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Rapport n° 108-2024 relatif à l'avis de l'assemblée de la Polynésie française sur le projet de décret fixant pour les années 2022 et 2024 la quote-part des ressources du budget de la Polynésie française destinée à alimenter le fonds intercommunal de péréquation

Paru in extenso au JOPF n° 24 NA du 06/01/2025 à la page 185

Rapport n° 108-2024 relatif à l’avis de l’assemblée de la Polynésie française sur le projet de décret fixant pour les années 2022 et 2024 la quote-part des ressources du budget de la Polynésie française destinée à alimenter le fonds intercommunal de péréquation


Présenté par Monsieur le représentant Tematai Le Gayic

Le président : Je vous propose de vous reporter au rapport 108-2024 relatif à l’avis de l’assemblée sur le projet de décret fixant pour les années 2022-2024 la quote-part des ressources du budget de la Polynésie destinée à alimenter le FIP.

Donc j’invite le rapporteur du rapport de présentation, Tematai Le Gayic, à prendre la parole.

M. Tematai Le Gayic : Merci, Monsieur le Président.

Monsieur le Président du Pays, Madame la vice-présidente, Mesdames, Messieurs les ministres, chers collègues, bonjour.

Le fonds intercommunal de péréquation est une ressource essentielle pour nos communes dont la gestion est pilotée par le comité des finances locales. En l’absence de fiscalité propre, nos communes, par le FIP, reçoivent une quote-part fixée par décret qui ne peut être inférieure à 15 % de l’ensemble des recettes fiscales du Pays, comme le prévoit notre statut à l’article 62.

Le FIP permet de financer le budget de fonctionnement, le budget d’investissement et des projets précis pour lesquels les communes déposent des dossiers chaque année. Lors du dernier comité des finances locales, qui s’est tenu à la Présidence de la Polynésie le 29 février dernier, pour la partie dotation affectée, 85 nouvelles opérations ont été programmées pour un montant total de 2,5 milliards F CFP, soit une hausse de 345 millions de francs par rapport à la programmation de 2023. Voici quelques exemples :

– Rénovation du réseau d’adduction et de distribution d’eau potable dans la vallée de Onohea, sur Hitia'a o te Ra, coût : 309 millions F CFP ;

– Rénovation du réseau d’adduction et distribution d’eau potable de la commune de Taputapuatea : 149 millions F CFP ;

– Rénovation des sanitaires scolaires de Haakuti et de Hakahetau dans la commune de Ua Pou : 48,5 millions F CFP ;

– Acquisition de deux véhicules sanitaires tout-terrain pour le centre d’incendie et de secours des communes associées de Takapoto et Takaroa : 21,9 millions F CFP ;

– Remplacement de la sirène d’alerte tsunami sur Rurutu : 2,3 millions F CFP.

Pour l’année 2022, le décret initial avait fixé une assiette provisoire à 98,8 milliards F CFP mais grâce à une forte croissance des recettes fiscales, cette assiette a été réévaluée à 113,2 milliards F CFP, augmentant ainsi la contribution de notre Pays au FIP à hauteur de 19,2 milliards F CFP.

Pour l’année 2024, le projet de décret propose de maintenir la quote-part à 17 %, avec une assiette provisoire de 118,1 milliards F CFP, ce qui portera la contribution du Pays au FIP à 20 milliards F CFP.

Plusieurs rapports de l’Assemblée nationale, du Sénat, ainsi que des résolutions du Congrès des communes du SPCPF ont régulièrement interpellé nos institutions afin de renforcer l’accompagnement de nos communes. Ces voix soulignent que les capacités financières ne sont pas le seul obstacle. La répartition actuelle des compétences entre la Polynésie et les communes crée également des freins à l’intelligibilité de l’action publique, rendant plus difficile son adaptation aux spécificités de chaque commune.

