous sommes aujourd’hui face à une question d’une importance capitale pour notre peuple et pour les générations futures. Nous abordons la question de l’océan et de toutes les richesses qu’il renferme. Lorsque nous parlons de richesse, nous parlons surtout de la vie. Conformément à notre sujet du jour, nous invitons les membres de la commission permanente de l’assemblée à partager leurs avis sur la question de la gestion de l’océan. La gestion et l’utilisation des ressources que nous possédons doivent nous rappeler ainsi qu’à toute la population de la Polynésie française qu’aujourd’hui, notre territoire, c’est-à-dire la Polynésie française, est immense, tout comme l’Europe. Avec une superficie de 5 millions de kilomètres carrés, et malgré les mesures prises par le gouvernement en juin 2024, nous, le peuple Polynésien, restons les principaux propriétaires de cet immense espace marin ainsi que de toutes les richesses qu’il renferme. La raison de l’appel au grand rassemblement de l’église protestante Māʹohi à de l’État français était le suivant : « restituer toutes les richesses appartenant au peuple Polynésien que la France détient illégitimement. » Que ce soit au ciel, à l’intérieur des nuages, sur terre et à l’intérieur de la terre, au-dessus et à l’intérieur de l’océan. N’est-ce pas, dans la vision des polynésiens, lorsque tu possèdes une chose et qu’elle n’est pas à toi, que cela s’appelle du vol ? Aujourd’hui, on nous demande notre avis sur une proposition de loi qui suggère que le gouvernement ait une autorité sur la gestion de l’océan. C’est un moment crucial pour nous, un moment opportun pour affirmer notre souveraineté sur notre territoire. Nous disons qu’il s’agit de notre décision, et c’est le moment idéal pour demander au gouvernement de reconnaître officiellement le droit du peuple polynésien à gérer cette vaste étendue maritime qui nous appartient. Car, si je ne me trompe pas, nous ne sommes pas encore reconnus dans ce processus, seul l’État français l’est. Je me souviens des paroles de Zemmour, lorsqu’il a dit un jour : « notre jackpot, c’est la surface marine et sous-marine de la Polynésie française. » Cela signifie que la France est la propriétaire de notre vaste océan. Le moment est venu de concrétiser ces paroles : rendons à Dieu ce qui est à Dieu. Nous devons alors dire : rendons aux Polynésiens ce qui est à Mā'ohi Nui (NDT, la Polynésie française) et à la France ce qui est à la France. Sans aucun doute, lorsque cette idée se réalisera, cela deviendra un moyen de faciliter un développement durable à travers l’exploitation de nos propres ressources maritimes. » Pour conclure mon intervention, je me souviens juste de cette petite phrase prononcée par le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin à une autre époque, dans le journal du mois de mars 2005, qui disait : « sans la Polynésie, la France serait à bien des égards bien affaiblie. » Si Mā'ohi Nui (NDT, la Polynésie française), n’est pas beaucoup mentionnée, la France serait considérablement affaiblie. Il est juste qu’aujourd’hui nous travaillions ensemble pour que notre voix soit entendue. Merci de votre attention. Le président : Merci bien. Y a-t-il d’autres interventions ? non. La discussion générale est maintenant close. J’invite le gouvernement à répondre aux interventions des orateurs. Mme Minarii Galenon Taupua : Merci bien. Je voulais remercier donc notre maire Frebault pour son intervention sur – vraiment – l’importance de l’océan en Polynésie. C’est vrai que c’est vraiment, quand on lit le texte, on se rend compte qu’il a de l’importance de nos surfaces marines et maritimes. Et d’autant plus que tu as bien souligné cette importance des aires marines protégées puisque c’est aux Marquises qu’on a les surfaces les plus importantes et vous êtes vraiment le modèle pour notre Polynésie parce que créer des aires marines protégées, c’est quelque part protéger nos océans et c’est vraiment une belle initiative. Maintenant pour en venir à l’intervention de notre élue Maite – Merci beaucoup pour ces sages paroles concernant notre politique. Tu as évoqué qu’une loi pourrait être rédigée en collaboration avec les Nations unies. Et, il est vrai que vous avez la liberté de rédiger une loi, il n’y a pas de soucis. Nous savons déjà ce qu’il convient de faire. L’aspect important que tu as souligné montre que nous comprenons que cette richesse est la nôtre, qu’elle nous appartient. Toutes les ressources que nous avons dans l’océan, nous en connaissons déjà la grande valeur. Et je respecte tout ce que vous avez dit à ce sujet, car cela nous concerne tous ensemble. Vous saurez quelle est la voie sûre pour notre avenir. Merci bien pour ton intervention. Merci. Le président : Merci bien. Des questions ? Non. Nous passons à l’examen de l’avis. La discussion est ouverte. Pas de discussions ? Nous passons au vote de l’avis. Qui est contre ? Qui s’abstiennent ? Qui est pour ? L’avis est adopté à l’unanimité. Merci bien. Les rapports peuvent être consultés sur le site internet de l’assemblée de la Polynésie française à l’adresse www.assemblee.pf |