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Accueil > Justice administrative > Décision n° 1600143 du 11 avril 2017

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Tribunal administratif de la Polynésie française
Lecture du 11/04/2017
Décision n° 1600143

Solution : Rejet

Décision du Tribunal administratif n° 1600143 du 11 avril 2017

Tribunal administratif de Polynésie française


Vu les procédures suivantes :
I°) Par une requête enregistrée le 23 février 2016 sous le n° 1600071 et un mémoire enregistré le 13 octobre 2016, présentés par la SELARL MDC, société d’avocats, la société en nom collectif (SNC) Pharmacie de Papara et son cogérant, M. Frédéric H., demandent au tribunal : 1°) d’annuler l’arrêté n° 91 PR du 15 février 2016 autorisant à titre dérogatoire M. L. à créer une officine de pharmacie au PK 38,3 sur le territoire de la commune de Papara ; 2°) de mettre à la charge solidaire de la Polynésie française et de M. L. une somme de 700 000 F CFP au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Les requérants soutiennent que :
- la demande n’a pas été instruite, en méconnaissance des dispositions des articles 25 à 27 de la délibération n° 88-153 AT du 20 octobre 1988 ;
- en l’absence d’évolution des circonstances, l’autorisation ne pouvait être délivrée sans violer l’autorité de la chose jugée par la cour administrative d’appel de Paris ;
- la motivation de l’arrêté attaqué ne permet pas d’identifier les besoins de la population justifiant l’ouverture dérogatoire en litige ;
- les besoins de la population n’exigent pas la création de l’officine autorisée, de sorte que l’arrêté est entaché d’erreur d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 11 avril 2016, la Polynésie française conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que :
- l’annulation de l’arrêté du 28 mars 2013 a eu pour effet de la ressaisir de la demande qui a été confirmée par M. L. ; en l’absence de circonstances nouvelles, elle n’avait pas à procéder à une nouvelle instruction ;
- l’arrêté est suffisamment motivé ;
- l’autorisation accordée à titre dérogatoire n’est pas entachée d’erreur d'appréciation.
Par des mémoires en défense enregistrés les 6 juin, 28 septembre et 29 novembre 2016, présentés par Me Neuffer, avocat, M. L. conclut au rejet de la requête et demande au tribunal de mettre à la charge des requérants une somme de 300 000 F CFP au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- en cas d’annulation juridictionnelle d’une autorisation de création d’une officine, l’administration reste saisie de la demande et n’a pas à procéder à une nouvelle instruction en l’absence de circonstances nouvelles de droit ou de fait (CE 29 juin 1990 n° 93762) ; en l’espèce, aucun élément nouveau n’était de nature à justifier une nouvelle instruction ;
- l’arrêté est suffisamment motivé ;
- l’autorisation dérogatoire est justifiée par les besoins de la population.
Vu les autres pièces du dossier.
II°) Par une requête enregistrée le 6 avril 2016 sous le n° 1600133, présentée par Me Antz, avocat, le syndicat des pharmaciens des îles et de Tahiti demande au tribunal : 1°) d’annuler l’arrêté n° 91 PR du 15 février 2016 autorisant à titre dérogatoire M. L. à créer une officine de pharmacie au PK 38,3 sur le territoire de la commune de Papara ; 2°) de mettre à la charge solidaire de la Polynésie française et de M. L. une somme de 250 000 F CFP au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Le syndicat requérant soutient que :
- la demande n’a pas été instruite, en méconnaissance des dispositions des articles 25 à 27 de la délibération n° 88-153 AT du 20 octobre 1988 ;
- en l’absence d’évolution des circonstances, l’autorisation ne pouvait être délivrée sans violer l’autorité de la chose jugée par la cour administrative d’appel de Paris ;
- les besoins de la population n’exigent pas la création de l’officine autorisée, de sorte que l’arrêté est entaché d’erreur d'appréciation.