Le gouvernement a déjà entamé des démarches significatives, comme la création d’un comité de réflexion pour l’avenir statutaire de l’archipel des Marquises, ou l’évaluation du transfert de la gestion des déchets des communes vers le Pays. Ces initiatives, ainsi que l’étude du partage des compétences de proximité et d’action sociale en faveur des communes sont des étapes importantes. Elles doivent s’inscrire dans une réforme globale et des relations entre les communes, le Pays et les nouvelles entités telles que les intercommunalités qui répondent aux besoins de convergence des financements et des services. Une réforme qui doit être inscrite dans les priorités de notre gouvernement.

Ainsi, Monsieur le président, réuni le 15 octobre dernier, la commission des finances nous propose d’émettre un avis favorable au projet de décret ci-dessous.

Merci.

Le président : Merci. Pour la discussion générale, la conférence des présidents a prévu un temps de parole de 60 minutes, réparti à raison de 36 minutes pour le Tavini, 15 minutes pour le Tapura, 9 minutes pour les non-inscrits.

J’invite l’intervenant du groupe Tavini huiraatira à prendre la parole.

M. Bruno Flores : Merci, président.

Monsieur le Président de la Polynésie, Madame la vice-présidente, chers ministres, chers élus, à toutes et à tous, bonjour.

Chaque année, nous abordons une question essentielle pour les élus locaux et les habitants de nos communes : le FIP (Fonds intercommunal de péréquation), ce fonds est un pilier fondamental de nos collectivités permettant de financer des projets vitaux et de maintenir les services publics locaux dont dépend de notre population.

1. L’importance du FIP pour nos communes.

Créé en 1971, le FIP représente le cœur du financement pour les communes de Polynésie française. Il permet de financer non seulement les dotations de fonctionnement, mais aussi de soutenir des projets d’investissement structurants.

Sans une fiscalité locale suffisamment développée, il joue un rôle central en garantissant les dotations de fonctionnement et d’investissement. Sans le FIP, bon nombre de projets d’infrastructures ou de services publics de proximité n’auraient jamais vu le jour.

2. Une contribution déséquilibrée entre l’État et le Pays.

Nous constatons aujourd’hui un déséquilibre persistant dans la répartition des contributions entre l’État et le Pays.

Pour l’année 2022, le Pays a contribué à hauteur de plus de 19 milliards F CFP alors que la contribution de l’État s’est limitée à plus de 1 milliard F CFP seulement. Cette inégalité financière est difficile à justifier, d’autant que l’État exerce une tutelle sur nos communes. Bien que l’État puisse argumenter qu’il contribue par d’autres mécanismes, cette réponse semble insuffisante face aux difficultés budgétaires de nos communes.

Je tiens à rappeler que le pays a mis en place la DDC (Délégation au développement des communes) pour participer au développement des communes, un service qui joue un rôle essentiel en matière d’investissement en venant compenser les carences de l’État. Cette délégation au développement des communes a prouvé son efficacité en appuyant de nombreux projets au bénéfice des collectivités, mais cela nous amène à poser une question fondamentale : est-il réellement du devoir du Pays de pallier ainsi les insuffisances de l’État ? Nos ressources étant limitées, cette charge financière ne devrait-elle pas être partagée de manière plus équitable ?

3. Les effets concrets de cette situation pour nos communes.

Cette disparité dans les contributions a des répercussions réelles. Par exemple, le respect du code des collectivités territoriales impose aux communes des obligations strictes en matière d’assainissement et de traitement des déchets. Cependant, nombre de communes n’ont pas les moyens financiers pour répondre à ces exigences, ce qui entraîne des reports répétitifs et des contraintes qui ralentissent leur développement. Cela révèle clairement les limites de notre autonomie qui restent largement symboliques face aux contrôles exercés par l’État.

En 2024, la contribution prévisionnelle du Pays au FIP atteindra plus de 20 milliards F CFP. Il faudra que l’État renforce sa participation, sinon nos communes continueront de porter un fardeau disproportionné, limitant leur capacité à offrir des services de qualité à nos concitoyens.

4. Une réforme nécessaire pour le FIP.

Face à cette situation, il est essentiel d’agir Je propose que nous mobilisions nos efforts pour réformer le financement du FIP en visant les objectifs suivants :

 Demander une augmentation significative de la contribution de l’État, alignée sur son rôle de tutelle ;

 Encourager une révision législative pour renforcer la voix du Pays dans la gestion du comité des finances locales ;

 Initier un dialogue avec nos représentants au niveau national afin de porter cette réforme et obtenir des résultats tangibles.

