Tribunal administratif de la Polynésie française Lecture du 06/06/2017 Décision n° 1700012 Solution : Rejet | Décision du Tribunal administratif n° 1700012 du 06 juin 2017 Tribunal administratif de Polynésie française Vu la procédure suivante : Par une requête enregistrée le 4 janvier 2017, M. Michel L. et Mme Gilda V., représentés par Me Lavoye, avocate, demandent au tribunal : 1°) d’annuler la convention n°99-16 du 22 octobre 2016 relative à l’éducation conclue entre la Polynésie française et l’Etat ; 2°) de mettre à la charge de la Polynésie française et de l’Etat solidairement une somme de 150 000 F CFP au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - la convention est illégale par la voie de l’exception de l’illégalité de la délibération n°2016-59 du 7 juillet 2016 ; - la convention est entachée d’un vice de procédure à défaut d’avis du haut comité de l’éducation ; - l’article 13 de la convention contestée méconnait les dispositions de l’article 59 de la loi organique n° 2004-192 ; - l’article 31 de la convention méconnait l’arrêté 1205/CM du 7 novembre 1988 ; - les articles 6 et 24 méconnaissent les dispositions de l’article 169 de la loi organique 2004-192, 41 de la loi 84-16, 11 du décret 85-986 et 6 de l’arrêté 732 CM ; - les articles 7 et 12 sont contraires aux articles 13 et 14 de la loi organique n° 2004-192 ; - l’article 22 méconnait la répartition des compétences Etat- Polynésie française. Vu la décision attaquée. Par un mémoire en défense enregistré le 20 avril 2017, le haut- commissaire de la République en Polynésie française, conclut au rejet de la requête. Il fait valoir qu’aucun des moyens n’est fondé. Par un mémoire en défense enregistré le 5 mai 2017, la Polynésie française conclut au rejet de la requête. Elle fait valoir qu’aucun des moyens n’est fondé. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ; - la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ; - la délibération n° 93-42 AT du 10 juin 1993 portant création du haut comité territorial de l’éducation ; - le décret n°85-986 du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat, à la mise à disposition, à l'intégration et à la cessation définitive de fonctions ; - l’arrêté n° 732 CM du 17 juin 1987 portant organisation administrative et financière des établissements publics territoriaux d’enseignement ; - l’arrêté n°1205/CM du 7 novembre 1988 créant et organisant les commissions consultatives paritaires relevant de la direction des enseignements secondaires ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique du 13 juin 2017 : - le rapport de Mme Zuccarello, première conseillère ; - les conclusions de M. Retterer, rapporteur public ; - et les observations de Me Dubois, substituant Me Lavoye, représentant M. L. et Mme V., et celles de Mme Maurel, représentant la Polynésie française. Considérant ce qui suit : 1. Une convention a été signée le 22 octobre 2016 entre l’Etat et la Polynésie française relative à l’éducation. M. L. et Mme V., représentants à l’assemblée de la Polynésie française, demandent au tribunal l’annulation de cette convention. 2. En premier lieu, les requérants soutiennent que la convention contestée est illégale du fait de l’illégalité de la délibération n°2016-59 du 7 juillet 2016. Cependant l’illégalité d’un acte administratif ne peut être utilement invoquée par voie d’exception à l’appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l’application du premier acte ou s’il en constitue la base légale. Or la convention contestée par laquelle l’Etat et la Polynésie française ont déterminé les modalités de collaboration au fonctionnement du système éducatif de la Polynésie française et à son développement, n’est pas prise pour l’application de la délibération du 7 juillet 2016 par laquelle la Polynésie française a actualisée sa charte de l’éducation et adopté le rapport de performance. Ladite convention ne constitue pas davantage la base légale de la charte de l’éducation actualisée. Dès lors, le moyen tiré de l’exception de l’illégalité de la délibération du 7 juillet 2016 est inopérant et doit être écarté. 3. En deuxième lieu, aux termes de l’article 2 de la délibération n°93- 42 alors en vigueur : « Le haut comité territorial de l'éducation est chargé : 1°) - De donner un avis sur les questions dont il aura été saisi dans les matières de sa compétence : (…) 1.4 - les projets de convention à conclure, en ce qui concerne l'enseignement et la formation, par le territoire de la Polynésie française avec l'Etat en application de l'article 103, alinéa 1, de la loi n° 84-820 du 6 septembre 1984 (…) ». Or ainsi que cela ressort du procès-verbal du haut comité territorial de l’éducation dans sa séance du 27 septembre 2016, ce dernier n’a pas été saisi par le ministre de l’éducation pour émettre un avis, mais a seulement été tenu informé de l’existence du projet de convention. En conséquence, les dispositions précitées de la délibération n°93-42 n’ont pas été méconnues. 