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SÉANCE DE QUESTIONS ORALES

Paru in extenso au JOPF n° 14 NA du 11/08/2025 à la page 1595

SÉANCE DE QUESTIONS ORALES


Le président : Nous entamons le deuxième point (NDT, de notre ordre du jour), c'est-à-dire la séance de questions orales.

Je rappelle aux élus qui ont adressé une question orale au gouvernement du pays qu’ils disposent de 3 minutes, et aux membres du gouvernement qu’ils disposent de 5 minutes pour apporter leur réponse. Faites un effort pour respecter ce temps. De plus, le règlement intérieur prévoit que vous puissiez adresser également une réponse écrite auprès des services de notre assemblée.

Il est 9 heures et 45 minutes. Je demande à Steve de présenter sa question. Merci.

QUESTION ORALE DE MONSIEUR STEVE CHAILLOUX RELATIVE AUX MISSIONS ET FONCTIONNEMENT DE L'ÉTABLISSEMENT PUBLIC ADMINISTRATIF TE FARE TAUHITI NUI - MAISON DE LA CULTURE

(Lettre n° 5577 SG du 11/06/2025)

M. Steve Chailloux : Merci bien, Monsieur le président. À toutes et à tous ici présents ce matin, Mesdames et Messieurs les représentants, Monsieur le président de l’Assemblée, Monsieur le Président du gouvernement polynésien, à votre gouvernement, aux officiels et aux milliers de personnes des huit coins qui nous suivent ce matin, recevez mes chaleureuses salutations par la grâce de Dieu.

Ma question du jour s’adresse au ministre de la culture. Cher Ronny, bonjour.

Lancé au début des années 1960 par André Malraux, alors ministre des affaires culturelles de la France, le concept de « Maison de la culture » a pour objet d’offrir et de faciliter l’accès pour la culture à tous. Fondée sur le principe d’une association loi 1901, la première voit le jour en France en 1964.

En 1971, apparaît à Papeete la Maison des jeunes - Maison de la Culture (MJMC), sur un remblai créé par l’État près du quartier de Pāʹōfaʹi.

Elle change de mains et de statut le 23 septembre 1980 en devenant l’Office territorial d’action culturelle (OTAC) sur délibération de l’Assemblée territoriale... une appellation qui lui colle encore à la peau !

Enfin, le 9 avril 1998 à la suite d’une nouvelle délibération de notre assemblée, la structure se transforme en établissement public administratif (EPA) et devient Te Fare Tauhiti Nui - Maison de la culture (TFTN).

Accompagnant ces évolutions statutaires, les missions de TFTN ont également évolué au fil du temps. Ainsi, depuis 1998, l’établissement poursuit les objectifs suivants :

- concourir à l’animation et à la diffusion de la culture en Polynésie française ;

- encourager et valoriser la production des activités et des œuvres culturelles et artistiques sous toutes leurs formes ;

- assurer l’organisation et la promotion de manifestations populaires ;

- promouvoir la culture polynésienne, y compris sur le plan national et international.

Pour mener à bien ces missions, TFTN est doté de compétences, de ressources et d’équipements pour certains uniques en Polynésie, notamment :

- de la régie technique la plus développée du pays et des agents spécialement formés à son exploitation ;

- des moyens généraux de logistique et de sécurité et d’agents également formés à leur mise en place ;

- d’agents chargés de la production, de la programmation et de la promotion des activités artistiques et culturelles de l’établissement et de moyens matériels et financiers spécifiques ;

- d’un fonds d’œuvres et d’ouvrages ainsi que d’agents responsables des activités permanentes de TFTN, incluant le fonctionnement de la seule médiathèque du pays autant que des activités d’éveil et de formation artistiques et culturelles ouvertes au public ;

- de l’espace scénique de Toata, du paepae a Hiro et de deux théâtres d’une capacité d’accueil totale de 4 725 spectateurs ;

- de deux bibliothèques, d’une salle d’exposition, de deux salles polyvalentes et d’une salle de projection ;

- 98 agents du personnel, statutaires ou contractuels, temporaires ou permanents, détachés ou mis à disposition.

En somme, un éventail d’installations, de moyens et de ressources pour assurer la production, la diffusion et la promotion d’œuvres artistiques et culturelles. Une activité foisonnante, à l’image de manifestations populaires telles que le Heiva i Tahiti, le Hura Tapairu ou le festival Parau Tiama qui font vibrer en façade notre arène culturelle chaque année.

Pourtant, depuis plusieurs années et à maintes reprises, producteurs et organisateurs d’événements artistiques et culturels, privés comme associatifs, font retour de difficultés croissantes pour l’organisation d’événements, notamment pour la réalisation de spectacles, d’expositions ou de festivals.

En cause, des agents parfois peu qualifiés en regard de postes stratégiques, en sur-service ou à la charge de travail déséquilibrée ; des outils de gestion d’espace défaillants ou obsolètes ; une stratégie de communication et de promotion efficace mais insuffisante et qui tend à invisibiliser les événements ; et des choix stratégiques parfois discutables en termes de cible, de missions de l’établissement et d’orientation budgétaire. Ces difficultés sous-tendent bien entendu une réalité plus complexe, soumise à une réglementation de plus en plus contraignante, un budget limité et un leadership compliqué par un manque de connaissance approfondie des enjeux dans le domaine culturel.

Monsieur le ministre, ma question est simple : êtes-vous pleinement informé de ces défaillances ? Quelles actions envisagez-vous pour y remédier ?

Merci bien. Que l’amour règne.

Le président : Merci.

Monsieur le ministre.

M. Ronny Teriipaia : Mes salutations à toutes et à tous en ce jour. Merci bien à notre élu et membre de l’assemblée, Monsieur Steve, pour cette question.