5. Conclusion : Agir pour l’avenir de nos communes.

Ce projet de décret fixe des contributions qui, certes, soutiendront nos communes pour les années 2022 et 2024, mais il ne résout pas le problème de fonds : l’équité dans la répartition des charges entre l’État et le Pays. C’est notre responsabilité de garantir un avenir solide à nos communes afin qu’elles disposent des ressources nécessaires pour assurer leur développement.

Nos communes méritent un soutien équitable, et il est de notre devoir de nous mobiliser pour cela. Nos communes méritent mieux, et nos concitoyens attendent de nous que nous agissions.

Merci de votre attention. Que l’amour règne.

Le président : Merci bien. J’invite maintenant l’intervenant des non-inscrits.

M. Nuihau Laurey : Merci, Monsieur le président.

Comme l’a dit mon collègue, c’est un sujet qui revient chaque année sur la table de l’assemblée et finalement pour lequel il n’y a plus aucun débat. On donne un avis favorable à cette fixation à 17 % du taux de prélèvement des recettes fiscales pour alimenter le FIP. Mais ça n’est pas un chiffre magique, il peut être modifié à la hausse comme à la baisse. Et pour notre part, nous avons depuis longtemps souhaité qu’il y ait une réflexion sur ce sujet, sur le financement des compétences dévolues aux communes, qui ont une exigence de la part de leurs administrés en termes d’infrastructures publiques, qui coûtent beaucoup d’argent.

Alors, c’est vrai que le dispositif actuel permet d’accompagner finalement la progression de la croissance économique du Pays et de l’inflation, puisqu’il y a une évolution naturelle qui se fait en fonction de l’évolution des recettes fiscales. Mais de ce point de vue, je sais que le président du Tavini, à plusieurs reprises, a évoqué la possibilité de monter à 25 % le taux du prélèvement du FIP. Donc, sans aller jusque-là, je pense qu’il n’y a pas d’interdiction à ce que ce chiffre soit discuté et éventuellement réactualisé. Nous avions nous-mêmes proposé lors de la dernière campagne électorale qu’il y ait finalement une augmentation à due concurrence de la baisse que nous avions proposée des dotations affectées à la DDC, pour donner en fin de compte plus de transparence dans l’affectation des ressources aux différentes communes qui passerait par le comité des finances locales, au lieu d’être finalement à la discrétion du gouvernement et du Président pour éventuellement récompenser tel ou tel maire, et donc ça participait de cette démarche.

Après, il y a un deuxième sujet aussi qu’on doit évoquer en même temps que celui de la fixation du taux de prélèvement pour l’alimentation du FIP, c’est celui de la fiscalité communale, qui est quand même un dossier ancien. Je me souviens avoir moi-même, avec Monsieur le ministre de l’économie, évoqué avec les maires aussi ce sujet de la mise en place d’une fiscalité communale depuis longtemps déjà. Et on le voit, qu’à l’échelle d’une collectivité comme la nôtre, éclatée, ce n’est pas forcément une bonne idée, dans la mesure où imaginer que chaque commune mette en œuvre ses dispositions, ses ressources pour collecter de l’impôt, les maires eux-mêmes n’y sont pas particulièrement favorables, même s’il y a depuis longtemps une demande pour aller dans le sens de la création d’une fiscalité communale. Et lorsque l’on réfléchit bien en termes d’économie, pour éviter de dupliquer à l’infini des systèmes de collecte qui de toute manière ne marcheront pas, le système de prélèvement du FIP paraît être le plus adapté. Mais pour cela, il faut qu’il y ait un vrai débat, une vraie réflexion sur les montants, sur la transparence du dispositif. Alors elle est effectivement actée, s’agissant de FIP, puisque c’est un comité de finances local qui comprend les maires, le Président du Pays et le haut-commissaire, qui définit finalement les arbitrages et la répartition de cette enveloppe dans le cadre de critères qui ont été fixés par les maires eux-mêmes. Donc de notre point de vue, c’est quand même le dispositif le plus transparent, le plus ouvert et le moins politisé, on va dire. D’où notre proposition d’ouvrir ce débat, bien évidemment avec les maires, sur la possibilité de moduler ce taux de prélèvement pour peu que les ressources affectées, comme je le disais à la DDC, soient baissées à due concurrence finalement du prélèvement additionnel qui serait fait sur les recettes fiscales du Pays.

