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Tribunal administratif de la Polynésie française
Lecture du 08/06/2021
Décision n° 2000573

Type de recours : Excès de pouvoir

Solution : Rejet

Décision du Tribunal administratif n° 2000573 du 08 juin 2021

Tribunal administratif de Polynésie française


Vu la procédure suivante :
Par une requête enregistrée le 8 octobre 2020 et des mémoires enregistrés le 24 décembre 2020 et le 6 février 2021, Mme Hina X. demande au tribunal :
1°) d’annuler l’arrêté n°597 du 3 septembre 2020 du haut-commissaire de la République en Polynésie française ;
2°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 150 000 FCFP au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme X. soutient que : elle a qualité à agir, possédant des droits indivis sur la terre Manua ; le tomite, lui conférant des droits indivis a une autorité supérieure à celle du plan cadastral ; l’avis du commissaire enquêteur méconnait le litige sur le titre de propriété ; l’arrêté de cessibilité est un acte issu d’une opération complexe, dès lors l’illégalité de l’arrêté n°733 du 7 novembre 2019 entraine l’illégalité de l’arrêté de cessibilité ; le rapport du commissaire enquêteur est insuffisant ; il y a erreur de fait manifeste sur l’identité des propriétaires ; la DUP est excessive ; l’expropriant était en mesure de réaliser l’opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l’expropriation, la ressource en eau ayant déjà fait l’objet d’une protection adéquate ; la réalisation de simples opérations d’entretien n’exige aucunement l’expropriation des terrains concernés ; en prévoyant la constitution de zones à destination d’un projet pédagogique, le périmètre de l’expropriation comprenait l’inclusion de parcelles sans rapport avec l’opération publique ; la cessibilité des parcelles prévue à l’article 4 de l’arrêté du 7 novembre 2019 n’a pas été mise en œuvre dans les délais prescrits, soit dans les deux mois suivant sa publication.
Par un mémoire en défense enregistré le 23 décembre 2020, le haut- commissaire de la République en Polynésie française conclut au rejet de la requête. Il soutient que la requête n’est pas fondée. Par une ordonnance du 8 février 2021, la clôture de l’instruction a été fixée au 26 février 2021.
Par lettre du 24 mars 2021, le tribunal a informé les parties qu’il était susceptible de soulever d’office un moyen d’ordre public tiré de ce que Mme X. ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité à demander l'annulation de l'arrêté de cessibilité en tant qu'il concerne des terrains autres que ceux lui appartenant.
Par mémoire enregistré le 28 mars 2021, Mme X. a présenté ses observations sur le moyen d’ordre public soulevé par le tribunal.
Vu l’arrêté attaqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;
- le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique applicable en Polynésie française ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
- le rapport de M. Retterer, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Theulier de Saint-Germain, rapporteure publique,
- les observations de Mme X., et celles de Mme Perret, représentant le haut-commissaire de la République en Polynésie française.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 13 février 2019, le haut-commissaire de la République en Polynésie française a ordonné deux enquêtes publiques préalables à la déclaration d’utilité publique en vue d’assurer la maitrise foncière des parcelles des terres où se situent les ouvrages de captage et de traitement de l’eau de la rivière Punaruu, au profit du syndicat intercommunal Te Oropaa. L’enquête parcellaire en vue de délimiter exactement les parcelles de terres nécessaires à la réalisation de cette opération portait notamment sur la parcelle K1-1 « Manua-Vaimoora », devenue K1-16. Par arrêté n° HC 733 du 7 novembre 2019, le haut-commissaire de la République en Polynésie française a déclaré d’utilité publique la protection et l’exploitation du site de captage et de traitement de la rivière Punaruu dans la commune de Punaauia par le syndicat intercommunal Te Oropaa, ainsi qu’immédiatement cessibles les parcelles désignées. Toutefois, la cessibilité des parcelles n’ayant pas été mis en œuvre dans les délais prescrits, le haut-commissaire de la République en Polynésie française a ordonné une nouvelle fois, par arrêté n° HC 597 DIRAJ/BAJC du 3 septembre 2020, la cessibilité en partie des terres Paoa-Teaamara, Manua- Vaimoora et Tehaunatahua, nécessaire à la protection et l’exploitation du site de captage et de traitement de la rivière Punaruu dans la commune de Punaauia. Mme X. conteste la légalité de cet arrêté du 3 septembre 2020. Sur les conclusions à fin d’annulation dirigées contre l’arrêté de cessibilité en tant qu’il concerne des terrains autres que ceux appartenant à Mme X. :
