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Rapport d'observations définitives de la chambre territoriale des comptes sur le contrôle des comptes et de la gestion de la collectivité de la Polynésie française au titre de la politique de lutte contre le cancer en Polynésie française pour les exercices 2018 et suivants

Paru in extenso au JOPF n° 23 NA du 02/01/2025 à la page 94

Rapport d’observations définitives de la chambre territoriale des comptes sur le contrôle des comptes et de la gestion de la collectivité de la Polynésie française au titre de la politique de lutte contre le cancer en Polynésie française pour les exercices 2018 et suivants


Le président : On poursuit avec l’avant dernier texte. S’agissant du rapport d’observations définitives de la Chambre territoriale des comptes relatif à l’examen de la gestion de la collectivité de la Polynésie au titre de la politique de lutte contre le cancer en Polynésie à compter de l’exercice 2018 jusqu’à la période la plus récente.

En application des dispositions de l’article 272.48 du code des juridictions financières, ce rapport doit être communiqué à l’assemblée dès sa plus proche réunion — c’est ce que nous faisons aujourd’hui.

Et pour notre discussion générale, le temps de parole est identique au précédent texte et j’invite donc tout de suite l’intervenant des non-inscrits à prendre la parole. Vous avez 9 minutes.

Mme Nicole Sanquer : Merci, Monsieur le président.

Aux termes d’une étude exhaustive des actions déployées par le Pays en matière de lutte contre le cancer, la Chambre territoriale des comptes nous fait part au travers de ses observations du défi auquel nous devons faire face pour améliorer la prise en charge du cancer sur notre territoire.

Maladie redoutée par chacun de nous tous, ce rapport participe à nous éclairer sur les décisions stratégiques à prendre pour l’avenir dans l’organisation de la prise en charge du cancer, compte tenu de l’ampleur que prend cette maladie et de ses incidences sur la mortalité, des enjeux financiers que représentent les traitements innovants sur la PSG, mais également de l’obsolescence du Plan cancer qu’il convient de redéfinir.

Tout comme dans le reste du monde, si la prise en charge des cancers depuis les dernières décennies autorise des rémissions, les plus virulents demeurent mortels. La prévention pour l’éviter, un dépistage régulier et organisé, une offre de soins accessible sur l’ensemble du territoire restent définitivement les armes absolues pour l’éviter et le combattre au mieux.

L’état des lieux dressé par la Chambre relève que le cancer est responsable d’un quart des décès des Polynésiens et représente la deuxième cause de mortalité après les maladies cardiovasculaires, la première chez les femmes, toutes classes d’âge confondues.

Si les femmes restent les plus exposées que les hommes dans la première partie de leur vie, ce phénomène s’inverse à partir de 50 ans. Le cancer du sein, de la prostate et du poumon sont les plus fréquents et représentent à eux seuls la moitié des cancers.

 Il n’épargne pas nos enfants, les cancers pédiatriques font état de 15 nouveaux cas annuels, les tumeurs leucémiques étant prépondérantes.

Les causes sont multiples : l’obésité, le tabac, l’alcool, les stupéfiants, les risques professionnels et environnementaux, et dans une moindre mesure les facteurs génétiques.

Le nombre annuel de cancers progressent inexorablement depuis près de 25 ans avec une prévalence de 6 800 patients pour 280 000 habitants et une incidence de 620 nouveaux cas annuel. Bien que ces indicateurs soient plus faibles que ceux constatés dans certains autres territoires d’Outre-mer, leur constante augmentation inquiète, et doit nous alerter sur l’âge moyen du diagnostic qui est beaucoup plus précoce chez la femme (58 ans au lieu de 68 ans) atteinte par les cancers gynécologiques.

Si petit territoire que nous soyons, l’évolution des cancers nous a conduit à organiser sa prise en charge, à mettre en place un registre du cancer, puis d’un plan spécifique, le Plan Cancer 2018-2022, pour mieux prévenir et accompagner les patients atteints de cette dégénérescence cellulaire et à la récente création de l’institut du cancer.

Les protocoles thérapeutiques nécessitant le concours d’un corps médical spécialisé, hautement qualifié, de plus en plus courtisé à l’échelle mondiale, de lourds investissements en matériels médicaux et des traitements par des molécules de plus en plus onéreuses.

Pour autant, la Chambre nous souligne dans son rapport que la survie pour les cancers du sein, de la prostate et de la thyroïde qui présentent le meilleur pronostic après une année est supérieure à 90 % et 80 % après trois ans.

La prévention, l’organisation d’un dépistage en adéquation au maillage territoriale, l’accès aux soins restent donc fondamentale pour mettre toutes les chances de survie du côté des Polynésiens.