Et puis il y a un dernier point aussi qu’il ne faut jamais oublier, c’est que oui, le montant du FIP est taxé, est basé sur les recettes fiscales que le Pays collecte, mais le Pays a la capacité finalement, au travers d’une forme d’évasion fiscale, de retirer une partie de ces recettes qui sont directement versées dans des comptes spéciaux et qui n’apparaissent pas finalement dans le calcul effectif du FIP. Et dans une période récente, j’y ai participé moi-même, il y a eu une forme d’inflation des comptes spéciaux qui ont conduit à une baisse de l’assiette et donc des recettes affectées aux communes. C’est aussi un sujet, je pense, qu’il faut traiter dans le cadre de ce débat.

En tout cas, nous, on souhaite que ce débat sur le taux de prélèvement du FIP ne se résume pas à un avis favorable qui est donné plus par habitude que par conviction. Nous voterons, ceci dit, en faveur de ce dispositif dans la mesure où aucune réflexion n’a été menée sur ce point jusqu’à présent.

Merci.

Le président : Merci. J’invite maintenant le représentant du Tavini à prendre la parole. Ça y est ?... Ah ! Donc, il reste le Tapura alors. Joëlle.

Mme Joëlle Frebault : Merci, Monsieur le président.

Monsieur le Président du pays, Monsieur le président de l’assemblée, chers ministres, à toutes et à tous, recevez mes chaleureuses salutations à l’occasion de notre rencontre en cet après-midi.

Même si les montants financiers évoqués dans ce projet de décret fixant la quote-part des ressources du budget de la Polynésie française destinée à alimenter le fonds intercommunal de péréquation pour les années 2022 et 2024 ne constituent pas vraiment une surprise, c’est quand même une bonne nouvelle pour nos maires !

Ne serait-ce que pour 2022, il convient ici de saluer l’importance du différentiel : 2 784 993 165 F CFP, somme additionnelle qui va pouvoir être redistribuée au service de tous nos compatriotes, en fonctionnement comme en investissement. Au total, la contribution du Pays au FIP représente ainsi un peu plus de 19 251 000 000.

Au sortir de cette longue et terrible crise du Covid-19 qui a impacté toutes les économies mondiales, encore faut-il rappeler ici que la Polynésie française, grâce aux mesures de soutien déployées auprès des entreprises comme des salariés par l’État et le Pays, a non seulement bien résisté mais surtout, il s’en est suivi un rebond en termes de consommation des ménages que nous constatons tous aujourd’hui. Aussi, déjà à l’époque, le Président Fritch aurait également pu dire que « tout va bien mieux ».

S’agissant de la dotation du Pays au FIP 2024, la même tendance semble se confirmer. En effet, l’assiette provisoire de calcul table aujourd’hui sur un montant de plus de 118 milliards F CFP après déductions, soit 20 milliards de plus qu’en 2022. Preuve, s’il en est encore besoin, que l’inflation qui a démarré avec le début des hostilités en Ukraine, si elle a fragilisé les ménages les moins aisés, a grandement abondé les caisses du Pays.

Raison pour laquelle, dans un contexte aussi favorable, ne serait-il pas temps de libérer les communes de leurs contraintes budgétaires en leur apportant un véritable bol d’air ? Ne serait-ce que pour leur permettre d’assumer leurs obligations en matière de traitement des déchets ménagers dont vous reconnaissez vous-même qu’elles n’ont pas les moyens d’assumer cette compétence.