2. Mme X., qui fait état de sa qualité à agir à l’encontre de cet arrêté en faisant valoir être propriétaire de la parcelle KI, au regard de sa filiation et de sa revendication de cette terre, ne fait état d’aucune circonstance particulière de nature à lui conférer un intérêt lui donnant qualité pour demander l’annulation de l’arrêté du haut-commissaire de la République en Polynésie française déclarant cessibles les autres terrains nécessaires en vue de la réalisation, la protection et l’exploitation du site de captage et de traitement de la rivière Punaruu. Les conclusions de la requérante sont, dans cette mesure, irrecevables et ne peuvent qu’être rejetées.
Sur les conclusions à fin d’annulation dirigées contre l’arrêté de cessibilité en tant qu’il concerne la parcelle appartenant à Mme X. :
3. Aux termes de l’article Art. L. 11-8 du code de l’expropriation : « L'autorité compétente pour déclarer l'utilité publique d'une expropriation détermine par arrêté de cessibilité la liste des parcelles ou des droits réels immobiliers à exproprier si cette liste ne résulte pas de la déclaration d'utilité publique ». Aux termes de l’article R. 11-10 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique applicable en Polynésie française : « — Le commissaire enquêteur ou la commission examine les observations consignées ou annexées aux registres et entend toutes personnes qu'il paraît utile de consulter ainsi que l'expropriant s'il le demande / Le commissaire enquêteur ou le président de la commission d'enquête rédige des conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables ou non à l'opération. Le commissaire enquêteur ou le président de la commission d'enquête transmet le dossier avec ses conclusions soit au préfet si l'enquête est ouverte à la préfecture, soit au sous-préfet dans les autres cas. Le dossier est transmis, le cas échéant, par le préfet au sous-préfet avec son avis ». Aux termes de l’article R. 11-19 du même code « (…) la liste des propriétaires établie à l'aide d'extraits des documents cadastraux délivrés par le service du cadastre ou à l'aide des renseignements délivrés par le service du cadastre ou à l'aide des renseignements délivrés par le conservateur des hypothèques et, le cas échéant, par le curateur aux biens et successions vacants, ou par tous autres moyens ». Aux termes de l’article R. 11-23 du même code : « Les propriétaires auxquels notification est faite par l'expropriant du dépôt du dossier à la mairie sont tenus de fournir les indications relatives à leur identité. /L'identification des personnes physiques comprend les nom, prénoms dans l'ordre de l'état civil, domicile, date et lieu de naissance et profession, ainsi que le nom du conjoint. / L'identification des sociétés, associations, syndicats et autres personnes morales comprend leur dénomination ; pour toutes les sociétés, leur forme juridique et leur siège social ; pour les associations, leur siège, la date et le lieu de leur déclaration ; pour les syndicats, leur siège, la date et le lieu de dépôt de leurs statuts. / A défaut, les personnes qui reçoivent la notification mentionnée au premier alinéa sont tenues de donner tous renseignements en leur possession sur l'identité du ou des propriétaires actuels ».
4. Il appartient au juge, lorsqu'il doit se prononcer sur le caractère d'utilité publique d'une opération nécessitant l'expropriation d'immeubles ou de droits réels immobiliers, de contrôler successivement qu'elle répond à une finalité d'intérêt général, que l'expropriant n'était pas en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation, et, enfin, que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d'ordre social ou économique que comporte l'opération ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente. Il lui appartient également, s'il est saisi d'un moyen en ce sens, de s'assurer, au titre du contrôle sur la nécessité de l'expropriation, que l'inclusion d'une parcelle déterminée dans le périmètre d'expropriation n'est pas sans rapport avec l'opération déclarée d'utilité publique.
5. En premier lieu, les dispositions précitées de l’article R. 11-10 du code de l’expropriation impliquent que le commissaire enquêteur indique, au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de cet avis favorable ou non à l’opération d’utilité publique. Elles n’impliquent pas que le commissaire enquêteur, lorsqu’il analyse les observations consignées au registre, se prononce sur les litiges de propriété portant sur des parcelles concernées par l’opération, ni sur la fiabilité des titres de propriétés des propriétaires concernant ces mêmes parcelles. Ainsi, le moyen tiré de ce que le commissaire enquêteur a méconnu le litige existant sur le titre de propriété de la parcelle K1-1 « Manua » entre les ayants droit Vahinehau a Pohuetea et les consorts Tuhoe, ne peut, en tout état de cause, qu’être écarté.