Monsieur Chailloux, cher Steve, bonjour.

Je te remercie — je vais te tutoyer c’est mieux entre nous — pour ces observations.

Il est important pour moi, en tant que ministre de la culture, de t’apporter des éléments concrets en réponse à vos remarques, à tes remarques que je me permets de reprendre point par point.

Concernant les outils de gestion d’espace, une modernisation est déjà opérée. Depuis 2020, le logiciel Agora, développé par Aventi technology a remplacé les anciens outils inadaptés (en parlant d’Excel) pour la gestion des espaces de TFTN.

Ce système performant permet la coordination des équipes techniques, sécurité, nettoyage, etc. autour de plus de 229 représentations privées en 2024 contre 238 en 2023, la gestion de 149 locations de salle polyvalentes (Mahana, Mato, Marama, Muriāvai et la salle de projection), l’automatisation des conventions, une vision d’ensemble, facilitant l’arbitrage et la communication interne.

Cet outil est moderne, évolutif et opérationnel depuis cinq ans. Il n’y a donc pas de pluralité d’outils ni de défaillance en ce domaine.

S’agissant de la communication et de la promotion, elle est performante malgré un budget contraint. TFTN a su adapter sa stratégie de communication en misant sur le numérique et des solutions à faible impact environnemental. Je veux citer, par exemple : les campagnes Google Ads, écran led géant, réduction significative des impressions, diffusion en direct ou en différé via TNTV, Polynésie la 1re et le réseau France télévision.

Les chiffres illustrent l’efficacité de cette stratégie :

- Facebook Maison de la culture : 33 178 abonnés en 2018 contre 57 000 en 2025, soit une augmentation de 72 % ;

- Facebook Heiva i Tahiti officiel : 12 000 abonnés en 2019, 62 000 en juin 2025, soit une augmentation de + 417 % ;

- Instagram : 1 164 abonnés en 2019, aujourd’hui nous en sommes à 4 633, soit + 298 % ;

- TikTok : 1 650 abonnés en 2024, 18 600 en 2025, soit une augmentation de + 1 027 %.

Concernant la visibilité des évènements, je vais citer, par exemple, le live gratuit du Heiva Taurea en 2025 avec 206 000 vues, et le live payant Hura Tapairu 2024 avec 1 210 spectateurs en ligne pour un grand théâtre de 823 places.

Ce travail repose sur deux agents seulement, dont une community manager sous contrat saisonnier. L’efficacité est indéniable, mais un renforcement humain serait nécessaire pour aller plus loin.

Concernant les choix stratégiques qui sont en phase avec les missions de l’établissement, les évènements comme Toata night ont permis de cibler la jeunesse, notamment des quartiers défavorisés, en partenariat avec les communes. Il s’agit aussi de promouvoir des artistes locaux, rigoureusement sélectionnés et de respecter l’équilibre budgétaire, notamment par rapport à l’évènement financé par ses propres recettes.

D’autres choix forts confirment l’orientation stratégique : Parau ti'amā, promotion des langues ; Taurua hīmene, concours de chants traditionnels ; soutien au théâtre polynésien, aux actions autour du livre inscrites dans la feuille de route du directeur.

Ces initiatives sont au cœur des missions fondamentales de TFTN.

Concernant le leadership et sa vision, une nouvelle dynamique.

Le directeur de TFTN a su construire une feuille de route cohérente avec les enjeux culturels actuels avec le ministère en collaboration étroite avec les équipes, les chefs de service et surtout les acteurs culturels du territoire. Son écoute et sa capacité à fédérer ont permis de répondre à des demandes majeures des groupes du Heiva : l’augmentation des aides financières aux groupes, le lancement d’un travail structurant sur les lieux de répétition. Il ne s’agit donc pas d’un leadership en difficulté, mais bien de renouveau construit avec le terrain.

Concernant les contraintes structurelles, en raison de la surcharge et du besoin d’un nouveau lieu. TFTN n’a pu traiter que 229 demandes de producteurs occasionnels ou récurrents en 2024 alors que 80 demandes n’ont pu être honorées. Il est donc difficile de répondre à toutes les sollicitations. La surcharge est une réalité comme en témoigne le nombre croissant d’évènements, les moyens humains constants et la pression logistique sur les équipes.

Une nouvelle salle de spectacle dotée de moyens humains et financiers adaptés est indispensable pour accompagner cette dynamique. Nous avons pour projet de construire une nouvelle salle de spectacle dont la capacité sera entre les deux actuelles de TFTN. De même, nous envisageons de déplacer la médiathèque sur le site de Vaiami.

En conclusion, les seules limites réelles de TFTN résident dans les moyens humains et budgétaires insuffisants, et non dans les défaillances structurelles. Par ailleurs, nous avons pleinement connaissance des revendications exprimées par les agents de Te Fare Tauhiti Nui. Aux côtés de notre ministre de la fonction publique, de l’emploi et du travail, de la modernisation de l’administration, du développement des archipels, de la formation professionnelle, nous nous sommes rendus sur place afin d’écouter attentivement chacune des doléances et de fournir les éclaircissements nécessaires. Nous poursuivons notre accompagnement dans cette démarche.

Ces questions sont au cœur de ma feuille de route ministérielle. Nous devons collectivement soutenir TFTN, son directeur et ses équipes pour leur permettre de poursuivre le travail engagé et répondre tout simplement aux attentes légitimes du secteur culturel.

Merci.

Le président : Merci bien, Monsieur le ministre.

Je demande à Pauline de présenter sa question.

