Tribunal administratif de la Polynésie française Lecture du 25/05/2021 Décision n° 2000675 Type de recours : Excès de pouvoir Solution : Satisfaction
| Décision du Tribunal administratif n° 2000675 du 25 mai 2021 Tribunal administratif de Polynésie française Vu la procédure suivante : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 décembre 2020 et le 23 avril 2021, M. Hama X., représenté par Me Céran-Jérusalemy, demande au tribunal : 1°) d’annuler l’arrêté du 23 juillet 2020 portant autorisation à titre de régularisation de l’occupation temporaire d’emplacement du domaine public maritime remblayé d’une superficie de 2242 m² sur la commune de Bora-Bora (commune associée de Aunau) au profit de M. Victor X. ; 2°) de mettre à la charge de la Polynésie française la somme de 339 000 F CFP en application de l’article L. 7611 du code de justice administrative. Il soutient que : - l’arrêté du 23 juillet 2020 ne respecte pas les conditions de recevabilité imposées aux demandes d’occupation de dépendances du domaine public définies par l’arrêté n° 385/CM du 4 mars 2004 ; M. Victor X. ne dispose d’aucun droit de propriété dans la terre Papaaiti BD n° 33 et BD n° 75 ; - M. Victor X. ne peut pas se prévaloir de l’autorisation accordée à son père Teihoti X. ; M. Teihotu X. était occupant sans titre du domaine public ; de plus, celui-ci n’a pas réglé ses redevances domaniales depuis 1997 ; la Polynésie française n’est pas habilitée à régler la succession de M. Teihotu X. décédé le 31 juillet 2018 ; l’administration ne pouvait régulariser une autorisation arrivée à expiration il y a plus de 23 ans ; la demande de M. Victor X. ne peut s’analyser que comme une demande nouvelle ; les prescriptions de l’arrêté n° 385/CM du 4 mars 2004 ont ainsi été méconnues ; Par un mémoire en défense, enregistré le 6 avril 2021, la Polynésie française conclut au rejet de la requête. Elle fait valoir que : - à titre principal, la requête est irrecevable car l’arrêté attaqué a été publié au journal officiel de la Polynésie française le 31 juillet 2020 et le recours administratif adressé au ministre en charge des affaires foncières, réceptionné le 26 août 2020, n’a pu proroger le délai de recours, dès lors qu’il était demandé, par ce recours, « l’annulation » de l’arrêté du 31 juillet 2020, ce que le ministre n’a pas le pouvoir de faire ; - à titre subsidiaire, les moyens de la requête ne sont pas fondés. Par des mémoires enregistrés le 2 avril 2021 et le 7 mai 2021, M. Victor X., représenté par Me Levrat, conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Vu la décision attaquée et les autres pièces du dossier. Vu : - la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ; - la délibération n° 2004-34 du 12 février 2004 ; - l’arrêté n° 1334/CM du 8 septembre 2015 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience. Ont été entendus au cours de l’audience publique : - le rapport de M. Katz, - les conclusions de Mme Theulier de Saint-Germain, rapporteure publique, - et les observations de Me Céran-Jerusalémy représentant M. Hama X., de Mme Ahutoru représentant la Polynésie française et de Me Levrat représentant M. Victor X.. Considérant ce qui suit : 1. Par arrêté du 23 juillet 2020, le président de la Polynésie française a accordé à M. Victor X. une autorisation d’occupation temporaire du domaine public maritime sur une dépendance remblayée d’une superficie de 2242 m² sise la commune de Bora-Bora (commune associée de Aunau). M. Hama X., frère du requérant demande l’annulation de cet arrêté. Sur la fin de non-recevoir opposée en défense : 2. L’arrêté attaqué a été publié au journal officiel de la Polynésie française le 31 juillet 2020. Par lettre adressée au ministre en charge des affaires foncières, réceptionnée le 26 août 2020, soit dans un délai de deux mois suivant la publication de l’arrêté litigieux, M. X. a formé un recours administratif contre cet arrêté. La circonstance que M. X. a demandé audit ministre « l’annulation » de l’acte querellé, et non pas le retrait de cet acte, n’enlève pas à la demande qu’il a formée son caractère de recours administratif. L’administration ayant gardé le silence sur ce recours pendant deux mois, une décision implicite de rejet est intervenue et un nouveau délai de recours contentieux de deux mois a démarré à compter de la naissance de cette décision implicite. Par suite, la présente requête, enregistrée le 21 décembre 2020, soit avant l’expiration de ce nouveau délai de recours contentieux, n’est pas tardive. Sur les conclusions à fin d’annulation : 3. Aux termes de l’article 9 de l’arrêté n° 1334 CM du 8 septembre 2015, applicable en l’espèce : « Toute demande d’autorisation d’utilisation temporaire du domaine public doit être déposée auprès du gestionnaire de la dépendance du domaine public sollicitée au sens de l’article 4 ci-dessus. Cette demande doit indiquer l’objet et la durée de cette occupation et comporter les pièces suivantes : (…) le cas échéant, le titre de propriété ou bail de location, ou tous documents pouvant attester de droits immobiliers sur la terre attenante (…) ». 4. Il résulte de ces dispositions qu’elles ont nécessairement entendu conditionner la délivrance d’une autorisation d’occupation du domaine public à la production, par le pétitionnaire d’une telle autorisation, de tous documents pouvant attester de droits immobiliers sur la terre attenante lorsque ce pétitionnaire se prévaut de ce qu’il occupe des terres attenantes à la dépendance du domaine dont s’agit. 5. Il est constant que M. Victor X. a obtenu l’autorisation d’occupation du domaine public attaquée en qualité d’occupant de terres attenantes aux dépendances concernées. Or, M. Victor X. n’a pas justifié de droits immobiliers sur ces terres. Par suite, et sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, l’arrêté du 23 juillet 2020 doit être annulé. Sur les conclusions au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : 6. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la Polynésie française la somme de 150 000 F CFP au titre des frais de procès exposés par M. Hama X.. DECIDE : Article 1er : L’arrêté du 23 juillet 2020 portant autorisation d’occupation temporaire du domaine public maritime, au profit de M. Victor X. sur la commune de Bora-Bora (commune associée de Anau), est annulé. Article 2 : La Polynésie française versera la somme de 150 000 F CFP à M. Hama X. au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. Hama X., à la Polynésie française et à M. Victor X.. Copie en sera délivrée au haut-commissaire de la République en Polynésie française. Délibéré après l’audience du 11 mai 2021, à laquelle siégeaient : M. Devillers, président, M. Katz, premier conseiller, M. Retterer, premier conseiller, Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 mai 2021. Le rapporteur, D. Katz Le président, P. Devillers La greffière, D. Germain La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision. Pour expédition, Un greffier, |