Monsieur le ministre de la santé, votre rôle comme le nôtre dans la lutte contre le cancer apparaît donc déterminant pour notre population.

Au-delà des sept recommandations que la CTC nous préconise et auxquelles nous souscrivons, je souhaiterais, Monsieur le ministre, que vous nous indiquiez comment envisagez-vous de généraliser les dépistages à l’échelle territoriale compte tenu des taux de participation considérés insuffisamment élevés par la Chambre pour être efficace ?

Par ailleurs, seul le CHPF dispose d’un service d’oncologie pour répondre à la file active de patient qui a progressé de 23 % durant les cinq dernières années, l’institut n’ayant pas encore à ce jour développé son activité d’opérateur de soins bien que son statut le prévoie.

Nous le savons tous, sachant les difficultés de gestion de l’hôpital puisque ce dernier affiche une saturation du capacitaire dans tous ces services, que l’oncologie dépasse les 100 % depuis 2015 et elle a presque doublé sous la période Covid. Ce surcroît d’activité justifie le recours fréquent à des hébergements de patient d’un service à l’autre avec toutes les difficultés qu’il génère.

Le vieillissement de notre population ne fera qu’aggraver cette situation dans les années à venir d’autant que la prévalence du cancer reste en deçà de celle constatée dans d’autres pays océanien.

La complexité des procédures administratives de recrutement ne facilite pas la stabilisation du personnel médical qui enregistre un taux de rotation alarmant et des difficultés récurrentes de recrutement dont les oncologues. Ces contraintes conduisent de ce fait l’Hôpital à faire appel à des médecins généralistes sans connaissance approfondie dans le domaine de l’oncologie et impactent directement la continuité de suivi médical des soins dispensés aux patients. Les médecins ne connaissent pas leurs patients et perdent un temps précieux en transmission de données pour le suivi de soins en cas de complication métastatique. Les ruptures de soins étant contraires à la déontologie médicale.

Monsieur le ministre, la réduction des évasans internationaux ne peut trouver écho en oncologie que si l’offre de soins sur le territoire suit, sauf à remettre en cause la qualité des soins dispensés et à mettre en danger notre population. Les prises en charge des maladies complexes comme l’oncologie doivent être accompagnées par l’État dans le cadre de conventionnements de partenariat conclus avec les hôpitaux métropolitains. Cette alternative complémentaire aux soins dispensés à Taaone permettrait au personnel médical du CHPF de restabiliser ses effectifs, mais également aux patients de disposer de protocoles de soins définis sur la durée des différentes phases du cancer.

Ce partenariat État-Pays, et vous nous avez rassuré, permettrait par ailleurs de mieux maîtriser l’évolution du coût des molécules onéreuses sur lequel le Pays ne peut influer et de les inclure sur la base de protocoles validés dans des projets de recherche portant sur des traitements innovants.

Monsieur le ministre, vous nous avez fait part lors des derniers mouvements sociaux au CHPF de la réalisation d’un audit RH pour envisager des solutions plus pérennes.

Pourriez-vous nous faire part de cet audit et les solutions concrètes que vous envisagez de retenir pour répondre aux difficultés persistantes ? Je pense que vous avez déjà donné les premières réponses. Où en êtes-vous quant à la révision du statut des personnels hospitaliers ? Et quelle réponse comptez-vous apporter aux ruptures de soins.

Enfin, nous tenons tout particulièrement à clôturer notre propos sur l’absolue nécessité aujourd’hui d’apporter des solutions aux difficultés que rencontre la gestion de la politique de santé, et non pas des pistes de réflexion ou des études qui n’aboutissent en finalité à rien de palpable.

Le terme échu du SOS, de la convention santé État-Pays, du Plan cancer et la réforme de la PSG sont en attente de réponse garantissant aucune perte de chance aux Polynésiens tout en étant soutenable vis-à-vis de nos comptes sociaux.

Nous attendons donc de vous, Monsieur le ministre, des réponses et des solutions aux sujets sanitaires qui s’empilent. Si nous convenons tous ici qu’elles ne sont pas aisées, elles ne doivent pas pour autant se limiter à des annonces, et vous avez notre soutien pour les faire aboutir dans le consensus et les meilleurs délais.

Je vous remercie.

Le président : Merci.

On poursuit nos interventions avec le Tavini huiraatira. Oui. Rachelle.

Mme Rachelle Flores : Mes salutations à toutes et à tous.

Merci, Monsieur le président.

La Chambre territoriale des comptes nous a fait parvenir ses observations sur la politique de lutte contre le cancer en Polynésie pour les exercices 2018 et suivants.