Par des mémoires en défense enregistrés les 2 et 28 septembre et le 29 novembre 2016, présentés par Me Neuffer, avocat, M. L. conclut au rejet de la requête et demande au tribunal de mettre à la charge du syndicat des pharmaciens des îles et de Tahiti une somme de 300 000 F CFP au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le syndicat requérant, qui ne produit pas ses statuts, ne démontre pas que le bureau aurait qualité pour habiliter la présidente à intenter une action en justice ; au demeurant, des conflits d’intérêts entachent la composition du bureau ; ainsi, la requête est irrecevable ;
- en cas d’annulation juridictionnelle d’une autorisation de création d’une officine, l’administration reste saisie de la demande et n’a pas à procéder à une nouvelle instruction en l’absence de circonstances nouvelles de droit ou de fait (CE 29 juin 1990 n° 93762) ; en l’espèce, aucun élément nouveau n’était de nature à justifier une nouvelle instruction ; - l’autorisation dérogatoire est justifiée par les besoins de la population.
Par des mémoires en défense enregistrés les 29 septembre et 13 octobre 2016, la Polynésie française conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que :
- l’annulation de l’arrêté du 28 mars 2013 a eu pour effet de la ressaisir de la demande qui a été confirmée par M. L. ; en l’absence de circonstances nouvelles, elle n’avait pas à procéder à une nouvelle instruction ;
- l’autorisation accordée à titre dérogatoire n’est pas entachée d’erreur d'appréciation.
Vu les autres pièces du dossier.
III°) Par une requête enregistrée le 11 avril 2016 sous le n° 1600143, présentée par Me Antz, avocat, le conseil de l’ordre des pharmaciens de la Polynésie française demande au tribunal : 1°) d’annuler l’arrêté n° 91 PR du 15 février 2016 autorisant à titre dérogatoire M. L. à créer une officine de pharmacie au PK 38,3 sur le territoire de la commune de Papara ; 2°) de mettre à la charge solidaire de la Polynésie française et de M. L. une somme de 250 000 F CFP au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Le conseil de l’ordre requérant soutient que :
- la demande n’a pas été instruite, en méconnaissance des dispositions des articles 25 à 27 de la délibération n° 88-153 AT du 20 octobre 1988 ;
- en l’absence d’évolution des circonstances, l’autorisation ne pouvait être délivrée sans violer l’autorité de la chose jugée par la cour administrative d’appel de Paris ;
- les besoins de la population n’exigent pas la création de l’officine autorisée, de sorte que l’arrêté est entaché d’erreur d'appréciation.
Par des mémoires en défense enregistrés les 14 juin, 28 septembre et 29 novembre 2016, présentés par Me Neuffer, avocat, M. L. conclut au rejet et la requête et demande au tribunal de mettre à la charge du conseil de l’ordre des pharmaciens de la Polynésie française une somme de 300 000 F CFP au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l’arrêté attaqué ne porte pas atteinte aux règles déontologiques que le conseil de l’ordre des pharmaciens a pour mission de défendre, de sorte que la requête est irrecevable ;
- en cas d’annulation juridictionnelle d’une autorisation de création d’une officine, l’administration reste saisie de la demande et n’a pas à procéder à une nouvelle instruction en l’absence de circonstances nouvelles de droit ou de fait (CE 29 juin 1990 n° 93762) ; en l’espèce, aucun élément nouveau n’était de nature à justifier une nouvelle instruction ;
- l’autorisation dérogatoire est justifiée par les besoins de la population.
Par des mémoires en défense enregistrés les 6 et 13 octobre 2016, la Polynésie française conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que :
- l’annulation de l’arrêté du 28 mars 2013 a eu pour effet de la ressaisir de la demande qui a été confirmée par M. L. ; en l’absence de circonstances nouvelles, elle n’avait pas à procéder à une nouvelle instruction ;
- l’autorisation accordée à titre dérogatoire n’est pas entachée d’erreur d'appréciation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;
- la délibération n° 88-153 AT du 20 octobre 1988 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
- le rapport de Mme Meyer, première conseillère,
- les conclusions de M. Retterer, rapporteur public,
- les observations de Me Millet, représentant la SNC Pharmacie de Papara et M. H. , celles de Me Antz, représentant le syndicat des pharmaciens des îles et de Tahiti et le conseil de l’ordre des pharmaciens de la Polynésie française, celles de M. Le Bon, représentant la Polynésie française, et celles de Me Neuffer, représentant M. L..