QUESTION ORALE DE MADAME PAULINE NIVA RELATIVE À RENFORCER LES CJA : SORTIR DE LA PRÉCARITÉ, ASSUMER LA SOUPLESSE

(Lettre n° 6186 SG du 23/06/2025)

Mme Pauline Niva : Merci bien, Monsieur le président. À toutes et à tous ici présents ce matin, à notre député Nicole Sanquer, à nous chers membres élus, mes salutations.

Tout d’abord, je voudrais remercier notre présidente de la commission chargée de l’emploi au sein de notre pays, Madame Teura Iriti, pour avoir mis en place des visites au sein de nos établissements scolaires. Merci bien.

Nous comprenons que ma question s’adresse à Monsieur le ministre de l’éducation.

Monsieur le ministre, il y a plus de 40 ans, le pays innovait.

Tandis que les jeunes non admis au collège étaient « laissés au bord du chemin », selon les termes de la Charte de l’éducation, des responsables politiques du pays ont proposé une réponse concrète et audacieuse : les Centres de jeunes adolescents.

Une création 100 % locale, née de l’intuition de Jacques Denis Drollet et portée, dès l’origine, par John Teariki.

Depuis les premiers centres de Vairao et Faaroa, les CJA ont su évoluer, se professionnaliser et se repositionner.

La dernière réforme d’envergure, celle de 2021, a permis d’actualiser leur cadre juridique, de clarifier leurs missions, de consolider leur rôle de structures-relais entre le scolaire, le social et le professionnel.

Et sur le terrain, les efforts sont bien visibles : labellisations, partenariats avec la Justice et la Gendarmerie, intégration du livret scolaire unique, organisation de passerelles vers les CAP, conventions avec certaines communes...

Ces avancées sont notables, mais elles s’accompagnent de réalités de terrain qui appellent encore notre vigilance :

D’abord, la souplesse des admissions, prévue par les textes et appliquée avec rigueur, montre son utilité : accueillir un élève à tout moment de l’année permet d’agir vite face au décrochage. Mais cette souplesse se heurte à une réalité beaucoup plus rigide : les moyens humains, eux, ne suivent pas toujours. Les moniteurs ne sont pas recrutés de manière continue, les enseignants spécialisés arrivent parfois tardivement, et cela déséquilibre l’accompagnement ;

À cela s’ajoute une fragilité bien identifiée : selon les données présentées en commission en 2021, près de la moitié des moniteurs étaient encore en contrat à durée déterminée. Cette précarité structurelle nuit à la continuité pédagogique et complique la constitution d’équipes stables, pourtant essentielles pour des jeunes en situation de rupture ;

Autre difficulté : dans les archipels éloignés, l’insuffisance des internats, notamment pour les filles, empêche certains jeunes d’accéder aux CJA, malgré des besoins identifiés. Faute de structures ou de familles d’accueil, des vocations sont bloquées avant même de pouvoir commencer ;

Enfin, ce sont les équipes elles-mêmes qui, dans beaucoup de CJA, doivent composer avec un turn-over élevé. Cela pèse sur le fonctionnement quotidien et fragilise le suivi individualisé, alors même que celui-ci est souvent la clé pour remettre un jeune sur le chemin de la confiance et de l’apprentissage.

Monsieur le ministre, nous savons que vous portez une attention particulière aux CJA et que leur spécificité, purement polynésienne, est une richesse à préserver.

Dans cet esprit, je souhaiterais connaître : Quels sont les leviers que vous envisagez pour stabiliser les équipes éducatives dans les CJA ? Une actualisation des programmes pédagogiques est-elle prévue, comme cela avait été évoqué en 2021 ? Enfin, comment envisagez-vous d’accompagner cette souplesse des admissions par des moyens humains et matériels à la hauteur, afin d’éviter que l’effort d’adaptation repose uniquement sur les équipes en place ?

L’ambition n’est pas de pointer ce qui manque, mais d’avancer ensemble sur ce qui reste à consolider pour que les CJA prennent pleinement leur place dans le système éducatif de notre pays.

Merci bien. Que l’amour règne.

Le président : Merci bien.

Monsieur le ministre.

M. Ronny Teriipaia : Merci bien, Pauline, pour votre question relative aux centres des jeunes apprentis. Cette question est pertinente car il est nécessaire d’apporter des explications claires afin de répondre à cette question.

Madame Niva, chère Pauline, bonjour. Je te remercie pour ces observations et je suis ravi de te présenter aujourd’hui les avancées et les perspectives pour les Centres de jeunes apprentis de notre école polynésienne.

La réforme majeure de 2021 a permis d’actualiser le cadre juridique des CJA, de clarifier leurs missions et de renforcer leur rôle en tant que structure relais entre le scolaire, le social et le professionnel.

Les CJA jouent un rôle crucial dans la lutte contre la déscolarisation et la réinsertion des élèves en voie ou en situation de décrochage. Ils offrent un parcours de formation personnalisée et sécurisée pour les élèves qui ont besoin d’un nouveau souffle pour apprendre.

Les CJA sont des lieux de scolarisation transitoire et temporaire qui accueillent des élèves qui ont besoin d’un accompagnement spécifique pour retrouver confiance et construire un projet de formation et d’orientation.

Nous avons mis en place plusieurs leviers pour stabiliser les équipes éducatives dans les CJA.

Tout d’abord, nous allons faire évoluer le statut du CJA pour rappeler leur place dans notre école et les évolutions envisagées.

Nous allons modifier l’article 1er des missions du CJA pour préciser que ces établissements assurent aux élèves la poursuite d’une scolarité sécure et la sécurisation de leur parcours de formation et d’accompagnement vers le retour au collège et à l’orientation.