Depuis 25 ans, le cancer représenta la deuxième cause de décès en Polynésie française après les maladies cardiovasculaires. Le cancer du sein reste le premier cancer qui touche les femmes en Polynésie, soit 41 %. Pour les hommes, cela reste le cancer de la prostate avec 31 %. Et en troisième position de ce classement macabre, nous avons le cancer du poumon avec 21 % d’incidence chez les hommes et 11% chez les femmes.

Afin de toujours mieux informer et protéger nos femmes, Octobre Rose a toujours toute sa place pour sensibiliser notre population.

La prise en charge des cancers représentait près de 30 % des crédits d’assurance maladie, soit 12,5 milliards de francs en 2022. Si le plateau technique se renforce en Polynésie, ce qui conduit à une réduction des Évasans de 20 %, le traitement via les molécules onéreuses a observé une croissance de 70 % et s’établissait à 3,6 milliards de francs en 2022. La CTC recommande, à ce titre, de mieux réguler l’utilisation des médicaments coûteux, tout en préservant la qualité et la sécurité des soins.

Il est difficile d’assurer ces deux recommandations si cela met en péril la vie des patients, car ce regard comptable ne doit pas mettre en difficulté les patients alors qu’il s’agit, à notre sens, d’une dépense nécessaire pour assurer le maintien en vie.

C’est pourquoi, comme il a été rappelé de nombreuses fois ces derniers mois et au cours des différentes interventions, la nécessité de rappeler à l’État ses responsabilités au titre de la solidarité nationale et dans le cadre de l’application du code de santé publique français, sa participation aux molécules onéreuses comme cela se fait en métropole.

C’était l’un des enjeux du déplacement en métropole de notre gouvernement afin de renégocier la convention santé État-Pays pour y intégrer la prise en charge des molécules onéreuses.

Si la concentration des cancers se fait sur Tahiti où la population est le plus rassemblée, la Chambre encourage à maintenir les campagnes de prévention dans les archipels pour sensibiliser davantage la population insulaire.

Pour l’heure, le CHPF assure principalement les soins en oncologie. Entre 2018 et 2023, la file active de ses patients a progressé de 23 %. L’institut du cancer dans son utilisation optimale sera d’un réel soutient pour mieux répartir les soins et ainsi réduire la concentration au sein du CHPF.

Les maladies professionnelles sont un problème qui gangrène notre société. On devient malade suite à des expositions à des risques ou un manque de protection et de prévention aux risques au travail. Dans certains cas, ces maladies peuvent même évoluer vers les cancers. À ce titre, la Chambre a fait part de cette observation, et de la nécessité de prendre en compte les cancers d’origine professionnelle et environnementale.

Comme à l’accoutumée, la Chambre fait part de sept recommandations afin d’améliorer la politique de lutte contre le cancer en Polynésie :

– Il s’agit de procéder tout d’abord, au plus tard pour le début de l’année 2025, à l’évaluation du plan cancer 2018-2022.

– Ensuite, il faut adopter, d’ici à la fin de l’année 2025, un nouveau plan pluriannuel consacré à la lutte contre le cancer.

– Il faut aussi rendre obligatoire, dès 2025, la communication au registre du cancer de l’ensemble des informations et données indispensables à son exhaustivité.

– Il faut aussi renforcer dans le prochain plan cancer, à adopter avant la fin 2025, la prévention des cancers d’origine professionnelle et environnementale.

– Il faut aussi engager, d’ici à 2026, une étude de faisabilité relative à la généralisation du dépistage du cancer colorectal pour les femmes et les hommes à partir de 50 ans.

– Il faut également redéfinir, pour 2025, l’offre de soins oncologique publique à l’aide de coopérations renforcées entre le Centre hospitalier de la Polynésie française et l’institut du cancer.

– Enfin, il s’agit de prévoir dans le prochain plan cancer, à adopter avant la fin 2025, l’extension de l’offre de soins cancérologique dans les archipels.

Il ressort de ces recommandations que la lutte contre le cancer nécessitera une coopération toujours plus renforcée entre les professionnels et les différentes institutions du Pays et la mise en place d’une stratégie pluriannuelle.

La sensibilisation et l’information sont des leviers incontournables pour accompagner notre population. Si le cancer touche un individu, la solidarité permet à l’ensemble de notre société de l’accompagner dans ce parcours.

Le combat contre le cancer ne doit pas être un combat isolé. C’est cet isolement qui participe à augmenter aussi les risques de mortalité, car c’est tellement difficile qu’il est nécessaire d’avoir un soutien global. Il s’agit d’un réel parcours du combattant.