En d’autres termes et sans aucun esprit polémique, mes chers collègues, qu’attendez-vous pour concrétiser les engagements du Tavini huiraatira et de son leader, notre maire de Faa’a Oscar Temaru ? Lui qui, le 19 février 2018, quelques mois avant les Territoriales, se félicitait d’avoir réhaussé à 17 % le taux du FIP durant le premier Taui, en 2006 très exactement, avant d’ajouter — et je le cite : « Si nous étions restés aux affaires du Pays plus longtemps, on serait remonté à 20 % pour terminer à 25 %. Et cela fait partie de notre programme pour les élections de 2018 ». Les électeurs donc ne lui ont pas donné cette opportunité…

Permettez-moi d’ouvrir une parenthèse sur les aides à accorder aux communes que vous évoquez dans le document d’orientation budgétaire que nous venons d’étudier. En effet, vous avez le projet d’octroyer des aides aux communes dans des secteurs considérés comme prioritaires, tels que l’éducation primaire, la culture, le tourisme et le numérique, soulèvent des questions cruciales en matière de compétence.

En effet, sauf erreur d’interprétation, ces secteurs ne relèvent pas des prérogatives communales. Cela pose un problème juridique de fond : le Pays ne peut, en l’état actuel des choses, accorder des subventions à des communes pour des secteurs qui ne sont pas de leur ressort légal et, réciproquement, les communes ne sont pas habilitées à recevoir des subventions pour des domaines qui ne relèvent pas de leur compétence directe.

Par ailleurs, ce projet de décret nous amène, une fois de plus, à nous interroger sur la participation de l’État qui — est-il besoin de le rappeler ici — a la compétence des communes.

Il y a certes une subvention annuelle dite « quote-part État», dont le montant évolue chaque année comme la dotation globale de fonctionnement allouée aux communes au plan national ; puis la dotation territoriale pour l’investissement des communes, affectée au financement des projets des communes et de leurs établissements en matière de traitement des déchets, d’adduction d’eau, d’assainissement des eaux usées, d’adaptation ou d’atténuation face aux effets du changement climatique, et des projets de constructions scolaires préélémentaires et élémentaires. Son montant est fixé annuellement par la loi de finances. Mais en réalité, nous sommes bien loin d’une parité espérée en pareil cas.

Mais que la Nation française, confrontée par ailleurs à des difficultés budgétaires d’une ampleur inégalée, se rassure ! Puisque le gouvernement Brotherson a l’intention de « réactiver le système immunitaire de notre économie restée trop longtemps sous perfusion », pour reprendre l’expression employée par la ministre de la fonction publique, Madame Crolas, durant le conflit à la Direction des transports terrestres et que donc, à terme, nous devrions être en mesure de pallier les transferts de l’État — ce qui représente quand même la bagatelle de 200 milliards par an. Je forme le vœu que les communes continuent de disposer des moyens suffisants propres à leur développement.

Merci de votre attention.

Le président : Merci. J’invite le gouvernement à répondre aux interventions.

M. Warren Dexter : Merci à tous pour vos interventions.

Alors, c’est vrai que la modification du taux du FIP est un sujet récurrent. Néanmoins c’est un sujet compliqué parce qu’en fait, il y a plusieurs paramètres qui sont contradictoires — vous l’avez d’ailleurs évoqué dans vos interventions. D’abord, augmenter le FIP, on aurait tendance à dire que oui, puisqu’un engagement électoral de la majorité là-dessus a porté le FIP à 25 %. Mais à côté de ça, si on augmente le taux du FIP à 25 %, pour moi, il me semble que ça handicape les possibilités de développement de la fiscalité communale, parce qu’on ne peut pas avoir les deux en même temps, ça va trop augmenter la pression fiscale si on dit on augmente le FIP et, en même temps, on augmente la fiscalité communale. Effectivement, comme vous l’avez dit, je crois qu’il y aura besoin de concertation, qu’on discute bien entre nous de ce qu’on veut.

Et puis aussi les paramètres contraires, plutôt diminuer le taux du FIP parce que les rendements fiscaux sont excellents et peut-être parce qu’aussi, là, du coup, on pourrait développer la fiscalité communale comme contrepartie à l’abaissement du taux du FIP. Et moi, je pense que c’est volontairement que l’État met une toute petite contribution dans ce FIP parce qu’il veut nous obliger à développer la fiscalité communale depuis le début. Dans ce statut de 2004, il a mis en place cet article 53 pour obliger le Pays à mettre en place une fiscalité au profit des communes. C’est-à-dire que, il sait que s’il doit mettre de l’argent dans le FIP au niveau de la contribution du Pays, il sait que ça va réduire à néant toute possibilité de développer la fiscalité communale.