Nous allons également former les équipes pédagogiques et valoriser les personnels qui travaillent dans les CJA. Nous allons aussi mettre en place des dispositifs de formation pour les directeurs, les enseignants et les autres professionnels de l’éducation qui travaillent dans cette structure.

Nous allons également valoriser les parcours de formation et les compétences des personnels qui travaillent dans les CJA.

Il s’agit aussi de mettre en place des évaluations pour piloter les actions pédagogiques et accompagner les directeurs d’école dans le pilotage pédagogique de l’établissement.

Les programmes pédagogiques seront actualisés pour tenir compte des besoins des élèves et des attentes du CAP. Nous allons travailler en concertation avec les inspecteurs de l’éducation nationale et les autres professionnels de l’éducation pour élaborer les programmations par discipline et communiquer sur le parcours des élèves.

Les parcours éducatifs et les langues et cultures du Pacifique seront également valorisés pour permettre aux élèves de développer leur compétence et leur confiance. Il s’agit aussi de mettre en place des projets éducatifs qui valorisent les parcours EAC (connaître, pratiquer, rencontrer) et la santé bien évidemment.

Nous allons également organiser des festivals et des évènements qui permettent aux élèves de mettre en valeur leurs compétences et leurs réalisations. Il s’agit aussi de renforcer le partenariat avec la Direction des services de la famille et de l’enfance (DSFE), la protection judiciaire de la jeunesse et les familles pour accompagner les élèves et leurs familles. Nous allons travailler en étroite collaboration avec ces partenaires pour offrir aux élèves un accompagnement global et personnalisé.

Comme vous le savez, les élèves inscrits au CJA relèvent du 1er degré. Cependant, ils viennent de la classe de 5e et ont un statut de collégien. Pour répondre aux besoins des élèves, la bascule du 1er degré vers le 2nd degré est essentielle. Cependant, cette bascule doit accompagner la valorisation des enseignants de l’enseignement général et des ateliers MEP (moniteur d’enseignement pratique), le statut du directeur, la gestion des primes concernant l’éducation à l’orientation, gestion des bâtiments, convention avec les communes. L’intérêt est celui des élèves et du personnel du pays.

Ce sujet a été évoqué lors du dialogue de gestion avec l’État, l’an dernier, et notamment celui d’intégrer tous les CJA dans un REP+. Le sujet sera remis à l’ordre du jour au prochain dialogue de gestion. À ce propos, je m’étonne d’ailleurs que ce sujet n’ait jamais été évoqué lors des précédentes mandatures, lors de ces réunions annuelles en Hexagone.

Enfin, nous allons réfléchir à un nouveau nom pour le CJA qui reflète mieux leurs missions et leur rôle dans notre système éducatif. Il s’agit de travailler en concertation avec les professionnels de l’éducation et les élèves pour trouver un nom qui reflète nos valeurs et nos objectifs.

Je suis convaincu que ces actions vont permettre de renforcer le rôle des CJA dans notre école polynésienne et d’offrir aux élèves les meilleures chances de réussite.

Merci de votre attention et je suis à votre disposition pour répondre à toutes les questions.

Merci.

Le président : Oui, merci bien, Monsieur le ministre.

Je demande à Teave de poser sa question, s’il vous plaît.

QUESTION ORALE DE MADAME TEAVE BOUDOUANI-CHAUMETTE RELATIVE À LA STRATÉGIE DE SOUVERAINETÉ DES DONNÉES

(Lettre n° 6252 SG du 24/06/2025)

Mme Teave Boudouani Chaumette : Monsieur le président de l’Assemblée de la Polynésie française, Monsieur le Président de la Polynésie française, Monsieur et Madame du gouvernement, chers collègues, cher public.

À l’heure où la transition numérique s’accélère, la question de la cybersécurité et de la souveraineté des données devient un enjeu stratégique de premier plan, pour la Polynésie comme pour toutes les sociétés modernes.

Or, en Polynésie française, force est de constater qu’aucune politique publique structurée n’a été déployée dans ce domaine : pas de cadre stratégique clair, pas de service dédié, pas de budget identifié, pas de plan d’action connu.

Les données sensibles — qu’il s’agisse des dossiers médicaux, des fichiers administratifs ou des communications gouvernementales — transitent et sont hébergées à l’extérieur, notamment en France ou aux États-Unis, hors de tout contrôle local.

Cette situation expose notre pays à des risques croissants, tant sur le plan technique que juridique.

Et elle est d’autant plus préoccupante que l’arrivée prochaine du câble sous-marin Honomoana, porté par Google, va considérablement renforcer notre connectivité internationale. Ce projet représente une avancée majeure, mais il appelle, en amont, une réflexion urgente sur la protection de notre patrimoine informationnel.

Monsieur le Président, le sujet de la souveraineté numérique polynésienne n’est pas seulement une affaire d’État ou de compétence régalienne : c’est une affaire de volonté politique. C’est une question de responsabilité vis-à-vis des Polynésiens.

Aussi, pouvez-vous nous indiquer si le gouvernement entend se doter, à brève échéance, d’une véritable stratégie de cybersécurité, et quel est l’état d’avancement du projet Honomoana, en particulier concernant les garanties obtenues pour préserver nos intérêts numériques dans ce contexte de dépendance technologique croissante ?

Je vous remercie.

Le président : Merci bien.

Monsieur le Président.

M. Moetai Brotherson : Bonjour à toutes et à tous.

Madame la représentante, je vous remercie pour cette question. Elle soulève plusieurs points qui méritent d’être précisés.