Dans chacune des trois instances, une note en délibéré présentée par la Polynésie française a été enregistrée le 8 mars 2017.
Dans chacune des trois instances, une note en délibéré présentée pour M. L. a été enregistrée le 9 mars 2017.
1. Considérant que par un arrêt n° 14PA00425 du 1er février 2016, la cour administrative d’appel de Paris a annulé l’arrêté du président de la Polynésie française du 28 mars 2013 autorisant M. L. à créer à titre dérogatoire une officine de pharmacie au point kilométrique (PK) 38,3 côté montagne sur le territoire de la commune de Papara ; que par l’arrêté attaqué du 15 février 2016, le président de la Polynésie française à autorisé à nouveau la création de cette officine ;
Sur la jonction :
2. Considérant que les requêtes de la SNC Pharmacie de Papara et M. H., du syndicat des pharmaciens des îles et de Tahiti et du conseil de l’ordre des pharmaciens de la Polynésie française ont fait l’objet d’une instruction commune et présentent à juges des questions semblables ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement ;
Sur les fins de non-recevoir opposées par M. L. :
3. Considérant que malgré la fin de non-recevoir opposée à deux reprises dans les écritures de M. L., le syndicat des pharmaciens des îles et de Tahiti n’a pas mis le tribunal en mesure de contrôler si ses statuts permettaient au bureau d’habiliter la présidente à intenter une action en justice ; que, par suite, sa requête ne peut qu’être rejetée pour irrecevabilité ;
4. Considérant que les intérêts du conseil de l’ordre des pharmaciens de la Polynésie française incluent le respect de la réglementation relative à l’exercice de la pharmacie, et par voie de conséquence les décisions autorisant la création d’une nouvelle officine ; que, par suite, la fin de non-recevoir tirée de ce qu’il n’aurait pas intérêt à agir doit être écartée ;
Sur les conclusions à fin d’annulation :
Sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens des requêtes :
5. Considérant qu’aux termes de l’article 26 de la délibération du 20 octobre 1988 relative à certaines dispositions concernant l’exercice de la pharmacie : « Dans les communes d’une population supérieure à 7.000 habitants, à l’exception des communes de Papeete et de Faa’a, il ne peut être délivré plus d’une licence par tranche entière de 7.000 habitants. / (…) / Si les besoins de la population l’exigent, des dérogations aux règles fixées aux alinéas précédents peuvent être accordées, après avis de la commission de régulation, mentionnée au chapitre IV du présent titre, du président du conseil de l’ordre des pharmaciens de la Polynésie française et des présidents des syndicats professionnels. (…) » ; que la population de la commune de Papara a été recensée en 2012 à 11 390 habitants ; que la création d’une seconde officine de pharmacie ne peut être autorisée que si ses besoins l’exigent ;
6. Considérant qu’aux termes de l’article 25 de la délibération du 20 octobre 1988 : « (…) Tout pharmacien se proposant de créer ou de transférer une officine doit en faire la demande préalable au ministre chargé de la santé, accompagnée de la demande d’exploitation prévue à l’article 27 de la présente délibération. / (…) / La décision de création ou de transfert est prise par l’autorité compétente après avis de la commission de régulation mentionné au chapitre IV du présent titre. Toute modification substantielle des éléments de la demande, entre la date de son dépôt et celle de son examen par ladite commission, entraîne la nullité de la demande. (…) » ; qu’aux termes de l’article 62-1 de la même délibération : « Il est institué une commission de régulation chargée de formuler un avis sur toute demande préalable de création et de transfert des établissements pharmaceutiques ou des dépôts de médicaments, notamment lorsqu’il s’agit : / - d’officine de pharmacie (…) » ; qu’aux termes de l’article 62-2 de cette délibération : « La commission de régulation est composée comme suit : / - le directeur de la santé ou son représentant, président ; - le président du conseil de l’ordre des pharmaciens de la Polynésie française ou son représentant, vice- président ; - le président du conseil de l’ordre des médecins (section locale) ou son représentant, membre ; - deux personnalités désignées par les présidents des syndicats représentatifs de la pharmacie ou leurs représentants, membres ; - une personnalité ou son suppléant, désignés par le Président du gouvernement en raison de leurs compétences, membre ; - un conseiller territorial ou son suppléant, désignés par l’assemblée de la Polynésie française, membre ; - un représentant des intérêts des usagers ou son représentant, nommés en conseil des ministres, membre. » ;