Chers collègues, continuons d’apporter notre soutien à ce combat. Les patients sont engagés et il nous faut les soutenir. Si l’affliction les touche individuellement, nous devons nous battre solidairement. On ne gagne pas ce combat tout seul.

Continuons d’apporter notre soutien à notre gouvernement pour construire une stratégie efficace et dans le cadre des négociations avec l’État. Accentuons le partenariat entre les différentes structures du Pays engagé dans le combat de cette maladie.

Enfin, préservons la solidarité de notre société contre le cancer.

Merci de votre attention et mes salutations.

Le président : Merci bien.

J’invite maintenant l’intervenant du Tapura huiraatira à prendre la parole. Cathy.

Mme Cathy Puchon : Merci, président.

La politique de lutte contre le cancer mise en place en Polynésie française a fait l’objet d’un plan spécifique 2018-2022 dont les objectifs devaient aboutir à mieux prévenir, dépister et guérir les cancers et à accompagner davantage les patients. Ce plan a marqué une étape décisive pour le Pays, destiné à consacrer la lutte contre le cancer comme une priorité de santé.

Selon les données récoltées par l’Institut du cancer de la Polynésie française, le nombre moyen de cas annuels a progressé de 808 en 2015 à 932 cas en 2018 et 880 en 2019.

En juillet 2021, le président de la République a indiqué qu’une mission d’expertise serait mise en œuvre pour apporter un éclairage scientifique et organisationnel sur la contribution que la création d’un Institut du cancer de la Polynésie française qui pourrait apporter des réponses aux besoins sanitaires non couverts, ou mal couverts, de la population polynésienne et à identifier l’accompagnement opérationnel de l’État à la politique de lutte contre le cancer. La mission, qui s’est déroulée du 8 au 13 décembre 2021, était composée de représentants de l’Institut national du cancer, du Centre hospitalier universitaire de Bordeaux et de la Fédération des centres de lutte contre le cancer (Unicancer). Cette mission a favorablement conclu à l’intérêt de mettre en place un institut du cancer en Polynésie française.

Le gouvernement ayant identifié les problématiques de prise en charge des patients atteints de cancer avait, dès juillet 2021, créé l’Institut du cancer de Polynésie française (l’ICPF). Ainsi, en application de l’arrêté n° 1291 du 13 juillet 2021, l’Institut du cancer de Polynésie française a notamment pour missions : d’assurer une activité d’anatomopathologie polyvalente réalisée en Polynésie française avec une spécialisation en cancérologie ; de délivrer des soins aux patients atteints de cancer ; de participer à des programmes nationaux et internationaux de recherche ; d’accompagner les investigateurs et les équipes de soins dans leurs projets de recherche ; de définir une stratégie d’extension de la patientèle dans l’ensemble du Pacifique Sud.

Or, la CTC rappelle dans ce rapport que la mission conduite à la fin de l’année 2021 par l’Institut national du cancer, Unicancer et le Centre hospitalier universitaire de Bordeaux destinée à préparer la mise en place de l’ICPF, a affirmé « y voir une claire opportunité, mais aussi un risque, celui de rajouter une complexité à un système déjà marqué par de nombreuses tensions ; la réalisation de soins, comme la coordination des soins placés sous la responsabilité d’un nouvel acteur, risque de déstabiliser un peu plus les organisations en place, singulièrement l’hôpital ». Or, la Chambre observe que les constats posés par la mission en 2021 ne sont pas étayés par les faits. La coexistence de l’Institut du cancer et du Centre hospitalier depuis plus de deux années ne pose pas de problème en termes de qualité et de sécurité de la prise en charge oncologique en Polynésie française. Bien au contraire, l’Institut du cancer intervient en complément du centre hospitalier sur la coordination des acteurs de la prise en charge du cancer. Cet établissement est, par exemple, indispensable pour développer la recherche clinique en cancérologie, activité essentielle pour permettre au centre hospitalier de faire progresser son attractivité auprès des oncologues.

Les missions dites d’experts pour accompagner le Pays dans de nouvelles missions sont loin d’être infaillibles et peut-être même peu sensibles aux particularités de la Polynésie.

Les difficultés rencontrées par les patients des archipels ont amené le gouvernement à mettre en place les chimiothérapies délocalisées dès 2018 dans les hôpitaux, services de la direction de la santé, à Uturoa (Raiatea) et à Taravao. Depuis 2022, près de 150 patients bénéficient chaque année de ce service. Le financement de cette activité résulte d’un contrat d’objectifs et de moyens conclu avec la Caisse de prévoyance sociale pour le financement des dépenses de fonctionnement. Pour autant, selon les données disponibles, près de 15 % des patients traités à Tahiti pourraient bénéficier d’une prise en charge de la chimiothérapie délocalisée dans les îles de service de la direction de la santé à Moorea, Bora Bora et aux Marquises.