Et puis un autre sujet aussi, vous savez qu’il y a une étude en cours menée par la Direction de l’environnement, c’est la reprise par le Pays de la compétence déchets. Est-ce que ça veut dire que le pays reprenne en charge des compétences et, à côté de ça, augmente le taux du FIP ? Vous voyez, il y a plein de questionnements qui font que, pour l’instant, ce ne sont pas des sujets faciles. Moi, ce que je retiens aujourd’hui, c’est qu’en tout cas, pour l’instant, on peut se contenter du dispositif actuel grâce au bon rendement des impôts. Grâce à ça, vous pouvez le voir sur le dossier d’aujourd’hui, vous avez eu plus de 2 milliards de régularisation du FIP 2022 parce que les bases de calcul ont été insuffisantes en 2022. On avait évalué une base de calcul à 98 milliards de rendements fiscaux alors qu’en réalité, le compte administratif 2022 a abouti à 113 milliards. Donc il y a un sacré gap.

Merci.

Le président : Merci.

Nous passons maintenant à l’examen de l’avis.

La discussion est ouverte. Nuihau.

M. Nuihau Laurey : Oui, j’ai bien compris l’intervention du ministre

Concernant l’État qui souhaiterait appliquer en Polynésie un dispositif de fiscalité qui est celui de la métropole, je pense que le seul examen des conditions dans lesquelles cela pourrait se déployer montre que ce n’est pas la solution. D’ailleurs, toutes les missions qui ont été diligentées dans le pays, que ce soit auprès du SPC ou du gouvernement, ont donné lieu à des propositions de fiscalité communale extrêmement limitées. Je pense à la taxe d’aéroport à Faaa, une taxe sur les chiens errants ou des choses comme ça. On voit bien qu’on est loin des montants qui sont concernés par le FIP.

Après, il y a eu une demande aussi concernant le transfert de l’impôt foncier aux communes. Et dès lors que le sujet du contrôle de l’assiette et de la capacité pour chaque conseil municipal à fixer lui-même son taux de prélèvement, çà, ça refroidissait tous les acteurs. Moi, ce que je dis, c’est qu’on tombe vite dans les habitudes. Et effectivement, Monsieur le ministre, vous avez raison, c’est tellement plus simple de faire comme on a toujours fait, on ne change pas, et puis 17, pourquoi pas ? Moi, je pense au contraire que c’est dans des moments comme celui-là, où la fiscalité est importante, où les recettes affectées au FIP sont importantes, qu’on peut changer les choses. Parce qu’on a vécu aussi des périodes où cette évolution était plutôt baissière, et donc là, ça empêchait même toute réflexion et toute discussion. Donc c’est dans des moments où la fiscalité est importante, et c’est ce qu’on voit dans les chiffres qui sont présentés, qu’on peut imaginer cette réflexion. Si on veut aller plus loin, justement, dans cette réflexion, — j’en ai parlé un peu — mais on peut aussi imaginer que ce relèvement du FIP, bien sûr pas à 25%, bien sûr de manière progressive, bien sûr en concertation avec les maires, on pourrait l’imaginer en alimentation d’une dotation qui serait utilisée potentiellement par l’ensemble des communes, et notamment celles qui ont des projets importants que ne permet pas au financement le FIP dans l’état actuel des choses. Donc ça permettrait de prioriser certains investissements importants, je pense notamment aux Marquises, quand il y a des routes à faire, c’est quand même difficile de faire du découpage, et en fin de compte, pour le Pays, c’est une dépense encore plus importante, donc on pourrait affecter au travers de ce fonds, ces financements. Et de manière plus générale, comme je le disais, pour moi, la chose la plus importante, le fait de retirer à due concurrence des sommes qui sont déployées par la DDC donnerait plus de transparence à l’utilisation des fonds qui, comme je le disais, sont discutés avec les maires dans le comité des finances locales. Et là, on lèverait finalement tout le soupçon de connivence politique qui pèse toujours sur le président, quelles que soient d’ailleurs les décisions qu’il prend vis-à-vis de telle ou telle commune.