La cybersécurité constitue un enjeu de confiance nécessaire au développement de notre économie et de nos partenariats à l’échelle locale, régionale et internationale. Elle est d’autant plus importante — et vous l’avez souligné — en raison de l’essor de notre interconnexion au monde résultant de projets structurants comme le déploiement des câbles sous-marins ou l’émergence de solutions satellitaires.

En premier lieu, vous l’avez relevé, la compétence en matière de cybersécurité est avant tout une compétence régalienne relevant de l’État au titre de la défense nationale. C’est l’article 14-4 du statut de notre pays. Ce dernier a ainsi étendu en Polynésie française la réglementation idoine en la matière, dont notamment les dispositions du code de la défense applicable aux opérateurs d’importance vitale (OIV) et de la sécurité des systèmes d’information.

Cette réglementation impose à des organismes locaux de prévoir des mécanismes permettant la sauvegarde et la continuité des secteurs réputés d’importance vitale au fonctionnement de la société polynésienne. Il sera relevé au passage qu’une telle classification et les mesures qui en découlent n’est pas publique et est couverte par le secret défense. Il est donc tout à fait normal que ces éléments ne soient pas connus du public.

La conséquence de cette répartition de compétences entraîne une impossibilité pour le pays de régir normativement dans le domaine, à l’instar de toute règlementation générale visant à obliger un hébergement local des données sensibles ou personnelles. La collectivité peut cependant accompagner le secteur et inciter à ce qu’il en soit ainsi.

La politique publique en matière de cybersécurité est, par conséquent, intégrée de manière transversale et continue dans l’ensemble des mesures et actions développées dans le cadre de la stratégie numérique du pays. Elle répond à une volonté claire : faire de la sécurité numérique un réflexe partagé et une composante naturelle du développement numérique du pays. Il est d’ailleurs compréhensible que cette approche puisse paraître peu visible à un observateur non initié, tant elle repose sur une intégration en amont, discrète mais rigoureuse des principes de sécurité dans chaque dimension du numérique. Je me permets donc d’en exposer ici les éléments les plus structurants afin d’en faciliter la lecture globale.

La Polynésie française participe activement, notamment au travers des actions menées par la Direction générale de l’économie numérique, la DGEN, à la politique locale en matière de cybersécurité dans le cadre d’actions coordonnées, de sensibilisation avec l’État et le secteur privé. Elle y contribue aussi par la mise à disposition d’espaces pour l’organisation des sessions de sensibilisation à la cybersécurité et au RGPD.

La co-organisation d’événements comme le forum CyberFenua en 2024 — une grande première — consacré à la cybersécurité avec le haut-commissariat et l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, l’ANSSI, et la participation aux rencontres régionales en matière de cybersécurité. Un travail de coopération plus important avec l’État sur ces questions est en construction avec le haut-commissariat de la République en Polynésie française.

Pour ce qui concerne la sécurisation du système d’information du pays, la Direction des systèmes d’information, la DSI, est en charge de cette protection qu’elle assure au travers d’un ensemble déployé au sein de l’administration. À ce titre, elle conduit des initiatives concrètes de modernisation, met en œuvre des solutions de surveillance afin de prévenir les risques et veille à la protection des données, conformément aux règles de l’art en vigueur. Elle s’attache également à garantir une urbanisation maîtrisée du système d’information de la Polynésie française.

Début mai 2025, une présentation des projets numériques portés par le gouvernement vous a d’ailleurs été proposé. Un état des lieux de la sécurité et du système d’information a été réalisé en collaboration avec l’ANSSI. À l’issue de ce diagnostic, un plan d’actions structuré autour de 18 mesures a été élaboré, dont 16 sont aujourd’hui réalisées ou en cours de finalisation.

La DGEN entame les travaux de restructuration de ses dispositifs de soutien à l’écosystème numérique et proposera prochainement de nouveaux dispositifs adaptés relatifs aux besoins de sécurisation et d’accompagnement des petites et moyennes entreprises. Par ailleurs, elle veille systématiquement, elle aussi, à intégrer les exigences de cybersécurité standard dans l’ensemble de ses travaux.

Également, le volet « Développement et consolidation des compétences en la matière pour le grand public » est porté par la DGEN, qui diffuse une information ciblée auprès d’établissements d’enseignement, de centres de formation afin de renforcer durablement les compétences locales en cybersécurité. Ce fut le cas, par exemple, lors des Horizons du numérique en février de cette année 2025. En effet, parmi nos objectifs figure bien celui de faire émerger des profils qualifiés sur le territoire et de structurer une filière pérenne au service de la souveraineté numérique du pays.

Le gouvernement a également organisé des exercices de gestion de crise cyber dans le cadre des Jeux olympiques et participera activement à l’exercice national de cybersécurité massifié REMPAR25 piloté par l’ANSSI. Tous les systèmes informatiques de sécurité ont été renforcés et font désormais l’objet d’une surveillance continue 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Des opérations régulières de sensibilisation et d’entraînement des agents sont menées chaque mois pour renforcer la culture de la cybersécurité au sein de nos services. L’organisation de gestion de crise cyber a été formalisée et testée pour garantir une réponse rapide et coordonnée en cas d’incident.

Le gouvernement travaille en étroite collaboration avec l’ANSSI sur l’ensemble des volets sécuritaires et bénéficie de son expertise précieuse en cas d’incident. Les données du pays font l’objet d’analyses règlementaires régulières, tant au regard de la législation nationale que des lois du pays, afin de garantir leur conformité, leur résilience et l’adéquation des solutions d’hébergement mises en œuvre.

La Polynésie applique également, strictement, l’ensemble des dispositions du règlement général sur la protection des données, le RGPD, relevant aussi, globalement, de la compétence de l’État. Avec plus de 1 000 traitements de données identifiés à ce jour, les analyses d’impact sur la protection des données (AIPD) sont systématiquement réalisées pour tous les systèmes d’information qui le nécessitent.