La Chambre recommande par conséquent au Pays de renforcer, dans le cadre du prochain plan cancer à adopter avant la fin de l’année 2025, les moyens destinés à réduire les évacuations sanitaires inter-îles dans le traitement du cancer et à rapprocher, autant que possible, l’offre de soins des lieux de vie du patient.

Ceci d’autant que l’hôpital de jour du centre hospitalier fonctionne au maximum de ses capacités. La Chambre encourage donc, pour l’entier bénéfice de la population polynésienne, en plus des chimio délocalisées dans les îles, l’intervention d’opérateurs privés en chimiothérapies. Cette nouvelle offre permettra de diminuer le temps d’accès au premier traitement et de réduire, par conséquent, les pertes de chance face au cancer.

La clinique Paofai, en tant qu’opérateur privé, bénéficierait d’une autorisation d’effectuer des chimio dans ses murs avec un oncologue privé dont l’activité n’a toujours pas débutée à ce jour !

De même, l’ICPF a également pour mission d’effectuer des chimiothérapies de jour. La Chambre recommande au Pays d’engager des travaux destinés à fixer la répartition des activités oncologiques entre le CHT et l’Institut du cancer, dont le statut l’autorise à exercer des soins.

Qu’en est-il aujourd’hui, cette mission est-elle en activité ?

Développer la recherche clinique pour améliorer l’attractivité médicale. En Polynésie française, le développement de la recherche clinique constitue un des axes essentiels du développement de l’Institut du cancer.

La coopération établie dès 2022 par l’ICPF avec l’Institut Gustave Roussy permet d’inclure des patients du territoire dans les essais cliniques pilotés par l’IGR. En 2022, l’Institut du cancer a notamment participé au programme « prism portal », mis en œuvre avec le CHPF et dont l’objectif était de procéder à des analyses génétiques sur des échantillons de sang collectés sur des patients pris en charge par le CHPF. Dans un second temps, l’Institut du cancer prévoit de promouvoir directement des essais cliniques.

Cette mission d’envergure et importante se poursuit-elle ?

Il est de notoriété publique que le CHPF peine à recruter et pérenniser les oncologues au sein de ses services. L’ICPF a également été créé afin de rendre attractif la filière par les missions dont elle a la charge.

L’activité de recherche est bénéfique et nécessaire à l’attractivité de toute la filière : les oncologues spécialistes d’organes, les oncologues polyvalents, ainsi que les professionnels de la radiothérapie et de l’anatomopathologie.

Dans un contexte où le CHPF connaît des difficultés pour maintenir un effectif suffisant de médecins spécialisés en cancérologie, la recherche clinique représente un élément d’attractivité.

L’Institut du Cancer est-il doté budgétairement pour procéder aux recrutements de ces spécialistes qui désertent le CHPF ?

Depuis son entrée en activité, l’Institut du cancer organise la logistique et la mise en œuvre des réunions de concertation pluridisciplinaires d’oncologie en Polynésie française (RCP), avec l’Institut Gustave Roussy. Leur fonctionnement a été fixé sur la base des recommandations du réseau des centres de lutte contre le cancer (Unicancer) et de l’institut national du cancer. Ces réunions permettent de définir un projet personnalisé de soins qui est ensuite communiqué au patient dont l’objectif est de lutter contre la perte de chance des patients atteints de cancer. Il en est de même avec les réunions du Pacifique, Nouvelle Calédonie et Polynésie française. Ces réunions présentent un bilan positif ; l’institut du cancer estime en effet que pour les deux territoires de la Polynésie française et de la Nouvelle Calédonie, entre 69 % et 85 % des cas discutés dans cette instance auraient été orienté vers une évacuation sanitaire en l’absence de ce dispositif.

Pour ce qui concerne le service d’imagerie, le CHPF dispose du plateau technique le plus complet de la Polynésie française pour assurer la prise en charge des patients externes, des urgences et des hospitalisés. Ce plateau est notamment composé de deux scanners dédiés à l’imagerie, d’un appareil d’imagerie à résonnance magnétique (IRM) et d’un appareil de tomographie par émission de positon (TEP scan). Le TEP scan permet d’améliorer la prise en charge diagnostique et offre une plus grande qualité que les autres équipements dans le suivi de l’évolution de la maladie. Il apporte également plus de précisions dans la localisation qui sera concernée par la radiothérapie. En outre, le couplage du TEP scan avec un cyclotron, tel que cela est prévu en 2027 selon le ministre de la Santé, améliorera la qualité du diagnostic et l’orientation thérapeutique des patients. À ce jour, seul le TEP Scan a été livré et installé dans les locaux du CHPF. Sa mise en service est prévue avant la fin de l’année 2024.