7. Considérant que l’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris n° 14PA00425 du 1er février 2016, dont la motivation est particulièrement détaillée, juge que les besoins de la population environnante et de la population saisonnière ne sont pas, à la date de l’arrêté du 28 mars 2013, de nature à justifier la création à titre dérogatoire d’une seconde officine de pharmacie sur le territoire de la commune de Papara ; que l’arrêté attaqué du 12 février 2016, qui autorise la même création, est motivé par des circonstances de fait postérieures au mois de mars 2013, de nature à modifier l’appréciation des besoins de la population, à savoir la création de deux commerces et d’un restaurant à proximité du PK 38,3, ainsi que l’ouverture au PK 38,3 d’un centre médical comprenant un médecin, sept infirmiers, quatre masseurs-kinésithérapeutes et un orthophoniste ; que ces faits nouveaux, sans lesquels la Polynésie française n’aurait pu, eu égard à l’autorité de la chose jugée par la cour administrative d’appel de Paris, prendre une nouvelle décision d’autorisation à titre dérogatoire, ne peuvent qu’être interprétés comme caractérisant une modification substantielle des éléments de la demande ayant donné lieu à l’autorisation annulée du 28 mars 2013, ce qui imposait une nouvelle instruction selon les modalités fixées par les dispositions des articles 25 et 26 de la délibération du 20 octobre 1988 ;
8. Considérant que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d’une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n’est de nature à entacher d’illégalité la décision prise que s’il ressort des pièces du dossier qu’il a été susceptible d’exercer, en l’espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu’il a privé les intéressés d’une garantie (CE Assemblée 23 décembre 2011 n° 335033, A) ;
9. Considérant qu’en l’espèce, l’absence de consultation de la commission de régulation, du président du conseil de l’ordre des pharmaciens de la Polynésie française et des présidents des syndicats professionnels a été susceptible d’exercer une influence sur le sens de la décision prise ; qu’elle a également privé d’une garantie les représentants de la profession, qui sont intéressés au respect de la règle de création d’une officine par tranche de 7 000 habitants ; que, par suite, la SNC Pharmacie de Papara, M. H. et le conseil de l’ordre des pharmaciens de la Polynésie française sont fondés à demander l’annulation de l’arrêté attaqué ;
Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, par suite, les conclusions présentées à cette fin par les parties doivent être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête du syndicat des pharmaciens des îles et de Tahiti est rejetée.
Article 2 : L’arrêté n° 91 PR du 15 février 2016 autorisant à titre dérogatoire M. L. à créer une officine de pharmacie au PK 38,3 sur le territoire de la commune de Papara est annulé.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent jugement sera notifié à la SNC Pharmacie de Papara, à M. Frédéric H., au syndicat des pharmaciens des îles et de Tahiti, au conseil de l’ordre des pharmaciens de la Polynésie française, à la Polynésie française et à M. Jean L..
Délibéré après l'audience du 7 mars 2017, à laquelle siégeaient :
M. Tallec, président, Mme Meyer, première conseillère, Mme Zuccarello, première conseillère.
Lu en audience publique le 11 avril 2017.
La greffière,
D. Germain
La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition, Un greffier,
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