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Accueil > Justice administrative > Décision n° 1500648 du 21 juin 2016

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Tribunal administratif de la Polynésie française
Lecture du 21/06/2016
Décision n° 1500648

Solution : Rejet

Décision du Tribunal administratif n° 1500648 du 21 juin 2016

Tribunal administratif de Polynésie française


Vu la procédure suivante :
Par une requête enregistrée le 11 décembre 2015 et des mémoires enregistrés les 15 janvier et 18 avril 2016, présentés par la SELARL Polyavocats, Mme Heiani P. demande au tribunal :
1°) d’annuler l’arrêté n° 1152 CM du 20 août 2015 portant déclaration d’utilité publique de l’acquisition des terrains nécessaires au projet Tahiti Mahana Beach et cessibilité des parcelles nécessaires à la réalisation de ce projet ;
2°) de mettre à la charge de la Polynésie française une somme de 300 000 F CFP au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
La requérante soutient que :
- elle est propriétaire d’un terrain en cours d’expropriation, de sorte qu’elle a intérêt à agir ; l’arrêté de cessibilité ne lui a jamais été signifié ;
- l’arrêté attaqué n’a pas été précédé d’une enquête publique diligentée par une autorité compétente et indépendante ;
- le dossier d’enquête publique est vague et sans pièces pertinentes précises, ainsi qu’il ressort du visa des pièces du dossier par l’arrêté attaqué ;
- dès lors que la construction d’un ensemble commercial ne correspond qu’à des intérêts privés, le projet ne présente aucune utilité publique ;
- le lien entre sa parcelle et l’utilité publique du projet n’est pas établi ;
- l’indemnité d’expropriation proposée ne couvre pas les sommes qu’elle a exposées pour acheter le terrain et construire sa maison, de sorte que l’arrêté attaqué est entaché d’erreur manifeste d'appréciation.
Par des mémoires enregistrés les 14 janvier et 17 mai 2016, présentés par la SELARL Jurispol, société d’avocats, l’établissement public Tahiti Nui aménagement et développement conclut au rejet de la requête et demande au tribunal de mettre à la charge de Mme P. une somme de 150 000 F CFP au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la requête enregistrée après l’expiration du délai de deux mois fixé par l’article R. 412-2 du code de justice administrative est irrecevable pour tardiveté ; il a régulièrement notifié l’arrêté de cessibilité à Mme P. sur son lieu de travail, dernière adresse connue par l’expropriant ; - les moyens tirés de ce que l’arrêté n’aurait pas été précédé d’une enquête publique diligentée par une autorité compétente et indépendante et de ce que les pièces du dossier d’expropriation seraient « indéterminées » ne sont pas assortis de précisions suffisantes ; en tout état de cause, Mme P. a été avertie de la tenue de l’enquête et a pu prendre connaissance du dossier et faire valoir ses observations éventuelles ; le rapport du commissaire enquêteur énumère les pièces du dossier ; - il ressort de l’avis du commissaire enquêteur et de l’avis rendu par le conseil économique, social et culturel de la Polynésie française que le projet est d’intérêt général ; les aménagements à vocation touristique sont destinés à créer de l’activité économique et de l’emploi en Polynésie française ; la Polynésie française s’est efforcée de limiter les parcelles privées à exproprier ; celle de Mme P. se situe dans la zone destinée à la réalisation du complexe Mahana Beach ; la requérante sera indemnisée dans le cadre de la procédure d’expropriation.
Par un mémoire en défense enregistré le 8 mars 2016, la Polynésie française conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que :
- l’arrêté attaqué ayant été publié le 28 août 2015, la requête enregistrée le 11 décembre suivant est irrecevable pour tardiveté ;
- les moyens de légalité externe ne sont pas assortis de précisions suffisantes ;
- elle s’en rapporte à l’argumentation de l’établissement public Tahiti Nui aménagement et développement sur l’intérêt général du projet.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- l’absence de M. Reymond-Kellal, nommé sous-préfet de Commercy par décret du 19 février 2016 ; - la décision du procureur général près la cour d’appel de Papeete désignant M. Rouch, substitut général, pour compléter le tribunal à l’audience du 24 mai 2016.
Vu :
- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;
- la « loi du pays » n° 2014-3 du 23 janvier 2014 ;
- le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique applicable en Polynésie française ; - le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
- le rapport de Mme Meyer, première conseillère,
- les conclusions de M. Retterer, rapporteur public,
- les observations de Me Grattirola, représentant Mme P., celles de M. Lebon, représentant la Polynésie française, et celles de Me Revault, représentant l’établissement public Tahiti Nui aménagement et développement.
Sur les conclusions à fin d’annulation :
Sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense :
1. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que l’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique du projet Tahiti Mahana Beach a eu lieu du 4 au 25 juin 2015 et que le commissaire enquêteur a été désigné par un arrêté en conseil des ministres ; qu’ainsi, le moyen tiré de ce que l’arrêté attaqué n’aurait pas été précédé d’une enquête publique diligentée par une autorité compétente et indépendante, qui n’est assorti d’aucune précision, ne peut qu’être écarté ;
2. Considérant que la circonstance que l’arrêté attaqué vise les pièces du dossier sans les énumérer ne caractérise, par elle-même, aucune irrégularité, et n’est pas de nature à faire présumer que le dossier d’enquête publique serait « vague et sans pièces pertinentes précises » ;
3. Considérant qu’en vertu de l’article LP 1er de la « loi du pays » du 3 janvier 2014 portant création de la zone prioritaire d’aménagement et de développement touristique de Mahana Beach, cette zone a pour objet « l’aménagement et l’équipement de terrains en vue de la création (…) d’un ensemble à vocation touristique qui pourra notamment comprendre des hôtels, des espaces commerciaux, des équipements sportifs et nautiques, un auditorium et un centre de congrès et de conférences, mais également un périmètre de protection patrimoniale de la pointe Tata’a » ; qu’il ressort de la note de présentation du dossier d’expropriation pour cause d’utilité publique que le projet, implanté sur le site d’Outumaoro qui est l’une des rares emprises littorales de l’agglomération [de Papeete] ayant un fort potentiel de développement et présente actuellement un aspect dégradé, doit permettre un aménagement global et cohérent sur plus d’un kilomètre par la mise en valeur d’un espace majoritairement public, la Polynésie française ayant la maîtrise foncière de 34 des 52 hectares de la zone à aménager ; que le projet Tahiti Mahana Beach devrait permettre d’accueillir jusqu’à 300 000 touristes supplémentaires par an et créer près de 8 100 emplois à terme et 5 000 pendant la durée du chantier ; que le commissaire enquêteur a émis un avis favorable motivé par l’atout que constitue ce projet pour le développement touristique et la relance économique de la Polynésie française ; que la seule circonstance que les équipements touristiques doivent être construits et exploités par des investisseurs privés n’est pas de nature à le faire regarder comme dépourvu d’intérêt général ;
4. Considérant qu’il ressort de la note de présentation du dossier d’expropriation pour cause d’utilité publique que la parcelle cadastrée A n° 32, dont Mme P. est propriétaire, a été incluse dans le périmètre de la zone à aménager afin de l’unifier et de bénéficier d’une marge foncière minimale pour réaliser l’aménagement touristique, dont l’assiette foncière reste très modeste au regard des besoins du préprogramme ébauché ; qu’ainsi, le moyen tiré de l’absence de lien entre l’expropriation de cette parcelle et l’utilité publique du projet ne peut être accueilli ;
5. Considérant qu’aux termes de l’article 13-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique applicable en Polynésie française : « Les indemnités sont fixées, à défaut d'accord amiable, par un juge de l'expropriation désigné par ordonnance du premier président de la cour d'appel de Papeete parmi les magistrats du siège appartenant au tribunal de première instance. » ; que le moyen tiré de ce que l’indemnité d’expropriation proposée ne couvrirait pas les sommes exposées par Mme P. pour acheter son terrain et construire sa maison relève d’un éventuel litige devant le juge de l’expropriation ; qu’il ne peut être utilement invoqué pour contester la légalité de l’arrêté portant déclaration d’utilité publique de l’acquisition des terrains nécessaires au projet Tahiti Mahana Beach et cessibilité des parcelles concernées ;
6. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que Mme P. n’est pas fondée à demander l’annulation de l’arrêté attaqué ;
Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que Mme P. est la partie perdante et qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre une somme à sa charge au titre des frais non compris dans les dépens exposés par l’établissement public Tahiti Nui aménagement et développement ; que, par suite, les conclusions présentées par les parties au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme Heiani P. est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par l’établissement public Tahiti Nui aménagement et développement au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié à Mme Heiani P., à la Polynésie française et à l’établissement public Tahiti Nui aménagement et développement.
Délibéré après l'audience du 24 mai 2016, à laquelle siégeaient :
M. Tallec, président, Mme Meyer, première conseillère, M. Rouch, substitut général près la cour d’appel de Papeete.
Lu en audience publique le 21 juin 2016.
La greffière,
D. Germain
La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition, Un greffier,
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