Monsieur le ministre, dans votre réponse en date du 12 octobre 2023 à ma question orale concernant le bâtiment de l’ICPF et l’installation du Cyclotron, vous répondiez ceci : « Le projet de construction de l’ICPF est né de la nécessité de restructurer la cancérologie en Polynésie française afin de mieux répondre aux besoins croissants en oncologie. Le choix de relocaliser le projet sur le site du Centre 15, attenant au CHPF, a été motivé par des considérations budgétaires et logistiques. De plus, le cyclotron, un équipement essentiel pour les examens TEP scan, peut être installé plus facilement sur le site du Centre 15 en raison de sa structure existante et de sa conception adaptée à cette technologie. La réhabilitation du Centre 15 nécessitera moins de temps que la construction d’un nouveau bâtiment. Nous prévoyons que la réhabilitation du Centre 15 débutera en 2024, avec une finalisation prévue en 2025. »

Nous y sommes, mais ne voyant toujours rien venir, je vous interroge sur le délai d’installation du cyclotron dans le bâtiment de l’ICPF du C15 en 2025, plutôt que sur le site de princesse Heiata, dont je vous rappelle que l’architecte avait été choisi après concours et prêt en 2023 à lancer les travaux. Le bâtiment premier destiné aux logements du service nucléaire incluant le cyclotron serait aujourd’hui terminé si vous aviez poursuivi les travaux. Cependant, je viens de vous entendre dire que le cyclotron ne sera effectif qu’en 2027.

En complément de l’imagerie, l’activité d’anatomopathologie est essentielle dans le diagnostic du cancer, notamment pour l’interprétation des biopsies ou des frottis. Au premier semestre 2024, seul le centre hospitalier de la Polynésie française réalise la permanence des soins dans ce domaine. Son laboratoire réalise les analyses d’anatomopathologie tant pour le compte de ses patients que pour ceux des autres établissements et des services de la Direction de la santé. Cependant, ce laboratoire est installé dans des locaux étroits au CHPF qui compliquent son fonctionnement. En outre, l’établissement ne dispose que de deux médecins dans cette spécialité. Les prélèvements qui ne peuvent être traités par le laboratoire du CHPF sont envoyés par les cliniques ou par l’intermédiaire du laboratoire Louis Malardé, directement en France hexagonale pour interprétation. En application du plan cancer, le ministère de la santé a lancé en 2020 les premières études pour construire et installer un laboratoire public unique consacré exclusivement à l’anatomopathologie. Cette activité a été inscrite dans les missions de l’Institut du Cancer dont le laboratoire est parti intégrante de son patrimoine.

Le bâtiment été livré au début de l’année 2024 et le laboratoire devrait entrer en fonctionnement au début de l’année 2025. Le laboratoire d’anapath de l’Institut du Cancer offrira la possibilité de réaliser des analyses pour le compte des États voisins (Fidji, Samoa, Tonga...). Il facilitera également la mise en œuvre de travaux communs avec la Nouvelle-Calédonie, notamment dans le domaine de la recherche clinique par l’inclusion d’un plus grand nombre d’échantillons prélevés sur les patients.

Pour rappel le laboratoire d’anapath devait s’ouvrir fin 2024 mais le financement des matériels spécifiques pour équiper le labo n’ayant été octroyé dans un collectif qu’au second trimestre 2024, les matériels n’ont pu être commandés qu’en juillet et arriveront au 1er trimestre 2025 ! Dans l’attente la majorité des examens continuent à être expédiés en France et les pertes de chance pour nos patients encore d’actualité !

La prise en charge des cancers représentait près de 30 % des crédits d’assurance maladie consacrés aux longues maladies, soit 12,5 Milliards F CFP en 2022. Dans cet ensemble, en contrepartie d’une réduction de 20 % des crédits consacrés aux évasan entre 2018 et 2022, celui consacré aux molécules onéreuses présentait une croissance de 70 % et s’élevait à 3,6 Milliards F CFP en 2022. La CTC conclut que cette situation doit conduire le Pays à mieux réguler les prescriptions des médicaments les plus coûteux, tout en préservant la qualité et la sécurité des soins. En effet les molécules onéreuses dont le coût a un impact sur leur accessibilité permettent de traiter efficacement plusieurs types de cancers.

Voici chers collègues résumés en quelques lignes le rapport de la CTC dont il faut souligner la qualité de ses observations et ses critiques. Je retiens que la création de l’ICPF était une nécessité pour une coordination de qualité des soins, pour l’attractivité médicale des professionnels en cancérologie et le rayonnement de la Polynésie dans le Pacifique.