En complément, des homologations de sécurité sont conduites conformément au référentiel général de sécurité, le RGS polynésien de 2017, intégrant une analyse de risques approfondie selon la méthode EBIOS Risk Manager, ces démarches sont complétées par des tests de pénétration et des audits de sécurité, assurant un haut niveau de résilience face aux menaces.

Par ailleurs, dans le cadre des travaux de programmation budgétaire triennale, la sous-catégorisation vous permettra d’identifier les actions effectivement budgétées, contrairement à ce qui a pu être affirmé. Il n’en demeure pas moins que pour qu’elles soient réalisées, chacune des actions précitées a bien été budgétisée et l’est encore pour certaines, tant la sécurisation de notre patrimoine informationnel requiert une attention permanente mais aussi grandissante.

Je vous remercie donc pour l’attention que vous portez à ces éléments, et connaissant votre sensibilité à ces enjeux, je ne doute pas de pouvoir compter sur votre appui lorsque viendra le moment de traduire ces priorités en engagement budgétaire concret.

Enfin, pour ce qui concerne l’arrivée des câbles Google, soyez assuré que ce projet suit son cours. Je souhaitais, à ce titre, vous rappeler que la mise en service de ces câbles, pour ce qui concerne la Polynésie française, se fera sous couvert de l’Office des postes et télécommunications et restera donc sous le contrôle d’un acteur polynésien, en application des dispositions du Code des postes et télécommunications.

Merci, que l’amour règne.

Le président : Merci bien.

QUESTION ORALE DE MADAME PASCALE HAITI-FLOSSE RELATIVE À LA SITUATION DES PATIENTS ET DES MÉDECINS DU CHPF

(Lettre n° 6253 SG du 24/06/2025)

Le président : J’invite Pascale à intervenir pour sa question orale.

Mme Pascale Haiti-Flosse : Merci, Monsieur le président de l’assemblée.

Monsieur le Président du gouvernement, Madame la députée, Madame la sénatrice, Mesdames et Messieurs les ministres, chers collègues. En préambule de ma question, permettez-moi de remercier sincèrement le personnel soignant de l’hôpital de Taaone, les chirurgiens, cardiologues, infectiologues, infirmiers, aides-soignants, agents de service et la direction du CHPF, pour les bons soins apportés à mon époux Gaston Flosse, lors de sa récente hospitalisation. Grâce à leur dévouement, il se porte aujourd’hui bien mieux et vous adresse, à tous les Polynésiens, ses remerciements les plus sincères pour leur soutien et leurs prières.

Monsieur le Ministre, pendant que vous vous réjouissez publiquement, aux côtés de la direction du CHPF, de la bonne santé financière de l’hôpital, la réalité du terrain, elle, se dégrade à une vitesse alarmante.

L’hémorragie du personnel se poursuit. Les soignants que nous formons ici, nos propres enfants, quittent massivement l’hôpital de Taaone.

Pas plus tard que cette semaine, le docteur Tony Tekuataoa l’a clairement dénoncé sur les ondes de Radio 1 : ces départs ne sont pas des accidents. Ils sont le symptôme d’un système à bout de souffle, gangrené par des conditions de travail indignes, une surcharge insoutenable et une perte de sens qui pousse nos soignants vers la sortie.

En 2021, le docteur Anapa Nauta relatait dans un article publié par Tahiti infos les dysfonctionnements administratifs et institutionnels qui mettent à mal la qualité des soins offerts aux patients et qui fragilisent nos praticiens. Nous aimerions avoir le sentiment du ministère sur ce sujet.

Et pendant que les soignants désertent, les patients, eux, sont abandonnés.

Le témoignage poignant de Hiriata, une jeune patiente atteinte non pas d’un cancer des os — excusez-moi — mais plutôt d’un cancer des seins, résonne comme un cri de détresse. Depuis avril 2024, en sept mois, elle a dû voir onze oncologues différents. Comment peut-on construire une relation de confiance dans ces conditions ? Comment justifier qu’on lui ait refusé une évacuation sanitaire vers la métropole au prétexte qu’elle aurait bénéficié ici des mêmes soins, alors que, de son propre aveu, elle a dû se battre dans un système désorganisé, instable et sous-équipé ?

Monsieur le ministre, ces départs massifs, ces patients abandonnés, ces drames humains, vous les connaissez. Les soignants le disent, les patients le vivent, pourtant rien ne change.

Alors je vous pose une question simple et directe : Combien de temps allez-vous encore ignorer ces alertes, ces souffrances, ces démissions en cascade, avant de prendre enfin des mesures fortes et concrètes pour stopper cette hémorragie, redonner confiance aux patients et aux soignants, et garantir à tous le droit fondamental de se soigner dignement au fenua ?

Monsieur le Ministre de la santé, les Polynésiens ne peuvent plus attendre.

Je vous remercie.

Le président : Merci bien. Monsieur le ministre.

M. Cédric Mercadal : Madame la représentante, avant toute chose, je suis heureux que Monsieur Gaston Flosse aille mieux et que tout se soit bien passé à l’hôpital.

Je vous remercie pour ces mots à l’attention des soignants qui tiennent à bout de bras notre système de santé.

Votre constat traduit une inquiétude sincère que je partage. Le constat que vous faites, je le connais et cette réalité, je ne la découvre pas dans cet hémicycle. Cette situation est le fruit d’années d’inadaptation de nos politiques publiques cumulées, d’un système qui n’a pas su anticiper ni adapter les moyens à l’évolution des besoins sanitaires de nos populations.

