Tribunal administratif de la Polynésie française Lecture du 05/11/2019 Décision n° 1900321 Type de recours : Excès de pouvoir Solution : Rejet | Décision du Tribunal administratif n° 1900321 du 05 novembre 2019 Tribunal administratif de Polynésie française Vu la procédure suivante : Par une requête enregistrée le 11 septembre 2019, et un mémoire enregistré le 29 novembre 2019, l’association 193 demande au tribunal : - d’annuler l’arrêté n°1134 PR du 20 septembre 2018, modifiant l’arrêté n°1037 PR du 3 septembre 2018 constatant les désignations des représentants des groupements professionnels, des syndicats, des organismes et des associations au sein du Conseil économique, social et culturel de la Polynésie française et portant désignation de M. Yannick L. en qualité de représentant commun des associations Moruroa E Tatou, Tamarii Moruroa et 193 au Conseil économique, social et culturel de la Polynésie française ; - d’annuler la décision du 24 mai 2019 par laquelle le président de la Polynésie française a refusé d’abroger cet arrêté. Elle soutient que la désignation de M. L. méconnait l’article 7 de la délibération 2005-64 APF du 13 juin 2005 modifiée. Par un mémoire enregistré le 7 novembre 2019, M. L. indique s’en remettre aux écritures de la Polynésie française. Par un mémoire enregistré le 14 novembre 2019, la Polynésie française conclut au rejet de la requête. Elle soutient à titre principal que la requête est irrecevable en raison de sa tardiveté ; à titre subsidiaire qu’elle n’est pas fondée. Vu les décisions attaquées et les autres pièces du dossier. Vu : - la loi organique n°2004-192 du 27 février 2004 modifiée portant statut d’autonomie de la Polynésie française, ensemble la loi n°2004-193 complétant le statut d’autonomie de la Polynésie française ; - la délibération n°2005-64 APF du 13 juin 2005 portant composition, organisation et fonctionnement du Conseil économique, social et culturel de la Polynésie française ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience. Ont été entendus au cours de l’audience publique : - le rapport de M. Tallec, président-rapporteur, - les conclusions de M. Retterer, rapporteur public, - les observations de Mme Izal, représentant la Polynésie française. Une note en délibéré présentée par l’association 193 a été enregistrée le 6 décembre 2019. Considérant ce qui suit : 1. En application des dispositions des articles 147, 148 et 149 de la loi organique statutaire n°2004-192 du 27 février 2004, l'Assemblée de la Polynésie française a adopté la délibération n° 2005-64 APF du 13 juin 2005 portant composition, organisation et fonctionnement du Conseil économique, social et culturel, modifiée à cinq reprises depuis son adoption. L'article 6-1 de cette délibération, dans sa version résultant de la délibération n° 2018-35 du 21 juin 2018, dispose : « Les représentants des secteurs socioculturels composant le collège de la vie collective sont désignés ainsi qu'il suit : [...]1 représentant désigné en commun par l'association Moruroa E Tatou, l'association Tamarii Moruroa et l'association 193. » L'article 7-1 de la même délibération prévoit les modalités de désignation des représentants siégeant au Conseil économique, social environnemental et culturel : « Lorsqu'un ou plusieurs sièges sont attribués en commun à 2 ou plusieurs groupements professionnels, syndicats, organismes ou associations, le ou les titulaires sont désignés par un collège formé par les représentants des groupements concernés, à raison d'un représentant désigné par chaque groupement conformément à ses statuts. Le collège désigne le titulaire de chaque siège à pourvoir, en son sein, par un vote uninominal majoritaire. Si un second tour ne permet pas de départager les candidats, le titulaire sera, à égalité des voix, le plus jeune. Ce collège est convoqué à la diligence du secrétaire général du Conseil économique, social et culturel qui s’assure de la régularité de la désignation du représentant par le collège. » 2. Sur le fondement des dispositions citées au point précédent, les représentants des associations Moruroa E Tatou, Tamarii Moruroa et 193 se sont réunis le 14 septembre 2018 pour procéder à la désignation du titulaire de leur siège commun au Conseil économique, social et culturel. A l’issue du second tour de scrutin, chacun des trois candidats ayant obtenu une voix, le plus