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Accueil > Justice administrative > Décision n° 1600173 du 7 février 2017

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Tribunal administratif de la Polynésie française
Lecture du 07/02/2017
Décision n° 1600173

Type de recours : Excès de pouvoir

Solution : Rejet

Décision du Tribunal administratif n° 1600173 du 07 février 2017

Tribunal administratif de Polynésie française


Vu la procédure suivante :
Par une requête enregistrée le 26 avril 2016 présentée par la SELARL Jurispol, société d’avocats, M. Jimmy T. demande au tribunal : 1°) d’annuler l’article 48 de la délibération n° 2016-16 APF du 18 février 2016 portant statut particulier des pompiers d’aérodromes de la fonction publique de la Polynésie française, en tant qu’il fixe les conditions de titularisation du stagiaire ; 2°) de mettre à la charge de l’assemblée de la Polynésie française une somme de 150 000 F CFP au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Le requérant soutient que :
- il est fonctionnaire de catégorie D et exerce les fonctions d’instructeur pompier d’aérodromes ; les dispositions contestées lui imposent des obligations pour continuer à exercer ces fonctions ; ainsi, il a intérêt à agir ;
- les dispositions contestées imposent aux fonctionnaires de catégorie C et D, contrairement à ceux de catégories B occupant les mêmes emplois, des obligations non fondées sur des critères rationnels et objectifs, en méconnaissance du principe d’égalité ;
- les dispositions relatives à l’examen professionnel n’ont pas vocation à s’appliquer aux agents qui occupent déjà un emploi de catégorie supérieure en vertu d’une autorisation administrative du chef de service ;
- la possibilité de ne pas classer le stagiaire dans le cadre d’emplois des instructeurs pompiers d’aérodromes porte une atteinte excessive aux situations des agents en poste occupant ces fonctions ;
- la formation de chef de manœuvre n’est pas dispensée en Polynésie française ; son obtention n’est pas imposée aux agents visés par l’article 49 de la délibération, en méconnaissance du principe d’égalité ; les dispositions du code de l’aviation civile n’imposent pas la présence d’un chef de manœuvre pour les aérodromes de Polynésie française qui sont de catégories inférieures à 5 ; les agents visés par les dispositions contestées ne peuvent pas remplir les conditions requises par l’article 8 de l’arrêté du 18 janvier 2007 pour obtenir la qualification de chef de manœuvre ; il est injustifié d’imposer l’obtention d’une qualification de chef de manœuvre dont les intéressés perdront rapidement le bénéfice puisqu’ils ne peuvent exercer sur un aérodrome de catégorie 5 ou 6 ;
- les dispositions contestées méconnaissent la répartition des compétences entre l’Etat et la Polynésie française et sont illégales en l’absence de convention organisant l’évaluation qu’elles prévoient.
Par des mémoires en intervention au soutien de l’assemblée de la Polynésie française, enregistrés les 20 juin et 18 août 2016, la Polynésie française conclut au rejet de la requête et de l’intervention de M. M..
Elle soutient que :
- son intervention est recevable car le projet de délibération a été soumis à l’assemblée par le conseil des ministres ;
- les dispositions contestées ne font pas grief à M. T., de sorte que la requête est irrecevable ; par voie de conséquence, l’intervention de M. M. est également irrecevable ;
- un examen professionnel est un critère de sélection légal ;
- les modalités d’intégration prévues ne sont pas discriminatoires dès lors que les fonctionnaires de catégories C ou D d’une part, et de catégorie B d’autre part, se trouvent dans des situations différentes en termes de qualifications ;
- l’obligation de détenir l’agrément de chef de manœuvre n’est pas fondée sur les dispositions de l’arrêté du 18 janvier 2007 ; elle est destinée à garantir le niveau professionnel des fonctionnaires et correspond à un programme établi selon les normes de la direction générale de l’aviation civile ; les dispositions contestées exigent seulement la qualification initiale, et non l’agrément de chef de manœuvre ;
- les modalités de l’évaluation par les services de l’Etat de l’aviation civile seront organisées par la convention dans le respect de la répartition des compétences entre l’Etat et la Polynésie française.
Par un mémoire en intervention enregistré le 1er juillet 2016, présenté par la SELARL Jurispol, M. Michel M. s’associe aux écritures de M. T..
Par un mémoire en défense enregistré le 24 août 2016, l’assemblée de la Polynésie française conclut au rejet de la requête et de l’intervention de M. M..
Elle soutient que :