Et encore une fois, Monsieur le ministre, je comprends que les habitudes ont la vie dure, mais comme je le disais encore une fois, c’est dans ces moments que la réforme est possible.

Le président : Plus d’intervention ? Oui, Tepuaraurii.

Mme Tepuaraurii Teriitahi : Merci Monsieur le président.

Madame la vice-présidente, Monsieur le ministre, Madame la ministre, mes chers collègues que je n’ai pas eu l’occasion de saluer, bonjour.

Juste une intervention pour réagir à ce que Monsieur le ministre vient de dire. Quand vous dites, Monsieur le ministre que la pression fiscale augmente si on augmente le taux du FIP, je ne suis pas tout à fait d’accord avec ce que vous dites, je ne suis même pas du tout d’accord, parce que lorsqu’on prélève les 17%, on ne les prélève pas sur les Polynésiens, on les prélève sur les recettes. Si là, au lieu de 17% prélevés sur les recettes, on prélève 25%, ça fait plus pour les communes, mais moins pour le Pays. Mais ça ne change absolument rien sur ce qui est fait peser à notre population. Par contre, si on modifie la fiscalité communale, qu’on rajoute de la fiscalité communale, là, oui, on augmente la pression fiscale, puisqu’on vient appliquer à la population des communes, à notre population, une nouvelle fiscalité, donc une nouvelle pression fiscale.

Après, c’est vrai que c’est quand même un sujet, puisque, pourquoi on réfléchit autour de la fiscalité communale ? On sait que nos communes cherchent des ressources et que ces ressources, là on les cherche en essayant de gratter un peu plus de FIP, en essayant de demander à juste titre à l’État, qui n’arrête pas de nous répéter, effectivement, qu’il nous donne par ailleurs avec la DETR et d’autres moyens, d’autres financements. Mais en attendant, effectivement, on a besoin de plus de financements, donc on se retourne un peu plus vers la fiscalité communale, mais si on pouvait s’en passer, évidemment, je pense que ce serait sympa, parce qu’effectivement, ça enlèverait un peu plus de pression fiscale sur nos populations.

Après, pour le transfert de compétences pour les déchets, le traitement des déchets, je pense que toutes les communes sont d’accord. D’ailleurs, quand le président du gouvernement les a interrogés, pas cette année, mais l’année dernière, lors du dernier congrès des communes qui était à Teahupoo, évidemment les maires ont tous, quasiment tous, peut-être 90% des maires, ont signé la lettre d’intention pour dire qu’ils étaient intéressés. Mais ils sont intéressés surtout si ça les décharge de la dépense, parce que si on ne modifie pas le FIP, que le Pays reprend la compétence de traitement des déchets, mais qu’on facture aux communes cette compétence, les communes finalement elles ne gagnent rien dans l’affaire. Parce que ce qui intéresse les communes de rendre ça au Pays, c’est d’alléger la facture qui aujourd’hui, est extrêmement lourde et qui n’arrête pas de grandir année par année dans nos budgets communaux. Donc à un moment donné, effectivement, il faut que les communes s’y retrouvent.

Tout ça pour dire que je ne suis pas trop d’accord quand vous parlez de pression fiscale supplémentaire si on change le taux. Le taux ne changera rien, il changera une chose : moins d’argent pour le pays, plus pour les communes et qui sauront très bien l’utiliser.

Merci.

Le président : Oui, Hina.

Mme Hinamoeura Morgant : Merci Monsieur le président.

Je vous remercie d’avoir donné un éclaircissement concernant la promesse d’augmenter à 25% le FIP. Maintenant, par rapport à une autre promesse qu’il y avait dans le programme c’est : quelle est la position du gouvernement pour supprimer la DDC ?

Le président : Il n’y a plus d’intervention au niveau de l’avis ? Warren ? Monsieur le ministre.

