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Accueil > Justice administrative > Décision n° 2500001 du 15 janvier 2025

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Tribunal administratif de la Polynésie française
Lecture du 15/01/2025
Décision n° 2500001

Type de recours : Excès de pouvoir

Solution : Demande d'avis article (12) L.113-1

Texte attaqué

Décision du Tribunal administratif n° 2500001 du 15 janvier 2025

Tribunal administratif de Polynésie française

1ère Chambre


Vu la procédure suivante :
Par un déféré enregistré le 2 janvier 2025, le haut-commissaire de la République en Polynésie française demande au tribunal d'annuler la délibération de l'assemblée de la Polynésie française n° 2024-117/APF du 12 décembre 2024.
Il soutient que :
- le déféré est recevable ; la délibération querellée ayant été transmise au haut-commissaire le 13 décembre 2024, le délai de recours a commencé à courir le lendemain de cette transmission, soit le 14 décembre 2024 ;
- à la lecture combinée du 3° de l'article 14 et de l'article 39 de la loi organique du 27 février 2004, il ressort que les domaines de politique étrangère ou d'interventions internationales relèvent soit de l'Etat soit du président de la Polynésie française qui est compétent pour négocier, dans le respect des engagements internationaux de la République, des accords avec tout Etat, territoire ou organisme international ; dès lors l'assemblée de la Polynésie française ne pouvait, sauf à empiéter sur les compétences du président de la Polynésie française ou sur celles de l'Etat, prendre cette délibération.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 janvier 2025, l'assemblée de la Polynésie française, représentée par Me Millet, conclut à la transmission du déféré au Conseil d'Etat pour avis et à ce que le tribunal sursoie à statuer dans cette attente.
Elle soutient que :
- la Polynésie française ayant jusqu'à présent le statut d'une collectivité française, le dialogue qu'elle peut engager avec l'Etat français ne peut relever que de la politique interne de la France, et non pas de sa " politique étrangère " ;
- les discussions souhaitées par l'Assemblée entre la France et les institutions du Pays sur la mise en œuvre d'un processus d'autodétermination ne pourraient être assimilées à la négociation d'un " accord international " avec un " autre Etat ", puisque la Polynésie n'est actuellement pas un Etat, et ne pourrait aspirer à l'être qu'au terme du processus de décolonisation dont il est précisément question de discuter avec l'Etat.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Devillers,
- les conclusions de M. Boumendjel, rapporteur public,
- les observations de Mme A représentant le haut-commissaire de la République en Polynésie française et de Me Millet représentant l'assemblée de la Polynésie française.
Considérant ce qui suit :
Sur les conclusions à fin d'annulation :
1. Aux termes de l'article 172 de la loi la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut de la Polynésie française : " Le haut-commissaire défère au tribunal administratif les actes du président de la Polynésie française, du conseil des ministres ou des ministres, les délibérations de l'assemblée de la Polynésie française autres que les actes prévus à l'article 140 dénommés "lois du pays", de sa commission permanente ou de son bureau, les actes du président de l'assemblée de la Polynésie française, les actes du président du conseil économique, social, environnemental et culturel, qu'il estime contraires à la légalité, dans les deux mois de la transmission qui lui en est faite () ". Aux termes de l'article 174 de cette même loi organique : " Lorsque le tribunal administratif est saisi d'un recours pour excès de pouvoir ou d'un recours en appréciation de légalité dirigé contre les actes mentionnés au 1° du A et au 1° du B du II de l'article 171 et que ce recours est fondé sur un moyen sérieux invoquant l'inexacte application de la répartition des compétences entre l'Etat, la Polynésie française et les communes ou des dispositions relatives aux attributions du gouvernement de la Polynésie française ou de l'assemblée de la Polynésie française ou de son président, ou que ce moyen est soulevé d'office, il transmet le dossier sans délai pour avis au Conseil d'Etat, par un jugement qui n'est susceptible d'aucun recours. Le Conseil d'Etat examine la question soulevée dans un délai de trois mois et il est sursis à toute décision sur le fond jusqu'à son avis ou, à défaut, jusqu'à l'expiration de ce délai. Le tribunal administratif statue dans un délai de deux mois à compter de la publication de l'avis au Journal officiel de la Polynésie française ou de l'expiration du délai imparti au Conseil d'Etat ".
2. La délibération déférée de l'assemblée de la Polynésie française n° 2024-117/APF du 12 décembre 2024 habilite le président de l'assemblée de la Polynésie française a " déposer un recours préalable auprès des autorités de l'État et, au besoin, à ester en justice devant toutes les juridictions françaises et internationales et les organismes relevant des Nations Unies, afin de provoquer un dialogue de décolonisation avec les institutions de la Polynésie française dont l'objectif est de faire cesser la violation du droit fondamental à l'autodétermination du peuple de la Polynésie française au sens notamment de la Charte des Nations Unies, de l'article 1er du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques et de l'article 2 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme. "
3. Il ressort des pièces du dossier que, pour contester la légalité de la délibération attaquée, le haut-commissaire de la République en Polynésie française soulève un moyen tiré de l'incompétence de l'assemblée de la Polynésie française pour autoriser son président à exercer les actions en justice en cause, ces prérogatives appartenant à l'Etat ou au président de la Polynésie française en application, notamment, des dispositions du 3° de l'article 14 et de l'article 39 de la loi organique du 27 février 2004. Ce moyen présentant un caractère sérieux, il y a lieu, en application des dispositions précitées de l'article 174 de la loi organique du 27 février 2004, de transmettre le déféré pour avis au Conseil d'Etat.
D E C I D E :
Article 1er : Le dossier du déféré n° 2500001 est transmis au Conseil d'Etat pour avis sur les questions de droit posées par le motif figurant au point 3 du présent jugement.
Article 2 : Il est sursis à statuer jusqu'à réception de l'avis rendu par le Conseil d'Etat ou, à défaut, jusqu'à l'expiration du délai de trois mois prévu par l'article 174 de la loi organique n° 2004-192.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié au haut-commissaire de la République en Polynésie française, au président de l'assemblée de la Polynésie française, au président de la Polynésie française et au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat.
Délibéré après l'audience du 14 janvier 2025, à laquelle siégeaient :
M. Devillers, président,
Mme Busidan, première conseillère,
M. Graboy-Grobesco, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 janvier 2025.
Le président-rapporteur,
P. Devillers
L'assesseure la plus ancienne,
H. Busidan
La greffière,
D. Oliva-Germain
La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
Un greffier,
N°2500001
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