- les critères d’intégration dans le cadre d’emplois des instructeurs pompiers d’aérodromes sont rationnels et objectifs, compte tenu de l’écart entre les niveaux de recrutement des agents de catégorie C ou D d’une part, et de catégorie B d’autre part ;
- l’examen professionnel est nécessaire pour contrôler les capacités des agents de catégorie C ou D à exercer les fonctions attribuées aux titulaires du cadre d’emplois de catégorie B ;
- les agents de catégorie B visés par l’article 49 sont titulaires de la qualification initiale de chef de manœuvre ; les dispositions de l’article 48 imposent seulement une formation initiale dans un centre agréé afin de s’assurer que les personnels intégrés dans le cadre d’emplois des instructeurs détiennent les compétences nécessaires à l’exercice des fonctions ;
- l’évaluation par le service de l’Etat de l’aviation civile est conforme à la répartition des compétences entre l’Etat et la Polynésie française. Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;
- la délibération n° 95-215 AT du 14 décembre 1995 ;
- l’arrêté interministériel du 18 janvier 2007 ;
- le code de l’aviation civile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
- le rapport de Mme Meyer, première conseillère,
- les conclusions de M. Retterer, rapporteur public,
- les observations de Me Quinquis, représentant M. T. et M. M., celles de Mme Drollet, représentant l’assemblée de la Polynésie française, et celles de Mme Maurel, représentant la Polynésie française.
Sur les interventions :
1. Considérant que la Polynésie française, qui a élaboré le projet de la délibération portant statut particulier des pompiers d’aérodromes approuvée le 18 février 2016 par l’assemblée de la Polynésie française, et notamment son article 48 relatif à la constitution initiale du cadre d’emplois des instructeurs pompiers d’aérodromes, a intérêt au maintien de cet article ; que, par suite, son intervention au soutien de l’assemblée de la Polynésie française est recevable ;
2. Considérant que M. M., fonctionnaire de catégorie D exerçant les fonctions d’instructeur pompier d’aérodromes depuis le mois de janvier 2014, a intérêt à l’annulation des dispositions attaquées ; que, par suite, son intervention au soutien de la requête de M. T. est recevable ;
Sur les conclusions à fin d’annulation :
Sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la Polynésie française :
3. Considérant que la délibération du 18 février 2016 portant statut particulier des pompiers d’aérodromes de la fonction publique de la Polynésie française fixe les règles applicables à deux cadres d’emplois, celui des instructeurs pompiers d’aérodromes de catégorie B et celui des pompiers d’aérodromes de catégorie C ; qu’aux termes de son article 48 : « Les fonctionnaires titulaires de la Polynésie française relevant d'un cadre d'emplois de catégorie C ou D, titulaires à la date d'entrée en vigueur de la présente délibération de l'agrément de pompier d'aérodromes en cours de validité et exerçant la fonction d'instructeur par nomination du directeur de l'aviation civile en Polynésie française, sont nommés instructeurs pompiers d'aérodromes stagiaires. / (…) / La titularisation est prononcée si le stagiaire satisfait aux conditions suivantes : / - réussite de l'examen professionnel d'intégration ; / - obtention de la qualification initiale « chef de manœuvre » auprès d'un organisme agréé au sens de la réglementation relative au service de sauvetage et de lutte contre l'incendie des aéronefs sur les aérodromes applicable en Polynésie française ; / - évaluation dans les meilleurs délais, par les services d'Etat de l'aviation civile en Polynésie française habilités par une convention de partenariat qui fixera les modalités de ces évaluations. / Lorsque la titularisation n'est pas prononcée, le stagiaire est classé dans le cadre d'emplois des pompiers d'aérodromes dans les conditions fixées au chapitre II du présent titre. » ; que M. T., fonctionnaire de catégorie D et pompier d’aérodromes exerçant les fonctions d’instructeur depuis le mois de janvier 2014, demande l’annulation des dispositions de son article 48 relatives aux conditions de titularisation des agents de catégorie C ou D ;