Il s’agit maintenant d’avancer plus vite, le temps en matière de prise en charge des patients atteints de cancer est compté et nous en avons déjà beaucoup perdu par des tergiversations de décisions marquant le manque de clarté et de détermination face au cancer.

Merci de votre attention.

Le président : Merci.

Monsieur le ministre, pas d’intervention ?

M. Cédric Mercadal : Je vais répondre un peu à chacune de vos questions et de vos interventions.

En ce qui concerne le bilan, déjà je vais parler des recommandations. Le bilan, il sera effectif au premier trimestre 2025.

En ce qui concerne le plan d’action, il sera bien livré et il sera réalisé en collaboration avec l’INCA, Gustave Roussy et l’ARASS pour fin 2025, et ils seront alignés avec le plan national qui est le plan 4 « cancer » qui permettra de modéliser cela, pour des soins qui seront réalisés au niveau de nos archipels. Parce qu’il faut viser une déconcentration du soin de chimiothérapie pour qu’on soit au plus près de chez soi et bénéficier de ces traitements. Mais ce qui veut dire aussi de la formation et développer un réseau, parce que c’est le réseau qui doit être développé pour permettre ces soins au plus près de la population.

En ce qui concerne les opérateurs, je préfère vous informer de suite qu’une COS, une commission d’organisation sanitaire, doit être réalisée afin de déterminer qui pourra obtenir plus de lits ou pouvoir faire de la chimiothérapie dans un cadre public et dans un cadre privé. Un certain nombre de lits sont déterminés dans le cadre de cette low cost, pour permettre cette activité. Et la COM de la CPS sera étendue au privé puisqu’aujourd’hui elle n’est que dans le cadre public, afin de permettre aussi que la chimiothérapie soit réalisée et prise en compte via les molécules onéreuses dans le secteur privé.

La partie chimiothérapie, oui, elle est dans les îles et à Taravao. On sait que tous les mardis on voit des intervenants privés qui vont à Taravao pour collaborer à la chimiothérapie et des oncologues.

Le coût de l’oncologie, vous l’avez tous souligné, et l’ICPF est là aussi. Et comme je l’ai dit tantôt, l’objectif est que l’ICPF devienne le moteur du soin sur la partie oncologie dans notre pays, et je ne le cache pas, et ça va pour l’anatomocytopathologie aussi, qui ouvrira en mai. Il n’y a pas de tergiversation, il y a juste des délais de traitement et des conventions qui étaient à revoir parce que des montages avaient été faits, ou un petit peu de financement à l’ILM, un petit peu au CHPF et un petit peu à l’ICPF, faisait qu’il y avait un imbroglio juridique à régler, ce que nous avons fait et réussi à faire ces derniers mois, parce que sinon, nous n’obtenions pas les remboursements de l’État. Donc la tergiversation, elle était dans le montage initial.

Pour le reste, je remercie quand même l’ensemble des acteurs d’être intervenus dans le cadre de la constitution de cet établissement qui est l’ICPF, parce qu’il va nous permettre d’établir ce plan cancer sur plusieurs années. Et ce rapport démontre bien que les actions devaient être menées, concentrées et revues au regard du dépistage. Je préfère indiquer dès aujourd’hui que le dépistage, la CPS a un fonds de prévention et que je demanderai à la CPS d’intervenir à un moment ou un autre, une fois le plan de cancer établi, sur le financement d’une partie des dépistages.

Qu’est-ce qu’il y avait d’autre ? Cathy, tu en as dit tellement puisque tu as résumé le rapport de la CTC, mais je trouve qu’il est très, très bien fait, lui aussi. On a vraiment travaillé de concert avec eux et répondu à l’ensemble de leurs questions et on les a rassurés sur la partie du soin.

L’oncologie coûte cher, les oncologues coûtent cher et il va falloir investir sur nos oncologues. Clairement, on ne peut pas s’en passer. La Calédonie a fait venir des oncologues italiens parce que le coût des évasans en Australie avoisinait les 4,5 milliards, pour répondre à cette problématique. Il faudra donc éviter ces coûts parce qu’investir dans des oncologues sur place nous évitera des coûts d’évasan exorbitants. Au-delà des coûts, c’est des familles et des refus de soins qu’on évitera. Il y a des familles qui ne vont pas se faire soigner parce que c’est loin et qui ne veulent pas être détachées d’eux. Il y a des déchirements familiaux qui se créent et des pertes de chances qui se créent parce qu’on va trop loin. Et donc l’ICPF est une nécessité, l’oncologie sur place est nécessaire, donc il faudra investir dans cela. Mais je le rappelle, ça sera à l’issue de la COS.