M. Warren Dexter : Juste pour répondre à la remarque de Tepuaraurii.

Un point de FIP, c’est à peu près 1,2 – 1,3 milliards F CFP. Ça veut dire que si vous augmentez le FIP à 18 %, ça veut dire que le Pays perd effectivement 1,2 – 1,3 milliards F CFP. Si on n’arrive pas à faire des économies qui sont chères au représentant Nuihau Laurey, ça veut dire qu’on est obligés d’augmenter les taxes du côté du Pays pour récupérer ce besoin de financement supplémentaire. Ça veut dire qu’indirectement, quand on augmente le taux du FIP, ça a bien un impact sur la pression fiscale puisque le Pays est obligé d’augmenter ses impôts pour maintenir ses besoins de financement.

Mme Vannina Crolas : Juste peut-être une précision par rapport à la question de Hinamoeura.

Notre Président s’est déjà exprimé à ce sujet. Il ne s’agit pas de supprimer la DDC telle quelle, mais par contre de revoir ses missions et qu’elle intervienne plus en accompagnement technique des communes, plus qu’un guichet financier qui pourrait effectivement être effectué par le CFL.

Et en matière de réforme du CFL, justement, je rappelle juste la résolution des maires à l’issue du congrès des communes de Tubuai, qui demandent justement qu’il y ait une table ronde État-Pays-communes sur non seulement la répétition des compétences, mais aussi le taux de prélèvement qui devrait être en lien avec la répartition des compétences, parce que les communes demandent à récupérer les compétences de proximité qui leur permettraient d’agir rapidement face aux problématiques que rencontre leur population.

Donc l’augmentation du taux de prélèvement serait liée à la répartition des compétences et à l’évaluation des charges qui en découleront.

Le président : Merci.

Nuihau.

M. Nuihau Laurey : Juste pour indiquer au ministre que si le fait d’augmenter d’un point de FIP, le taux de FIP, va conduire le Pays à faire des économies, à s’engager dans la voie des économies, moi je propose de monter à 25 % directement.

Le président : Merci.

Tematai.

M. Tematai Le Gayic : Merci, Monsieur le président.

Beaucoup des interventions ont été fixées sur le FIP. Comme je l’ai dit dans le rapport, avoir une réforme globale de l’ensemble des portefeuilles qui permettent le financement de l’action des communes, car comme ça a été cité précédemment, plusieurs communes bénéficient d’autres dispositifs. Il y a la DDC, il y a le contrat de ville, il y a le DETR, qui initialement ont été prévus pour certains types de communes (DETR pour les communes rurales, le contrat de ville pour les communes urbaines). Et on le voit, il y a une inégalité d’accès à ces types de financements. Se rajoutent les intercommunalités qui essayent d’exister dans notre paysage institutionnel, et on le voit, beaucoup de communes, comme les communes des Tuamotu, souhaitent avoir une communauté de communes en intercommunalité pour avoir des financements supplémentaires de l’État. Raison pour laquelle, il vaut mieux prendre ces mesures de manière globale plutôt que d’essayer de changer le FIP, d’augmenter et de baisser, de voir tous les portefeuilles qui existent aujourd’hui dans le financement des communes, dans leurs investissements, et ensuite de spécialiser.

On l’a entendu, le maire de Rurutu, pendant le congrès des communes, la difficulté qu’auront beaucoup de communes qui sont en perdition d’enfants, de classes, car on sait que ce calcul du nombre de classes dans les écoles fait partie de la répartition des budgets par commune. Donc là aussi, le FIP doit revoir sa manière de partager le budget de manière à ce que ce ne soit pas que les grosses communes de la zone urbaine qui soient priorisées dans l’octroi de ces financements.

Le président : Merci.

Y a-t-il d’autres intervenants sur ce sujet ?

S’il n’y a pas d’intervenant, je mets au voix l’avis : qui est pour ? À l’unanimité ? Merci.



Les rapports peuvent être consultés sur le site internet de l’assemblée de la Polynésie française à l’adresse www.assemblee.pf
Les interventions en langues polynésiennes ont fait l’objet d’une traduction surlignée en gris.

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