jeune d’entre eux, M. Yannick L., représentant de l’association Tamarii Moruroa, a été proclamé élu. Par arrêté n°1134 PR du 20 septembre 2018, le président de la Polynésie française a constaté la désignation de l’intéressé en qualité de représentant commun des trois associations. Le 24 septembre 2018, l’association 193 a écrit au président de la Polynésie française aux fins de « signalement d’une irrégularité », en lui indiquant que lors de la réunion du 14 septembre 2018, l’association Moruroa E Tatou était représentée par une personne irrégulièrement désignée, et en lui demandant que toutes les dispositions soient prises pour que le représentant commun soit désigné en conformité avec les prescriptions de la délibération n° 2005-64 APF du 13 juin 2005. Par courrier n°8028/PR du 26 novembre 2018, le président de la Polynésie française lui a répondu que cette désignation était régulière. Par un nouveau courrier du 28 mars 2019, l’association 193 a demandé au président de la Polynésie française « l’annulation » de l’arrêté n°1134 PR et l’organisation d’une nouvelle élection. Par lettre du 24 mai 2019, le président de la Polynésie française a refusé de faire droit à cette demande. 3. En premier lieu, aux termes de l’article R.421-1 du code de justice administrative : « La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. » Il ressort des pièces versées au dossier que l’arrêté n°1134 PR du 20 septembre 2018 a été publié au Journal officiel de la Polynésie française le 28 septembre 2018. Par suite, les conclusions de l’association 193 tendant à l’annulation de l’arrêté n°1134 PR du 20 septembre 2018, enregistrées le 11 septembre 2019, sont tardives. 4. En deuxième lieu, l’association 193 soutient que la désignation de M. L. par l’association Tamarii Moruroa a été faite en méconnaissance de l’article 7 de la délibération n° 2005-64 APF, aux termes duquel : « Les groupements professionnels, les syndicats, les organismes, les associations et les entreprises désignent leur(s) représentant(s) au Conseil économique, social et culturel, conformément à leurs statuts respectifs et dans le respect des conditions fixées à l’article 148 de la loi organique n° 2004- 192 du 27 février 2004 susvisée. Dans le respect des conditions fixées à l’article 147 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 modifiée susvisée, leur importance est notamment déterminée selon les critères suivants : 2° Justifier du renouvellement régulier, dans les formes statutaires, de l’organe de direction depuis au moins 2 ans, le cas échéant ... » Elle fait valoir que le bureau de l’association Tamarii Moruroa n’avait pas été renouvelé depuis le 30 novembre 2013, si bien qu’à la date de la désignation contestée, M. L. ne pouvait régulièrement la représenter. 5. Toutefois, l'administration ne peut retirer ou abroger une décision expresse individuelle créatrice de droits, hors le cas où elle satisfait à une demande du bénéficiaire, que dans le délai de quatre mois suivant l'intervention de cette décision et si elle est illégale. Il résulte des dispositions citées au point 1 que l’arrêté du président de la Polynésie française désignant un membre du Conseil économique, social et culturel revêt le caractère d’une décision individuelle créatrice de droits qui ne peut, dès lors, être abrogée, à l’initiative de l’autorité de nomination ou sur la demande d'un tiers, que dans le délai de quatre mois suivant son édiction et à la condition qu’elle soit illégale. Par suite, saisi le 28 mars 2019, soit plus de quatre mois après la publication de l’arrêté portant désignation de M. L., le président de la Polynésie française ne pouvait que rejeter la demande de l’association 193 tendant à l’abrogation de cet arrêté. 6. Il résulte de ce qui précède que la requête de l’association 193 ne peut qu’être rejetée. DECIDE : Article 1er : La requête de l’association 193 est rejetée. Article 2 : Le présent jugement sera notifié à l’association 193, à la Polynésie française et à M. L.. Délibéré après l'audience du 3 décembre 2019, à laquelle siégeaient : M. Tallec, président, M. Katz, premier conseiller, Mme Theulier de Saint-Germain, première conseillère. Lu en audience publique le 12 décembre 2019. Le président-rapporteur, Le premier assesseur, La greffière, D. Germain La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, Un greffier, |