Pour le plan pluriannuel de cancer, il ne faut pas qu’il se limite à cinq ans. Le seul problème, c’est que tous les plans ont été faits la même année. On se retrouve avec 10 plans à refaire parce qu’ils couvrent le quinquennat et donc l’activité même d’un gouvernement. Il faudra aller plus loin, faire des plans plus décennaux sur certaines activités, afin de permettre de les revisiter à mi-parcours et surtout de permettre une longévité des programmations budgétaires, puisque nous allons entrer à une longévité des programmations.

L’investissement sur un cyclotron c’est plusieurs dizaines d’années, c’est pour 50 ans qu’il faudra avoir ce type d’appareillage. Donc c’est nécessaire de faire des plans à 10 ans. Et on les fera, comme je te l’ai dit, avec d’autres acteurs et on vous y associera, bien sûr, c’est nécessaire. La recherche sera le moteur de l’oncologie en Polynésie et oui, ça sera un autre modèle de financement que nous rechercherons. Parce que développer l’ICPF dans une vision régionale permettra de faire venir nos partenaires, et on voit bien que c’est le modèle qu’a adopté l’IGR et ça paye une partie de son business plan. Donc on ira vers cela en permettant de faire des soins pour l’étranger, localement et qui amortiront le coup de nos matériels sur lesquels nous avons investis.

J’espère avoir répondu à l’ensemble de vos questions parce que c’était plus des remarques pertinentes de chacun d’entre vous, mais qui reprennent ce rapport. Et je remercie ma présidente de la commission qui a fait un travail attentif sur ce rapport et je la sais ô combien impliqué dans le suivi des recommandations. Donc on travaillera avec la commission de manière efficace et transparente.

Je vous remercie.

Le président : Merci.

Dernière intervention.

Mme Nicole Sanquer : Oui Monsieur le ministre, une dernière question par rapport — vous allez dire « mais elle insiste », mais j’aime bien comprendre les choses… Je reviens encore, puisqu’on est encore dans le cadre du plan cancer, de la lutte contre le cancer, je voudrais comprendre pourquoi les dépistages comme vous avez indiqué par les intermédiaires, sont imputés au budget de l’Institut du cancer, alors que normalement, tout ce qui est dépenses sur les dépistages, ça doit être imputé à la PSG, non ? Non. Alors expliquez-moi.

M. Cédric Mercadal : Là, en principe, — et c’est dans les textes, tout ce qui est prêt, il faudra faire évoluer nos textes là-dessus —, tout ce qui est soins, c’est de la PSG ; tout ce qui est prévention, en principe, c’est le programme de prévention. Il faudra faire évoluer nos textes dans les conditions de prise en charge pour que tous ces actes de prévention soient pris en charge aussi au niveau de la PSG. C’est de ça dont on parlait. Il y a des actes qui sont hors plan, qui sont pris en charge, on va parler de… aujourd’hui, quand on fait une — comment dire ?... Il y a des accords qui ont été passés entre la CPS et la Direction de la santé depuis le plan cancer, sur la prise en charge, par exemple, des dépistages du cancer de l’utérus et tout ce qu’il y a, une année c’est la CPS pour une partie des soins, l’autre année, donc, tous les deux ans c’est le dépistage fait par l’ADS, et les années entre, c’est la CPS qui prend en charge. Elle le prend en charge sur son fonds de prévention. Il faudra développer l’enveloppe du fonds de prévention pour pouvoir répondre à la demande demain via la PSG, c’est une question budgétaire.

Le président : Merci.

Mme Nicole Sanquer : Donc, vous dites que la PSG ne prend pas compte les dépenses de prévention ? C’est ce que vous êtes en train de dire ?

M. Cédric Mercadal : Elle a limité le cadre de ces enveloppes, il faudra les élargir dans le cadre de la PSG.

Mme Nicole Sanquer : Qui a limité ?

M. Cédric Mercadal : C’est le coût… Les anciens gouvernements à chaque fois qu’on a fait des lettres de cadrage, ça a été comme ça depuis des années. Le coût de la prévention est limité dans la prise en charge. Je ne suis pas responsable des anciennes lettres de cadrage, clairement. Celle de l’an dernier a été réitérée parce qu’elle était octroyée sur des programmes en cours, et il faudra revoir cela. Je n’ai pas de souci avec ça.



Les rapports peuvent être consultés sur le site internet de l’assemblée de la Polynésie française à l’adresse www.assemblee.pf
Les interventions en langues polynésiennes ont fait l’objet d’une traduction surlignée en gris.

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