6. En deuxième lieu, en se bornant à soutenir qu’il y a erreur manifeste sur l’identité des propriétaires, la requérante n’établit pas que les dispositions précitées des articles R. 11-19 et R. 11-23 du code de l’expropriation auraient été méconnues.
7. En troisième lieu, le moyen tiré de ce que le périmètre de l’expropriation inclut la parcelle KI 2 au titre du projet éco-pédagogique situé sur cette parcelle, alors que ce projet est sans rapport avec l’opération publique visée par l’arrêté, est sans incidence sur la légalité de l’arrêté attaqué en tant qu’il porte sur la parcelle KI 1 appartenant à la requérante, délimitant son intérêt pour agir ainsi qu’il a été dit au point 2.
8. En quatrième lieu, d’une part, il ressort du dossier d’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique et d’enquête parcellaire, de l’étude d’impact de février 2019 et du rapport d’enquête du commissaire enquêteur en date du 24 avril 2019, que le projet en cause, qui vise la maitrise foncière des parcelles des terres où se situent les ouvrages de captage et de traitement de l’eau de la rivière Punaruu, a pour objet la protection et l’exploitation du site de captage et de traitement de la rivière. Il vise à permettre au syndicat intercommunal Te Oropaa, notamment d’implanter de nouveaux ouvrages d’adduction en eau potable nécessaires pour améliorer la qualité de l’eau servie aux usagers, la sécurisation du site afin de préserver la ressource en eau vis-à-vis des pollutions ponctuelles et accidentelles susceptibles de provenir du voisinage, ainsi qu’à faciliter l’aménagement et l’entretien des abords des ouvrages et l’accès à la rivière pour réaliser des travaux de curage, de réhabilitation, d’enrochements. Le commissaire enquêteur a émis un avis favorable au projet, « sous réserve de la prise en compte de ses recommandations », le regardant de nature à sécuriser et améliorer la qualité de l’eau potable pour les usagers.
9. D’autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que l’application des dispositions protectrices du code de l’aménagement classant les parcelles en zone NCE et NDf, l’existence de convention de passage ou les conclusions de baux au profit du syndicat intercommunal Te Oropa’a par les propriétaires permettaient à l’expropriant, au regard de la finalité du projet, de réaliser de celui-ci dans des conditions équivalentes sans recourir à l’expropriation. Dans ces conditions, Mme X. n’établit pas que le projet litigieux porterait une atteinte excessive à l’intérêt général en incluant dans le périmètre d'expropriation sa parcelle, ni que l'expropriant était en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation.
10. En cinquième lieu, aux termes de l’article L. 11-5 du code de l’expropriation : « I. - L'acte déclarant l'utilité publique doit intervenir au plus tard dix-huit mois après la clôture de l'enquête préalable. Passé ce délai, il y a lieu à une nouvelle enquête. / II - L'acte déclarant l'utilité publique précise le délai pendant lequel l'expropriation devra être réalisée. Ce délai ne peut être supérieur à cinq ans (…) ». En se bornant à indiquer que l’arrêté de cessibilité doit être annulé dès lors qu’il n’a pas été mis en œuvre dans les délais prescrits, alors que l’arrêté litigieux a justement été adopté parce que la cessibilité des parcelles n’avait pas été mis en œuvre dans les délais prescrits par l’arrêté du 7 novembre 2019, et ce, dans le respect les délais fixés par l’article L. 11-5 précité du code de l’expropriation, la requérante n’établit pas que l’arrêté litigieux serait entaché d’illégalité.
11. Il résulte de ce qui précède que Mme X. n’est pas fondée à demander l’annulation de l’arrêté attaqué. Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
DECIDE :
Article 1er : La requête présentée par Mme X. est rejetée.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme Hina X., et à la Polynésie française.
Copie en sera transmise au haut-commissaire de la République en Polynésie française, et au syndicat intercommunal Te Oropaa.
Délibéré après l'audience du 25 mai 2021, à laquelle siégeaient :
M. Devillers, président, M. Retterer, premier conseiller, M. Katz, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juin 2021.
La greffière,
D. Germain
La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
Pour expédition, Un greffier,
X
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