Cette situation est aussi la conséquence logique et cruelle de plus de vingt années de politiques publiques de prévention qui n’ont pas su changer les choses. Il y a de plus en plus de malades dans notre pays et cela, de plus en plus jeune. Et, les pathologies chroniques les plus difficiles à soigner explosent. Résultats pour nos soignants : pénibilité accrue, turnover élevé et surtout épuisement chronique.

Alors oui, les jeunes médecins polynésiens quittent l’hôpital. Les premières causes, c’est la difficulté du travail et le manque de souplesse du système. Ils veulent continuer à soigner mais dans de meilleures conditions. La réalité a changé. Près de 50 % des médecins sont aujourd’hui des femmes, des femmes qui, elles, nous alertent de porter à la fois la maison, les gardes d’enfants, les gardes et les soins à l’hôpital et dans les dispensaires et dans chacun des points de notre système de soins.

Elles réclament des temps partiels choisis pour concilier travail, vie familiale, sans devoir renoncer à leur vocation. Nous devons aussi adapter nos statuts à la réalité et cela, de manière concertée avec les professionnels.

Dès mon entrée en fonction, nous avons engagé une réforme en profondeur du système de santé. Notre priorité, garantir la continuité des soins et la qualité, ce qui nécessite l’attractivité des métiers de la santé, en améliorant les conditions de travail. Ces priorités sont d’ailleurs le socle du futur schéma d’organisation sanitaire, parce qu’il est primordial de savoir comment garder les médecins et plus largement les soignants sur tout notre territoire.

Plusieurs actions ont déjà été engagées dans le cadre d’une stratégie concertée. La formation des infirmières, des aides-soignantes a été rouverte à notre arrivée. Et nous avons ouvert les concours dès la première année, crée et pérennisé 125 postes en santé, ces deux dernières années.

Un benchmark sur les conditions de travail sur tout le territoire avec les autres territoires a été fait, pour analyser les causes du turnover et qui va aider le gouvernement à agir avec précision sur ce qu’il faut modifier. Dans cette belle logique, des travaux avec les professionnels sont en cours pour moderniser les statuts de praticiens hospitaliers. Cette étape essentielle pour renforcer l’attractivité de nos postes est en cours de réalisation avec eux, chaque mercredi et on y travaille avec le ministère de la fonction publique.

La transformation du statut des IDE est aussi en cours d’élaboration et vous sera présentée, devant vous, d’ici peu et entre en cohérence puisque de catégorie B, on passera à catégorie A.

La réforme des établissements publics de santé a été lancée et vous sera toujours présentée. Elle vise à plus de souplesse dans les recrutements, améliorer les perspectives de carrière, renforcer l’attractivité et la réactivité au sein de l’hôpital pour gagner en attractivité et en qualité. Mais il fallait aussi mettre les comptes à plat pour donner les garanties nécessaires à nos partenaires qui financent.

Un plan d’investissement a déjà été engagé pour moderniser les équipements et les infrastructures de santé ici, dans les archipels, pour mettre à niveau nos structures. Et à chaque BP, vous nous soutenez et je vous en remercie tous.

Pour réduire la charge de travail et améliorer surtout l’état de santé de notre population dans le temps, il faudra agir aussi sur la prévention et y mettre les moyens. Des mesures de prévention et de promotion fortes et coordonnées vont être soumises prochainement sur le terrain et à notre assemblée, la création des guides sanitaires, les arataʹi ora qui seront la prévention de proximité de demain, mais aussi la loi tabac qui passera bientôt en commission et qui vise à protéger mieux nos jeunes et à inverser la tendance parce qu’elle est dramatique aujourd’hui. Parce qu’il faut soigner, s’en prévenir, c’est ainsi qu’il faut le faire.

Alors, j’appelle aujourd’hui cette assemblée à soutenir les réformes nécessaires et courageuses, mais que nous allons tous construire ensemble et voter, je l’espère, tous ensemble.

Merci.

Le président : Merci bien.

J’invite Cathy à soumettre sa question orale.

QUESTION DE MADAME CATHY PUCHON RELATIVE À LA SURVEILLANCE DES ÉLÈVES À LA SORTIE DES CLASSES

(Lettre n° 6254 SG du 24/06/2025)

Mme Cathy Puchon : Merci, Monsieur le président.

Monsieur le Président de la Polynésie française, Monsieur le président de l’Assemblée de la Polynésie française, Mesdames les parlementaires, mesdames et messieurs les représentants de l’assemblée, chers collègues, Mesdames et Messieurs de la presse et cher public, mes salutations.

Alors, ma question orale s’adresse à Monsieur le ministre de l’Éducation et a pour objet la surveillance des élèves à la sortie des classes.

Monsieur le ministre, comme l’ensemble des partenaires de la communauté éducative, nous, élus, maires, conseillers municipaux et parents d’élèves, avons été surpris d’apprendre que le conseil des ministres a validé la suppression de l’obligation de surveillance de dix minutes par les enseignants à la fin des cours, prévue par l’arrêté n° 795 CM du 24 juillet 1996 relatif à l’organisation et au fonctionnement des écoles publiques de la Polynésie française.

Je rappelle que cet arrêté précise : « La surveillance des élèves durant les heures d’activités scolaires doit être continue et leur sécurité doit être constamment assurée ». Et plus loin : « Pour l’accueil et la sortie des classes, le service de surveillance ne peut être d’une durée inférieure à dix minutes. » Cet arrêté venait compléter le Code de l’éducation qui impose une surveillance à l’entrée et à la sortie des classes, sans en préciser la durée.

En métropole, la circulaire n° 97-178 du 18 septembre 1997 rappelle que la responsabilité des enseignants prend fin uniquement lorsque les élèves sont remis aux familles ou aux services compétents, et non simplement à la sonnerie de fin de journée.