4. En troisième lieu, l’article 59 de loi organique n°2004-192 relatif aux modalités des transferts de compétences prévoit que : « L’Etat compense les charges correspondant à l’exercice des compétences nouvelles que la Polynésie française reçoit de la présente loi organique. Tout accroissement net de charges résultant pour la Polynésie française des compétences transférées est accompagné du versement concomitant par l’Etat d’une compensation financière permettant l’exercice normal de ces compétences. Le montant de cette compensation est déterminé par référence à celui des dépenses annuelles effectuées par l’Etat, à la date du transfert, au titre de ces compétences ; cette compensation évolue chaque année comme la dotation globale de fonctionnement allouée aux communes. Les charges correspondant à l’exercice des compétences transférées font l’objet d’une évaluation préalable au transfert desdites compétences. Les modalités de cette évaluation sont fixées par décret. Ces charges sont compensées par l’attribution d’une dotation globale de compensation inscrite au budget de l’Etat. La loi de finances précise chaque année le montant de la dotation globale de compensation (…) ». 5. Les requérants font valoir que l’absence de mise en place de la dotation globale de compensation afin de financer la compétence de la Polynésie française en matière d’éducation, est illégale car contraire aux dispositions précitées. Cependant, pour regrettable que soit cette absence de création d’une dotation stable et rationnelle, qui a d’ailleurs été encouragée par des recommandations dépourvues de force obligatoire de la chambre territoriale des comptes dans ses rapports de septembre 2014 et février 2016, il ressort des stipulations des articles 13 et suivants de la convention contestée, que l’Etat a mis en œuvre des mesures budgétaires permettant à la Polynésie française d’obtenir des moyens financiers dont il n’est ni soutenu ni établi qu’ils ne seraient pas équivalents à ce qu’aurait conduit l’instauration d’une dotation globale de compensation. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 59 de la loi organique n°2004-592, par l’article 13 de la convention contestée, doit être écarté. 6. En quatrième lieu, les requérants soutiennent que l’article 31 de la convention décide de la suppression des commissions consultatives paritaires crées par l’arrêté du 7 novembre 1988. Cependant, si les dispositions de l’article 31 de ladite convention ne prévoient que la consultation des commissions administratives paritaires, elles ne procèdent pas à l’abrogation de l’arrêté du 7 novembre 1988. En outre, si les requérants font valoir que l’absence de consultation des commissions consultatives paritaires sur les actes de gestion des professeurs de l’enseignement du second degré porte atteinte à des « garanties constitutionnelles et statutaires », ils ne précisent pas lesquelles. Le moyen tiré de l’illégalité de l’article 31 de la convention du 22 octobre 2016 doit donc être écarté. 7. En cinquième lieu, selon les requérants les articles 6 et 24 de la convention qui précisent que la lettre de mission, qui fixe les directives auxquelles doivent se conformer les inspecteurs de l’éducation nationale mis à disposition de la Polynésie française et les personnels de direction des collèges et lycées, est signée des administrations d’origine et d’accueil, portent atteinte aux articles 41 de la loi n°84-16 du 11 janvier 1984, 11 du décret n°85-986 du 16 septembre 1985, 6 de l’arrêté 732 CM du 17 juin 1987, ainsi qu’à l’article 169 de la loi organique n°2004-192. Toutefois, aucune de ces dispositions ne fait obstacle à ce que l’Etat et la Polynésie française décident, dans le cadre des compétences de la Polynésie française et de la mise à disposition par l’Etat du personnel enseignant et des concours financiers, d’une gestion concertée des personnels dans l’intérêt de la politique éducative de la Polynésie française. 8. Enfin, en sixième et dernier lieu, si les requérants font valoir que la création par l’article 12 de la convention contestée d’un haut comité de pilotage de l’école numérique, la possibilité créée par l’article 7 de la convention de confier aux inspecteurs d’académie-inspecteurs pédagogiques des missions de coordination d’établissements ou de politiques éducatives, ainsi que la possibilité, prévue par l’article 22 de la convention, pour des professeurs d’exercer des fonctions de chargé de mission d’inspection après avis du ministre de l’éducation, seraient contraires aux articles 13 et 14 de la loi organiques n°2004-192, les moyens ainsi soulevés ne sont pas assortis de précisions suffisantes permettant au juge d’en apprécier le bien fondé. 9. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. L. et de Mme V. doit être rejetée, y compris leur demande présentée au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, l’Etat et la Polynésie française n’étant pas les parties perdantes dans la présente instance. DECIDE : Article 1er : La requête de M. L. et de Mme V. est rejetée. Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. L., à Mme V., à la Polynésie française et au haut-commissaire de la République en Polynésie française. Délibéré après l'audience du 13 juin 2017, à laquelle siégeaient : M. Tallec, président, Mme Meyer, première conseillère, Mme Zuccarello, première conseillère. Lu en audience publique le 30 juin 2017. La greffière, D. Riveta La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition Un greffier, |