4. Considérant qu’aux termes de l’article 49 de la délibération du 18 février 2016 : « Les fonctionnaires titulaires de la Polynésie française relevant d’un cadre d’emplois de catégorie B, titulaires de l’agrément de pompier d’aérodromes en cours de validité au sens de la réglementation relative au service de sauvetage et de lutte contre l'incendie des aéronefs sur les aérodromes applicable en Polynésie française, du certificat d'instructeur délivré par le directeur de l'aviation civile sur autorisation des services de l'Etat de l'aviation civile en Polynésie française et exerçant leurs fonctions en cette qualité au sein de la direction de l'aviation civile à la date d'entrée en vigueur de la présente délibération, sont titularisés, à leur demande, dans un grade du cadre d'emplois des instructeurs pompiers d'aérodromes (…) » ; que les fonctionnaires de catégorie B dont ces dispositions organisent le reclassement dans un cadre d’emplois de la même catégorie ne se trouvent pas dans la même situation que ceux de catégorie C ou D dont l’article 48 de la même délibération prévoit le reclassement dans un cadre d’emplois de catégorie supérieure ; que la promotion de grade ainsi accordée à des agents de catégorie C ou D exerçant les mêmes fonctions d’instructeur que les fonctionnaires de catégorie B titulaires du certificat d'instructeur justifie de conditionner leur titularisation dans le cadre d’emplois de catégorie B par la réussite d’un examen et l’obtention d’une qualification garantissant un niveau de compétences techniques et professionnelles comparable à celui de leurs collègues de catégorie B ; qu’ainsi, les modalités d’intégration dans le cadre d’emplois des instructeurs pompiers d’aérodromes prévues par les dispositions contestées de l’article 48 la délibération 18 février 2016 ne méconnaissent pas le principe d’égalité ;
5. Considérant qu’aux termes de l’article 41 de la délibération du 14 décembre 1995 portant statut général de la fonction publique de la Polynésie française : « Le grade est distinct de l’emploi. / Le grade est le titre qui confère à son titulaire vocation à occuper l’un des emplois qui lui correspondent. (…) » ; que dès lors que les dispositions non contestées de l’article 1er de la délibération du 18 février 2016 classent en catégorie B le cadre d’emplois des instructeurs pompiers d’aérodromes, les agents de catégorie inférieure n’ont plus vocation à occuper les emplois correspondants ; qu’en l’absence de droit à la poursuite de l’exercice des fonctions d’instructeur, les moyens tirés de l’illégalité de la condition de réussite à un examen professionnel et de l’atteinte excessive à la situation professionnelle des agents de catégorie C ou D sont inopérants ;
6. Considérant que le moyen tiré de ce que la formation de chef de manœuvre ne serait pas dispensée en Polynésie française n’est pas assorti de précisions suffisantes pour permettre au tribunal d’en apprécier le bien- fondé ;
7. Considérant que la circonstance que l’arrêté interministériel du 18 janvier 2007 relatif aux normes techniques applicables au service de sauvetage et de lutte contre l’incendie des aéronefs sur les aérodromes (SSLIA) n’exige la présence d’un chef de manœuvre que sur des catégories d’aérodromes inexistantes en Polynésie française est sans incidence sur la légalité de la condition d’obtention d’une qualification initiale « chef de manœuvre », qui n’a pas pour objet l’obtention de l’agrément prévu par les dispositions de l’article D. 213-1-6 du code de l’aviation civile pour l’exercice des fonctions de chef de manœuvre du SSLIA, mais de valider le niveau de compétence requis pour l’intégration des fonctionnaires de catégorie C ou D dans le cadre d’emplois de catégorie B des instructeurs pompiers d’aérodromes ; qu’ainsi, les moyens tirés de ce que l’application de l’arrêté interministériel du 18 janvier 2007 serait inadaptée à la situation locale sont inopérants ;
8. Considérant que les services d’Etat de l’aviation civile, chargés du contrôle de la sécurité des aéroports, disposent de l’expertise nécessaire à l’évaluation des connaissances techniques et professionnelles des instructeurs pompiers d’aérodromes ; que la circonstance que le dernier alinéa de l’article 48 de la délibération du 18 février 2016 renvoie à une convention de partenariat pour fixer les modalités de cette évaluation ne caractérise, par elle-même, aucune illégalité ;
Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que M. T., qui est la partie perdante, n’est pas fondé à demander qu’une somme soit mise à la charge de l’assemblée de la Polynésie française au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Les interventions de la Polynésie française et de M. Michel M. sont admises.
Article 2 : La requête de M. Jimmy T. est rejetée.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. Jimmy T., à l’assemblée de la Polynésie française , à la Polynésie française et à M. Michel M..
Délibéré après l'audience du 24 janvier 2017, à laquelle siégeaient : M. Tallec, président, Mme Meyer, première conseillère, Mme Zuccarello, première conseillère.
Lu en audience publique le 7 février 2017.
La greffière,
D. Germain
La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition, Un greffier,
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