Monsieur le Ministre, vous avez déclaré sur TNTV le 6 juin 2025 que cette obligation était en fait abandonnée depuis 2008, à la suite de la réforme des Obligations Réglementaires de Service, que nous appelons l’ORS, en métropole. Cette justification a également été reprise par le conseil des ministres dans son communiqué du 4 juin.

Or, cet argument ne tient pas juridiquement. La surveillance des élèves fait pleinement partie des missions des enseignants, inscrites dans le Code de l’éducation et ne relève pas des 108 heures annualisées. L’arrêté de 1996 n’avait pas été pris pour alourdir leurs obligations, mais pour clarifier leur cadre d’intervention et garantir une couverture effective d’une période particulièrement sensible de la journée, où les risques d’incidents sont accrus.

Dans la pratique, si aucun élève ne reste dans la cour, la surveillance prend naturellement fin. Et au terme des dix minutes, la responsabilité — pardon — est transférée aux communes. Ce dispositif équilibré ne semble pas justifier sa suppression.

Je rappelle également que les enseignants du premier degré en Polynésie française sont des fonctionnaires d’État. Dès lors, peut-on, au niveau local, retirer une mission qui relève de leur statut national, sans excéder nos compétences ?

Cette décision soulève des interrogations sur la répartition des responsabilités entre l’État et la Polynésie française et transfère aux communes une charge nouvelle, sans leur donner les moyens ou la formation adéquate. Peut-on réellement confier les dix minutes les plus critiques de la journée à des agents communaux, qui n’ont ni la formation ni la légitimité pédagogique des enseignants ?

Par ailleurs, dire que les enseignants assurent cette surveillance chaque jour est inexact. Elle est organisée collectivement et répartie au sein des équipes. Ce n’est donc pas une charge quotidienne individuelle, mais bien une organisation maîtrisée et soutenable.

Monsieur le Ministre, nous partageons tous le souci de protéger nos enfants et de garantir leur sécurité dans les meilleures conditions.

Telle est donc ma question Monsieur le ministre : Sur quels fondements juridiques, pédagogiques et organisationnels vous êtes-vous appuyé pour abroger l’arrêté du 24 juillet 1996, et quelles garanties concrètes pouvez-vous aujourd’hui apporter aux familles, aux élus et aux équipes éducatives pour assurer, avec la même efficacité, la sécurité des élèves à la sortie des classes ?

Je vous remercie de votre attention.

Le président : Monsieur le ministre.

M. Ronny Teriipaia : Merci, Madame la représentante, pour cette question que je trouve très intéressante. Ça permet, justement, de profiter de la tribune pour remercier l’ensemble du personnel enseignant qui, depuis des années, assure bien, dans le cadre de leurs horaires réglementaires de service, les heures supplémentaires, c’est-à-dire les trois heures en plus et également les 10 minutes, qui devaient déjà être supprimées depuis bien longtemps. Ce n’est pas grave, je suis là pour répondre aux questions.

Alors, Madame Puchon, vous avez effectivement raison de rappeler que les enseignants du premier degré, CEAPF, sont des fonctionnaires d’État et que l’on ne peut retirer au niveau local les missions qui relèvent de leur statut national. Cependant, je voudrais vous rappeler que la Cour administrative d’appel de Paris a rendu un jugement important le 12 mars 2024, qui a considéré que la Polynésie française a modifié les obligations statutaires du service des professeurs des écoles sans en avoir la compétence. Ce jugement a souligné que l’obligation de service hebdomadaire d’enseignement auquel les professeurs des écoles sont assujettis revêt tout simplement un caractère statutaire.

En effet, selon les articles 1er et 2 du décret du 30 juillet 2008 relatif aux obligations de service et aux missions des personnels enseignants du premier degré, l’obligation de service hebdomadaire d’enseignement est fixée à 24 heures d’enseignement par semaine. Or, en imposant aux professeurs des écoles de la Polynésie française de travailler 27 heures par semaine pendant 27 semaines et 23 heures 30 pendant 9 semaines, la Polynésie française a modifié les obligations statutaires de service sans en avoir la compétence.

Ce jugement a des implications importantes pour notre système éducatif. Il est essentiel que nous respections les dispositions réglementaires qui régissent les obligations de service des professeurs des écoles.

En ce qui concerne la surveillance des élèves, je voudrais rappeler que les dispositions réglementaires sont claires. Selon l’article D. 321-12 du Code de l’éducation, la surveillance des élèves durant les heures d’activité scolaire doit être continue et leur sécurité doit être constamment assurée. Le règlement type des écoles maternelles et élémentaires publiques précise également que l’accueil des élèves est assuré 10 minutes avant l’entrée en classe.

Je voudrais souligner que les références réglementaires citées par vous, madame la représentante, sont obsolètes et qu’il est essentiel que nous nous référions aux textes réglementaires en vigueur pour prendre des décisions éclairées. C’est pour ça qu’il faut s’informer.

En conclusion, je voudrais dire que nous devons respecter les dispositions réglementaires qui régissent les obligations du service des professeurs des écoles et la surveillance des élèves. Nous devons également nous assurer que nos décisions sont conformes aux textes réglementaires en vigueur et au jugement des cours administratives.

Merci.

Le président : Merci bien. La séance des questions orales touche à sa fin. Merci à chacun d’avoir respecté le temps qui lui était imparti.



Les rapports peuvent être consultés sur le site internet de l’assemblée de la Polynésie française à l’adresse www.assemblee.pf
Les interventions en langues polynésiennes ont fait l’objet d’une traduction surlignée en gris.

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